Le premier dimanche de l’Avent, une nouvelle année liturgique commence. Comment s’y retrouver dans son missel ?
L’examen attentif d’un missel d’autel ou d’un missel pour les fidèles révèle aux yeux du curieux plusieurs singularités :
- le missel est divisé en deux grandes parties séparées par l’Ordinaire de la Messe : d’un côté, le Temporal qui embrasse la succession des dimanches, de l’autre, le Sanctoral qui voit se succéder les fêtes des saints.
- l’année liturgique ne coïncide pas avec l’année civile : le Temporal commence le 1er dimanche de l’Avent et le Sanctoral le 29 novembre (mémoire de saint Saturnin).
- l’articulation du Temporal se fait autour de deux grandes fêtes, Noël et Pâques, qui sont préparées, célébrées et prolongées.
Que nous indiquent ces particularités ? Le pape Pie XII nous le découvre dans son encyclique Mediator Dei du 20 novembre 1947.
Le temporal centré sur le Christ
On a coutume d’appeler le dimanche « le jour du Seigneur » et l’on a bien raison. En effet, le Temporal qui voit défiler les dimanches de l’année liturgique est tout centré sur la personne adorable de notre Sauveur :
« Tout le long de l’année, la célébration du sacrifice eucharistique et les prières des Heures se déroulent principalement autour de la personne de Jésus-Christ ; elles sont si harmonieusement et si convenablement disposées que notre Sauveur, avec les mystères de son abaissement, de sa rédemption et de son triomphe, y occupe la première place. »
Les Actes des Apôtres disent du Christ : « Jesus cœpit facere et docere — Jésus commença à agir et à enseigner » (Act 1, 1 ). On peut en dire autant de la liturgie : elle nous présente le Christ comme modèle à imiter et comme maître à écouter.
Lorsque saint Augustin affirme : « Le tout de la religion est d’imiter Celui à qui l’on adresse son culte » (La cité de Dieu, VIII, 17), Pie XII commente :
« Grâce à ces arrangements et à ces dispositions de la liturgie qui lui permettent de proposer à notre méditation, à époques déterminées, la vie de Jésus-Christ, l’Église nous met sous les yeux les exemples que nous avons à imiter ; elle nous indique les trésors de sainteté que nous pouvons nous approprier, car ce qu ’on chante des lèvres, il faut le croire en esprit, et ce que l’esprit croit doit passer dans les habitudes de la vie privée et publique. »
Puis, il continue :
« De plus, elle ne nous Le propose pas seulement à imiter ; elle nous montre aussi en Lui le Maître auquel nous avons à prêter une oreille attentive, le Pasteur qu’il nous faut suivre, l’Auteur de notre salut, le Principe de notre sainteté, la Tête mystique dont nous sommes les membres, jouissant de sa vie. »
En un temps où la Liturgie de la Parole se fait envahissante, Pie XII rappelle que la liturgie n’est pas un catéchisme : elle est d’abord le vrai culte rendu au vrai Dieu, elle se fait ensuite pédagogie en disposant les âmes au culte grâce aux enseignements du divin Maître.
A l’heure où le modernisme distingue et sépare le « Christ de la foi » et le « Christ de l’histoire », le Temporal remet devant les yeux des chrétiens l’histoire réelle, bien que pleine de mystères, du Sauveur :
« La sainte Liturgie nous met sous les yeux le Christ tout entier et dans toutes les conditions de sa vie, c’est-à-dire, Celui qui est le Verbe de Dieu, qui nous enseigne la vérité, qui guérit les malades, qui console les affligés, qui endure les douleurs, qui meurt et qui, ensuite, triomphant de la mort, ressuscite, qui régnant dans la gloire du ciel répand sur nous l’Esprit Saint qui vit perpétuellement dans son Église. »
Le Christ ne s’est pas présenté à nous seulement comme vérité et vie, mais aussi comme voie (Jn 11, 6) : « Il s’est montré à nos regards vraiment revêtu de notre chair mortelle » (Communicantes de l’Épiphanie), « en sorte que désormais, connaissant Dieu visiblement, nous soyons ravis par Lui en l’amour des choses invisibles » (Préface de Noël).
L’ordre du temporal
Le Temporal s’articule autour de deux grands cycles liturgiques :
- celui de Noël : du 1er dimanche de l’Avent au dernier dimanche après l’Épiphanie,
- celui de Pâques : de la Septuagésime au dernier dimanche après la Pentecôte.
L’Église nous remet ainsi devant les yeux les trois principaux mystères de notre religion : la Trinité (objet de tout le culte liturgique), l’Incarnation (cycle de Noël) et la Rédemption (cycle de Pâques).
Chaque cycle se déroule en trois temps :
- la préparation (Avent /Septuagésime et Carême),
- la célébration (Octave de Noël /Octave de Pâques),
- la manifestation (l’Épiphanie et les dimanches suivants /la Pentecôte et les dimanches suivants).
Consciente de notre faiblesse et de notre lenteur à comprendre (Lc 24, 25), l’Église commence par nous préparer soigneusement à la fête, puis elle la célèbre avec magnificence pendant huit jours, avant d’en manifester toutes les virtualités au fil des nombreux dimanches qui suivent.
Le culte des saints
Le culte liturgique, tout centré sur Jésus-Christ dans le Temporal, intègre aussi les saints dans le Sanctoral. Ce faisant, il n’est nullement porté ombrage au culte de l’unique Médiateur (1 Tim 2, 5), car « en couronnant les mérites des saints, Dieu couronne ses propres grâces » (Préface des Saints).
Les saints insérés dans l’année liturgique doivent être pour les chrétiens :
- des exemples à imiter : « Par ces fêtes, l’Église poursuit toujours, quoique dans un ordre inférieur et subordonné, le même but : proposer aux fidèles des modèles de sainteté, sous l’impulsion desquels ils se revêtent des vertus du divin Rédempteur. Nous devons être, en effet, les imitateurs des saints du ciel, dans la vertu desquels resplendit à des degrés divers la vertu même de Jésus-Christ, comme ils furent eux-mêmes ses imitateurs. »
- des intercesseurs à invoquer : « Il y a encore un autre but au culte que le peuple fidèle rend aux saints du ciel : c’est celui d’implorer leur secours, en sorte que “nous complaisant à les louer, nous trouvions aussi un secours dans leur patronage”. On explique par là, aisément, les nombreuses formules de prière que nous propose la sainte Liturgie pour implorer le secours des saints. »
En résumé, « tel est le chemin liturgique qui s ’ouvre à nouveau devant nous tous les ans, et que s’applique à nous faire parcourir l’Église, ouvrière de sainteté. Aidés des secours et fortifiés par les exemples des saints du ciel, et, en particulier, de l’Immaculée Vierge Marie, suivons ce chemin et “dans la plénitude de la foi, le cœur purifié des souillures d’une mauvaise conscience et le corps lavé dans une eau pure, avec un cœur sincère, approchons- nous” du “Grand Prêtre”, afin de vivre avec Lui et de nous trouver d’accord avec Lui, de manière à pouvoir pénétrer avec Lui “jusqu’à l’intérieur du voile” et y honorer pendant toute l’éternité le Père céleste. »
Bonne et sainte année liturgique à tous !
Source : La lettre de Saint Florent n° 168 – décembre 2011