Par le chapelet, « nous méditons en compagnie de Notre Dame, et pour ainsi dire à l’abri de son manteau, les mystères premiers de notre foi » – R.P. Calmel
Étymologiquement, dire le « rosaire » revient à offrir à Marie une triple couronne de roses blanches (mystères joyeux), rouges (mystères douloureux) et d’or (mystères glorieux). Le mot « chapelet » vient de « chapel » (XIIe), qui désigne aussi une couronne de fleur [1].
Il consiste à réciter un Notre Père et dix Je vous salue, Marie, en méditant les mystères de la vie de Jésus et de la Sainte Vierge [2]. A chaque mystère est attachée une vertu à obtenir. Lire Comment réciter le chapelet.
Cette prière vocale est tout le contraire d’une rengaine, car « celui qui aime redit les mêmes mots, et en les redisant ne les répète jamais » (Lacordaire) et parce que les trois grands mystères du salut (Incarnation, Rédemption et Vie éternelle) offrent une méditation inépuisable.
L’arme pacifique de Marie est un résumé de l’Évangile et de la doctrine chrétienne. Tout chrétien, enfant ou adulte, ignorant ou cultivé, pécheur ou saint, peut y trouver son bonheur car il est aussi un cœur à cœur avec Notre Dame, comme l’explique si bien le R.P. Calmel, O.P. :
« La dignité et l’efficacité du Rosaire tient à deux causes souveraines : d’une part nous méditons en compagnie de Notre Dame, et pour ainsi dire à l’abri de son manteau, les mystères premiers de notre foi : l’Incarnation et la Rédemption ; c’est-à-dire le mystère de l’économie rédemptrice (le plan d’amour de Dieu) par lequel nous avons accès à la paix ineffable de la Trinité sainte. D’autre part, tout en poursuivant notre méditation en compagnie de la Vierge, nous faisons monter par son Cœur Immaculé une supplication ardente vers notre Père du Ciel, soutenue par le déroulement des Je vous salue, Marie – supplication de la plus grande justesse et humilité : priez pour nous, pauvres pécheurs ; supplication qui englobe toute notre vie jusqu’au dernier soupir : maintenant et à l’heure de notre mort.
Dire le Rosaire c’est avant tout passer du temps avec la Vierge, Mère de Dieu, en nous souvenant de son union aux mystères du Christ ; lui présentant notre requête afin qu’elle-même la présente à Jésus, nous remettant pour toutes choses à sa prière, qui ne peut être que parfaitement agréable au Cœur de son Fils. (…) Les pensées que nous pouvons former pendant la récitation du Rosaire ou du chapelet, les intentions que nous pouvons exprimer, tout cela est précieux. Mais ce qui a plus de prix encore, ce qui permet à Marie de faire notre éducation spirituelle, ce qui lui facilite, si on peut dire, sa tâche d’intercession c’est, avant tout, la disposition première où nous devons être de passer du temps avec elle [3]».
Le poète [4] résume même la prière mariale à cette disposition :
Je viens seulement, Mère, pour vous regarder ;
Vous regarder, pleurer de bonheur, savoir cela
Que je suis votre fils et que vous êtes là.
Le R.P. Réginald Garrigou-Lagrange, O.P. voit dans le Rosaire une école de contemplation « car il nous élève peu à peu au-dessus de la prière vocale et de la méditation raisonnée ou discursive. Les anciens théologiens ont comparé ce mouvement de contemplation au mouvement en spirale que décrivent certains oiseaux comme l’hirondelle pour s’élever très haut. Ce mouvement en spirale est aussi comme un chemin qui serpente pour faire sans fatigue l’ascension d’une montagne. Les mystères joyeux de l’enfance du Sauveur conduisent à sa Passion et sa Passion au Ciel ». Le grand thomiste poursuit en trouvant « cette prière aussi très pratique, parce qu’elle nous rappelle toute la morale et la spiritualité chrétienne vues d’en haut par l’imitation de Jésus Rédempteur et de Marie Médiatrice, qui sont nos grands modèles. (…) Chacun de ces mystères nous rappelle une vertu, surtout l’humilité, la confiance, la patience et la charité [5]».
Enfin, le Rosaire est, comme nous nous l’avons vu, une arme redoutable, victorieuse du démon, de l’esprit mondain et du péché, car Marie est l’Immaculée Conception qui terrassa le serpent et ne connut aucun péché, ni originel ni actuel. Ce qui explique la puissance que cette prière a déployée quand la chrétienté était en danger, en particulier contre l’islam …
Assez souvent, hélas, l’argument d’un manque de temps est invoqué pour justifier une récitation très épisodique. Ne disposons-nous pas, réellement, d’une vingtaine de minutes libre chaque jour ? Il est, d’ailleurs, permis de répartir notre chapelet en récitant une dizaine de temps en temps, même dans les trajets, ou en en réservant une pour la prière en famille, etc. Ne pas réciter régulièrement son chapelet n’est pas en soi une faute, certes, mais c’est se priver d’un grand secours pour sa vie chrétienne, dont la victoire sur les tentations. Et puis nous avons tant et tant de grâces à demander à Notre Dame pour nous-mêmes, nos familles, notre Patrie, l’Église !…
Je n’ai jamais vu quelqu’un se repentir d’avoir dit son chapelet ; mais j’en ai vu plus d’un se repentir de ne pas l’avoir dit.
Alors, récite ton chapelet, dit Dieu, et ne te soucie pas de ce que raconte tel écervelé : que c’est une dévotion passée et qu’on va abandonner. Cette prière-là, je te le dis est un rayon de l’Évangile : on ne me le changera pas. Ce que j’aime dans le chapelet, dit Dieu, c’est qu’il est simple et qu’il est humble. Comme fut mon Fils. Comme fut ma Mère. Récite ton chapelet : tu trouveras à tes côtés toute la compagnie rassemblée en l’Évangile : la pauvre veuve qui n’a pas fait d’études et le publicain repentant qui ne sait plus son catéchisme, la pécheresse effrayée qu’on voudrait accabler, et tous les éclopés que leur foi a sauvés, et les bons vieux bergers, comme ceux de Bethléem, qui découvrent mon Fils et sa Mère … Récite ton chapelet, dit Dieu, il faut que votre prière tourne, tourne et retourne, comme font entre vos doigts les grains du chapelet. Alors, quand je voudrai, je vous l’assure, vous recevrez la bonne nourriture, qui affermit le cœur et rassure l’âme. Allons, dit Dieu, récitez votre chapelet et gardez l’esprit en paix. Ainsi soit-il[6].
- Cf. le Petit Robert.[↩]
- Après les dix Ave, se récitent le Gloire au Père… puis la prière O mon Jésus, enseignée par Notre Dame de Fatima lors de son apparition du 13 juillet 1917.[↩]
- Le Rosaire de Notre Dame – Ed. Dominique Martin Morin.[↩]
- Paul Claudel.[↩]
- La Mère du Sauveur et notre vie intérieure – Éditions Du Cerf, 1954.[↩]
- Texte attribué à Charles Péguy.[↩]