L’Immaculée Conception est-​elle libérale ?

Aussi éton­nant que cela puisse paraître, il y a dans l’âme de Marie de la haine. Une sainte haine. Une haine pro­fonde, solide, constante, que rien ne peut atté­nuer. C’est la haine du péché et de l’erreur.

Si nous vou­lons comme la sainte Vierge être rem­plis d’une foi solide et d’une cha­ri­té brû­lante, nous devons culti­ver dans notre âme la même haine. Ce n’est pas facile. Surtout à notre époque.

Un virus bien plus dangereux que le Covid

En effet, nous sommes tous conta­mi­nés par un virus bien plus dan­ge­reux que le covid, un virus qui détruit non le corps mais l’âme, un virus tel­le­ment répan­du de nos jours qu’on peut par­ler véri­ta­ble­ment de pan­dé­mie. Ce virus, c’est le libé­ra­lisme. Il nous pousse à aimer la véri­té sans détes­ter l’erreur, à aimer la ver­tu sans haïr le vice, à admi­rer les actes bons sans éprou­ver d’horreur pour le péché, à aimer le bien sans exé­crer le mal, à aimer la doc­trine catho­lique sans abhor­rer les fausses reli­gions, à aimer la jus­tice sans vomir l’iniquité. Mais un tel amour est faux. Dieu lui-​même, qui est cha­ri­té, déteste l’erreur. Il aime le pécheur mais hait pro­fon­dé­ment le péché. En effet, il est impos­sible d’aimer un être sans haïr ce qui nous en détourne. Il est impos­sible d’aimer for­te­ment la véri­té sans détes­ter le men­songe, d’aimer for­te­ment le bien et le sou­ve­rain Bien, qui est Dieu, sans détes­ter ce qui nous détourne de Dieu. « Jusqu’où sommes-​nous tom­bés si nous ne savons plus haïr ? » s’écriait Ernest Hello. Ecoutons Tertullien : « Pourquoi disons-​nous que Dieu est sou­ve­rai­ne­ment bon, sinon parce qu’il a sou­ve­rai­ne­ment le mal en hor­reur ? Et qu’est-ce à l’égard de Dieu que d’avoir une sou­ve­raine hor­reur pour le mal, si ce n’est de le pour­suivre sans relâche et d’en être l’implacable vengeur ? »

On doit combattre, mais non pas avec des compromis

Lorsqu’il était évêque de Mantoue, Mgr Sarto, futur saint Pie X, met­tait en garde son cler­gé : « Aucune engeance n’est plus dan­ge­reuse que celle des libé­raux. Pour s’en convaincre, il suf­fit de consi­dé­rer leurs fameuses doc­trines, pré­ten­dant induire l’Eglise elle-​même à leur manière de pen­ser.(…) Les catho­liques libé­raux sont des loups cou­verts de peaux d’agneaux. C’est pour­quoi le prêtre vrai­ment prêtre doit révé­ler au peuple leurs trames per­fides et leurs uniques dési­rs. Vous serez appe­lés rétro­grades, intran­si­geants : soyez-​en fiers. On ne doit pas céder là où il n’est pas besoin de céder. On doit com­battre, non avec des com­pro­mis, mais avec cou­rage, non en cachette, mais en public, non à portes closes, mais à ciel ouvert »[1]

Ces paroles éner­giques de notre saint patron sont d’actualité. A l’exemple de Dieu, nous devons com­battre le péché et l’erreur, les haïr et même en ins­pi­rer la haine, le mépris et l’horreur. Cette sainte haine n’est que l’envers de notre amour de Dieu. Il y a dans le cœur des saints les plus humbles et les plus doux une pro­fonde cha­ri­té pour les pécheurs et les éga­rés, unie à une sainte haine du mal qui est forte comme leur amour de Dieu.

Dans le cœur de marie, la haine du mal

Dans le Cœur imma­cu­lé de Marie, four­naise ardente de cha­ri­té, il y a, comme consé­quence de son amour intense, une haine brû­lante du mal qui la rend ter­rible au démon. Dans l’âme de Marie, il y a quelque chose du guer­rier vaillant et intré­pide qui se bat avec déter­mi­na­tion contre l’ennemi. L’Ecriture dit que Marie est “ter­rible comme une armée ran­gée en bataille”[2], mon­trant ain­si la force conqué­rante de son amour. Nous sommes en guerre, une guerre impla­cable, vio­lente. Nos enne­mis, ce ne sont pas les êtres humains, ce sont les puis­sances des ténèbres, ce sont l’esprit du monde et notre propre concu­pis­cence. De tels enne­mis sont sans pitié. Ils sont à l’affût de la moindre fai­blesse. Cette guerre existe depuis le para­dis ter­restre. Dieu dit au ser­pent : je met­trai une ini­mi­tié entre toi et la femme. Elle t’écrasera la tête, et tu cher­che­ras à la mordre au talon[3].

Dans l’Ancien tes­ta­ment, Judith, figure de Marie, est un bel exemple d’antilibéralisme. Face à l’ennemi Holopherne, figure de Satan, Judith refuse éner­gi­que­ment toute capi­tu­la­tion et même toute forme de com­pro­mis. Elle s’empare du glaive de l’ennemi et, viri­le­ment, déca­pite le géné­ral. Voilà l’attitude du chré­tien face au péché et à l’erreur. Cette puis­sance d’exécrer le mal est une ver­tu oubliée aujourd’hui. Beaucoup de petits livres ou de petites images donnent à la sainte Vierge une dou­ceur affa­dis­sante et niaise qui fait oublier son hor­reur du mal et sa sainte puis­sance d’exécrer[4].

Immaculée Conception, accordez-​nous la grâce d’aimer comme vous le bien et le vrai, et donc de haïr comme vous le mal et l’erreur.

Notes de bas de page
  1. Lettre pas­to­rale du 5 sep­tembre 1894[]
  2. Cant. VI, 3[]
  3. Gen. III, 15[]
  4. D’après Ernest Hello, Paroles de Dieu[]

FSSPX

M. l’ab­bé Bernard de Lacoste est direc­teur du Séminaire International Saint Pie X d’Écône (Suisse). Il est éga­le­ment le direc­teur du Courrier de Rome.