Conférence de Mgr Fellay à l’occasion de la Marche pour la vie de Washington

Mgr Fellay entou­ré de M. l’ab­bé Pierre Duverger et de M. James Vogel

A l’occasion de la Marche pour la vie de Washington (Etats-​Unis), à laquelle il par­ti­ci­pait le 22 jan­vier 2016, Mgr Bernard Fellay a don­né, la veille au soir, une confé­rence de presse sur le thème de la famille. En pré­sence d’environ 200 per­sonnes et sui­vi, en temps réel, sur Internet dans le monde entier, le Supérieur géné­ral de la Fraternité Saint-​Pie X a répon­du aux ques­tions de James Vogel, res­pon­sable de la mai­son d’édition du dis­trict des Etats-​Unis, Angelus Press.

DICI pro­pose à ses lec­teurs la tra­duc­tion fran­çaise des pro­pos les plus signi­fi­ca­tifs tenus par Mgr Fellay, lors de cette confé­rence. Il y est ques­tion de l’avortement, de la situa­tion de l’Eglise, des rela­tions entre la Fraternité Saint-​Pie X avec Rome et avec le pape François.

La Marche pour la vie 

« Ce n’est pas une affaire natio­nale. C’est un com­bat mon­dial. Nous devons défendre les inno­cents, et cette bataille pour la défense des inno­cents n’est qu’une par­tie d’un très grand combat. (…)

« Ce qui est vrai­ment impres­sion­nant, c’est de voir que cela se passe par­tout, dans tous les pays. Certains appellent cela ‘le pro­grès’, ils pré­tendent faire de belles choses alors qu’ils sont juste en train de détruire l’humanité. Et ils com­mencent cette des­truc­tion de la nature humaine au tout début de l’être humain, dans le propre ventre des futures mères. (…)

« Bien sûr, nous devons défendre ces inno­cents. Voilà pour­quoi je suis ici, pour encou­ra­ger tous ceux qui se sont impli­qués dans ce grand com­bat. »1

Confusion dans l’Eglise

« Il y a un mot qui résume bien la situa­tion de l’Eglise, c’est celui de confu­sion. Et le der­nier synode sur la famille a été l’expression de cette confu­sion. Ce qui s’est pas­sé autour du docu­ment final du synode est tout à fait carac­té­ris­tique (…) Cela a abou­ti à un texte ambi­gu et au bout du compte, on ne sait pas quoi faire, quoi pen­ser. Je crois que nous n’avons jamais été à ce degré de confu­sion dans l’Eglise. Plusieurs évêques pro­gres­sistes ont expri­mé des choses invrai­sem­blables sur des notions fon­da­men­tales de morale, et ils n’ont pas du tout été repris par l’autorité qui les a lais­sé faire. A côté de cela, il y a des car­di­naux, des évêques qui se sont dres­sés contre eux, ouver­te­ment, publi­que­ment. Cela aus­si, c’est nou­veau. Et nous pou­vons nour­rir l’espoir que c’est le début d’une vraie réac­tion, – mais il est grand temps ! »

Des évêques contre des évêques

« Cette situa­tion me rap­pelle le mes­sage de La Salette. La Très Sainte Vierge Marie a annon­cé des temps dif­fi­ciles pour l’Eglise : des évêques contre des évêques, des car­di­naux contre des car­di­naux. Et si vous regar­dez l’histoire de l’Eglise, jusqu’à main­te­nant, vous ne trou­vez pas de pareille situation.

« C’est vrai­ment tra­gique. Comment les fidèles peuvent-​ils s’y retrou­ver ? Et même si aujourd’hui, le Saint Père venait à publier un docu­ment clair et pré­cis, ce serait trop tard. Le mal est fait. Quand quelque chose est cas­sé, pour le répa­rer, cela demande beau­coup plus d’effort. C’est la situa­tion dans laquelle nous nous trou­vons aujourd’hui. »

La juri­dic­tion accor­dée aux prêtres de la Fraternité Saint-​Pie X pour confesser

« Ce n’est pas juste une délé­ga­tion de pou­voir, c’est un pou­voir ordi­naire d’entendre les confes­sions. En temps nor­mal, ce pou­voir est accor­dé au prêtre par l’évêque. Mais, dans le cas pré­sent, nous l’avons reçu direc­te­ment du pape. C’est très rare mais il peut le faire.

