Saint Joseph nous apprend à mettre notre vie en ordre en recherchant d’abord le Royaume de Dieu et sa justice.
Modèle de patience
Notre siècle, dominé par la technique, nous habitue à la hâte ; il faut faire vite, obtenir des résultats rapides, gagner partout des courses. De la vitesse en tout… Pourtant, la conquête du Royaume de Dieu, l’évangélisation des autres et la pénétration de l’Évangile au plus profond de nous mêmes, cela échappe à la rapidité, au succès facile, au triomphe éclatant ; le christianisme ne se propage pas vite. De là, nos irritations, nos déceptions, nos projets révolutionnaires. […] Nous formons de grands rêves et dans le cas de non-réussite, ou de réussite lentement acquise, nous perdons tout enthousiasme. Sommes-nous donc des enfants jouant avec des bulles de savon ?… On pourrait le croire !
Pour nous guérir ou nous préserver de cette manie de la hâte, regardons Nazareth. Des années passent et pourtant rien ne paraît bouger. Tous trois : Jésus, Marie, Joseph, restent tapis dans l’obscurité. Ils n’ont rien bouleversé ; ils semblent perdre leur temps ; où sont les succès à grand tapage ? où sont les triomphes merveilleux ?… Du silence, c’est tout. L’extension du Royaume de Dieu n’est donc pas soumise à nos calculs, c’est évident… « Finalement, il faut prendre parti de ceci que la vie chrétienne ne soit qu’un petit ferment. […] C’est une affaire de longue patience… » (Père Forestier). Et c’est pourquoi il nous est bon de regarder Nazareth ; la patience nous apparaîtra bientôt comme normale dans la vie chrétienne, si elle n’est pas dans notre vie moderne. Normale dans la vie chrétienne, normale dans la vie apostolique, normale dans tout ce qui touche au Royaume de Dieu.
Frère M. Colin, mariste, Saint Joseph, l’homme juste, p. 43–44
Apprendre à travailler
Saint Joseph aurait eu de nombreux prétextes pour se laisser aspirer par le tourbillon du travail. Sa pauvreté, la situation politique troublée, l’économie précaire auraient pu lui conseiller de consacrer toute son énergie et tout son temps à son activité professionnelle. Et pourtant, l’Evangile nous montre le chef de la Sainte Famille attaché aux lois liturgiques (la circoncision, la présentation au temple), faire tous les ans le pèlerinage de Pâques à Jérusalem, familier des anges, docile aux voies de la Providence. Saint Joseph fut avant tout un homme de prière, une âme de silence et de recueillement. Il est facile de se représenter la vie de la Sainte Famille, remplissant avec exactitude et bonheur les préceptes et coutumes de son temps : la lecture de l’Écriture dirigée par le chef de famille, la prière commune des psaumes, les temps de méditation silencieuse, la bénédiction de la nourriture, le culte public à la synagogue.
Saint Joseph comprend très bien que « rendre à Dieu ce qui est à Dieu », c’est lui donner le meilleur de soi-même : une intelligence éveillée par l’étude de la doctrine, une volonté forte dans le renoncement, son épouse par le respect de sa mission et de sa grâce, son enfant par son offrande au temple.
Saint Joseph invite les chrétiens de tous les temps à établir une hiérarchie parmi leurs multiples activités. Il veut freiner la boulimie de l’imagination qui se crée sans cesse de nouvelles obligations, et l’activisme qui tue la vie intérieure. Saint Joseph veut nous pacifier, nous replacer dans l’ordre, face à Dieu, par le culte du silence, par la vie liturgique et l’oraison, par une vie intellectuelle intense. Dans le métier lui-même, saint Joseph nous apprend à travailler avec Dieu, pour Dieu, pour faire avancer le royaume de Dieu. Il nous invite à nous arrêter de temps à autre pour prier, pour nous replacer devant « l’unique nécessaire », pour penser au Ciel.
Père Jean-Dominique, o.p.
« Bienheureux les pauvres… »
Il est bien clair que le labeur chrétien ne tend pas à l’accumulation des richesses, mais à leur simple suffisance pour la liberté de la vie dans la charité.
Joseph travailla pour la Sainte Famille de telle sorte qu’elle ne vécut pas dans la misère mais dans la pauvreté. Il faut que la pauvreté marque d’une certaine manière toute vie chrétienne. Encore que le père ait charge de prévoir pour ses enfants, et que les responsabilités sociales, avec les obligations de justice et de charité qu’elles entraînent, exigent des ressources, le chrétien doit toujours donner à sa façon de vivre une certaine marque de pauvreté, discrète, qui ne soit pas petitesse. Il est des saints qui, tel François d’Assise, ont la mission spéciale de montrer au monde la sainte joie du complet dénuement. Mais tout disciple du Christ, qui prie chaque jour en disant à Dieu « Donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien », a la mission ordinaire d’affirmer dans une relative pauvreté la liberté à l’égard des biens matériels, et de laisser lieu dans sa vie à la confiance en Dieu qui nourrit les passereaux et revêt de splendeur les lis des champs.
Aussi bien, le Christ l’a dit, « l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de la parole qui sort de la bouche de Dieu ». L’homme est infiniment plus qu’un travailleur. Son labeur lui-même ne serait pas chrétien, s’il était seulement le travail d’un serviteur, et non celui d’un ami de Dieu, qui, à l’occasion de l’œuvre qu’il fait et bien au-delà, est avec son Dieu.
Joseph que, de l’extérieur, les gens désignent comme « le charpentier », est surtout au fond l’homme de Dieu, celui à qui Dieu a confié le mystère de son incarnation en Marie, et de sa présence. C’est dans cette présence de Dieu, et pour elle, qu’il travaille.
Chanoine D J. Lallement, Vie et sainteté du juste Joseph, p. 309–310
Source : Dossier doctrinal et spirituel du Pèlerinage de Pentecôte 2013 – Allez à Joseph !