(…) Et cela implique aus­si, néces­sai­re­ment, que toutes les sanc­tions qui pesaient sur les prêtres de la Fraternité Saint-​Pie X, sont levées. Les sanc­tions et la per­mis­sion de confes­ser ne pour­raient aller de pair, ce serait absurde. »

Les rela­tions avec Rome

« Cela peut sem­bler dif­fi­cile à com­prendre, car le pape fait tant de reproches aux per­sonnes qui insistent sur la doc­trine, qui ne veulent pas que les choses changent… Mais il n’y a abso­lu­ment aucun doute que le pape est per­son­nel­le­ment impli­qué dans notre dossier.

« Il nous connaît très bien et la façon dont il se com­porte nous oblige à pen­ser qu’il éprouve de la sym­pa­thie à notre égard… Cela peut sem­bler contra­dic­toire ! Personnellement, je pen­sais vrai­ment que nous allions de nou­veau être condam­nés par Rome, mais c’est le contraire qui arrive. »

Le pape François et la Fraternité Saint-​Pie X

« Il nous connaît depuis l’Argentine. Nous avons été en rela­tion avec lui car nous avions des sou­cis admi­nis­tra­tifs. En Argentine, un concor­dat per­met aux prêtres étran­gers d’obtenir un per­mis de séjour à la condi­tion que l’évêque du lieu l’accepte. Ce qui est, en soi, tout à fait nor­mal. Evidemment, nous avions un pro­blème avec un évêque local qui ne vou­lait pas de notre pré­sence. Nous aurions pu deman­der une recon­nais­sance direc­te­ment à l’Etat argen­tin, mais il en était hors de ques­tion : nous sommes catho­liques et nous ne vou­lions pas être trai­tés comme une secte. Alors, le supé­rieur de dis­trict d’Amérique du Sud a ren­con­tré le car­di­nal Bergoglio pour lui expo­ser le pro­blème. Sa réponse a été très claire : ‘vous êtes catho­liques, c’est évident, vous n’êtes pas schis­ma­tiques ; je vais vous aider.’ Et il l’a fait ! Il a pris contact avec Rome, il a écrit une lettre en notre faveur au gou­ver­ne­ment qui, dans le même temps, rece­vait une mis­sive de la non­cia­ture disant exac­te­ment le contraire ! Et nous étions dans cette situa­tion lorsqu’il a été élu pape.

« On lui a offert la bio­gra­phie de Mgr Lefebvre, il l’a lue deux fois ! Ce qui ne se fait pas si l’on ne s’intéresse pas à ce sujet.

« Il dit sou­vent publi­que­ment qu’il ne faut pas se ren­fer­mer sur soi, qu’il ne faut pas res­ter entre nous mais prendre soin de ‘la péri­phé­rie’, etc. Et il voit que c’est exac­te­ment ce que nous fai­sons. Nous allons cher­cher les âmes là où elles se trouvent, nous essayons de les aider, et je suis à peu près sûr que le pape voit tout cela et qu’il en est satis­fait. Peut-​être qu’il n’est pas content de tout ce que nous fai­sons, mais de cet aspect-​là, oui.

En Argentine, il a dit à nos prêtres ceci : ‘si vous vou­lez que vos enfants perdent la foi, envoyez-​les dans les écoles du dio­cèse !’ Ce qui veut dire qu’il a par­fai­te­ment conscience de ce qui se passe. Il sait qu’il y a de gros pro­blèmes dans l’Eglise, même s’il n’en parle pas beaucoup.

« Parfois, en l’observant, nous sommes per­dus. Personnellement, je n’ai pas toutes les réponses, j’observe juste les élé­ments de sa per­son­na­li­té. Il est inclas­sable, il est impos­sible de le pla­cer dans une caté­go­rie, il est tel­le­ment impré­vi­sible. Mais, au bout du compte, en tant que pape, il a per­son­nel­le­ment réglé notre situa­tion en Argentine. (Voir com­mu­ni­qué de la MG du 13 avril 2015)

« La Fraternité Saint-​Pie X a une rela­tion étroite avec lui, un accès direct à lui, ce qui peut sem­bler fou dans la situa­tion actuelle.

La régu­la­ri­sa­tion cano­nique de la Fraternité Saint-​Pie X ?

« Il est impos­sible de vous dire ce qui va se pas­ser demain. Est-​ce que nous allons être recon­nus ? Sincèrement, je n’en ai aucune idée. Pourquoi ? A cause de la situa­tion de l’Eglise ! A Rome même, cer­tains veulent notre mort. Ils veulent que nous soyons condam­nés ! Qui va l’emporter ? Le pape ou les autres ? Je suis navré de vous dire que je ne sais pas.

« Mais nous n’allons pas être para­ly­sés par cette situa­tion. Nous savons ce que nous avons à faire, alors nous conti­nuons. Nous admet­tons que si cer­tains élé­ments étaient acquis, comme la régu­la­ri­sa­tion cano­nique, ce serait mieux. Il y a des dis­cus­sions, il y a eu de nou­velles pro­po­si­tions, mais nous savons que nous avons des enne­mis au sein du Vatican. Ce n’est pas nouveau.

« Nous deman­dons au Seigneur de nous éclai­rer sur sa Volonté parce que c’est cela qui compte : la Volonté de Dieu, la divine Providence. Jusqu’à main­te­nant, Dieu nous a pro­té­gés et il n’y a pas de rai­son pour que cela change dans l’avenir. »

Sources : , tra­duit de l’anglais – du 29/​01/​16

  1. Le matin du 22 jan­vier, au cours de la messe, Mgr Fellay a affir­mé : « Tout avor­te­ment est un hor­rible péché. Pour un peu mieux sai­sir ce qu’est ce péché, il faut préa­la­ble­ment com­prendre que, dans un tel acte, il y a une attaque contre l’inten­tion de Dieu sur ce petit enfant. On ne touche pas seule­ment à la vie humaine, on agresse Dieu. » Et se deman­dant com­ment on pou­vait répa­rer de tels crimes, il répon­dait : « La seule façon est de se tour­ner vers Dieu. Sur le plan humain, nous ne pou­vons pas répa­rer par nos propres moyens. Bien sûr, nous pou­vons nous expri­mer, c’est ce que nous fai­sons à tra­vers la Marche pour la vie, nous pro­tes­tons, nous souf­frons, nous don­nons quelque chose. Oui, nous ten­tons de répa­rer autant qu’il nous est pos­sible, mais la vraie répa­ra­tion, elle inter­vient ici, à la messe. Parce que la messe est le renou­vel­le­ment non san­glant du sacri­fice de Notre Seigneur. Dieu a vrai­ment tout répa­ré à notre place, sur le cal­vaire. Et c’est pré­ci­sé­ment ce que nous avons ici : le cal­vaire. Ce n’est pas seule­ment un prêtre ou un évêque qui est là, c’est Notre Seigneur. Notre Seigneur Jésus-​Christ lui-​même. Ce même Jésus qui était en Palestine, est pré­sent à la messe. Le prêtre n’est que son ins­tru­ment, c’est vrai­ment Jésus qui est là, et qui fait exac­te­ment ce qu’Il a fait sur la croix. Il offre sa vie en répa­ra­tion. L’enseignement de l’Eglise dit ceci : chaque jour nous célé­brons le sacri­fice de la messe à cause des péchés que nous com­met­tons. C’est l’enseignement du Concile de Trente. A cause des péchés qui sont com­mis chaque jour sur la terre, nous célé­brons la messe. Le Padre Pio l’exprime d’une manière mer­veilleuse : il dit que le monde peut sur­vivre plus faci­le­ment sans le soleil que sans la messe. Ce qui fait que la terre est encore vivable, c’est la célé­bra­tion quo­ti­dienne de la messe. » []

FSSPX Premier conseiller général

De natio­na­li­té Suisse, il est né le 12 avril 1958 et a été sacré évêque par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Mgr Bernard Fellay a exer­cé deux man­dats comme Supérieur Général de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X pour un total de 24 ans de supé­rio­rat de 1994 à 2018. Il est actuel­le­ment Premier Conseiller Général de la FSSPX.