Diacre et premier Martyr (+ 35)
Fête le 26 décembre.
Vie résumée
On ignore si saint Étienne fut disciple de Jésus-Christ ou s’il fut converti par les prédications des Apôtres ; mais il est certain qu’il se fit promptement remarquer par ses vertus, et mérita d’être le chef des sept diacres élus par les Apôtres pour les aider dans les fonctions secondaires de leur ministère. Le récit de son élection, de sa prédication et de son martyre lui attribue cinq plénitudes. Il était plein de foi, parce qu’il croyait fermement tous les mystères et qu’il avait une grâce spéciale pour les expliquer. Il était plein de sagesse, et nul ne pouvait résister aux paroles qui sortaient de sa bouche. Il était plein de grâce, montrant dans tous ses actes une ferveur toute céleste et un parfait amour de Dieu. Il était plein de force, comme son martyre en fut la preuve éloquente. Enfin il était plein du Saint-Esprit, qu’il avait reçu au cénacle par l’imposition des mains des Apôtres.
Tant de vertus ne tardèrent pas à produire dans Jérusalem d’abondants fruits de salut. Étienne, élevé à l’école de Gamaliel, dans toute la science des Juifs, avait même une autorité spéciale pour convertir les prêtres et les personnes instruites de sa nation. Ses miracles ajoutaient encore au prestige de son éloquence et de sa sainteté. De tels succès excitèrent bientôt la jalousie ; on l’accusa de blasphémer contre Moïse et contre le temple.
Étienne fut traîné devant le Conseil, répondit victorieusement aux attaques dirigées contre lui, et prouva que le blasphème était du côté de ses adversaires et de ses accusateurs. A ce moment le visage du saint diacre parut éclatant de lumière comme celui d’un ange. Mais il avait affaire à des obstinés, à des aveugles. Pour toute réponse à ses paroles et au prodige céleste qui en confirmait la vérité, ils grinçaient des dents contre lui et se disposaient à la plus noire vengeance. Afin de rendre leur conduite plus coupable, Dieu fit un nouveau miracle ; le ciel s’entr’ouvrit et le Saint, levant les yeux en haut, s’écria avec ravissement : « Je vois les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu. » A ces mots ses ennemis ne se contiennent plus ; ils poussent des cris de mort, entraînent le martyr hors de la ville et le lapident comme un blasphémateur. Étienne, calme et souriant, invoquait Dieu et disait : « Seigneur, recevez mon esprit!… Seigneur, ne leur imputez point ce péché. » Saul, le futur saint Paul, était parmi les bourreaux. « Si Étienne n’avait pas prié, dit saint Augustin, nous n’aurions pas eu saint Paul. »
Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l’année, Tours, Mame, 1950
Version longue
Les Pères de l’Eglise, saint Augustin, saint Fulgence, saint Pierre Damien et d’autres n’ont pas trouvé assez de louanges pour célébrer Etienne, le premier diacre et le premier martyr de l’Eglise, au nom prédestiné puisqu’en grec il signifie couronné.
Nous avons peu de détails sur les années de sa jeunesse. On croit qu’il était né d’une de ces familles juives qui habitaient les provinces de l’ancien empire grec.
L’école de Gamaliel.
Il y avait à Jérusalem quelques écoles de synagogues où l’on voyait accourir des provinces une foule de jeunes gens désireux d’apprendre la loi de Moïse, les cérémonies et les traditions des anciens dans la capitale même de la Judée.
Parmi ces écoles, se faisait surtout remarquer celle du pharisien Gamaliel, l’homme le plus raisonnable qui se trouvât dans le Sanhédrin, celui-là même qui, au rapport de saint Luc, était vénéré de tout le peuple et qui fit relâcher les apôtres.
Son école comptait près de mille disciples, à la tête desquels se distinguait, par son zèle, sa science et la pureté de sa vie, un jeune Cilicien du nom de Saul, que Dieu devait ensuite convertir miraculeusement, pour en faire l’Apôtre des Gentils. Cette école devait donner encore deux de ses disciples à l’Eglise naissante : saint Barnabé et saint Etienne. Gamaliel lui-même se convertit plus tard et mourut saintement.
Ce fut donc auprès de ce rabbi qu’Etienne étudia les Saintes Ecritures, avec Saul, que l’on croit avoir été son cousin.
Il devint dans la suite disciple de Jésus, comme le pensent saint Augustin et saint Epiphane ; d’autres disent qu’il fut gagné par les prédications de Pierre, aussitôt après la descente de l’Esprit-Saint.
Ce qui est certain, c’est qu’il se fit bien vite remarquer par la plénitude de sagesse et de zèle qui était en lui.
Election des sept diacres.
En ce temps-là, le nombre des disciples croissant dans l’Eglise naissante de Jérusalem, il s’éleva un murmure parmi les Juifs nés hors de Palestine, et que l’on nommait Hellénistes (Juifs de Grèce), contre les Juifs nés en Judée et qui s’appelaient Hébreux. Les premiers se plaignaient que les veuves de leur nation étaient méprisées dans le ministère quotidien, ou parce qu’on ne leur donnait point d’intendances aussi considérables qu’aux autres veuves dans l’assistance des pauvres, car d y avait des veuves choisies pour prendre soin des personnes de leur sexe et qu’on appelait diaconesses, ou parce qu’on ne les traitait pas aussi bien que les autres dans la distribution des aumônes.
C’est pourquoi les douze apôtres, ayant réuni les disciples, leur dirent : « Il n’est point convenable que nous abandonnions la prédication de la parole de Dieu pour nous occuper du service des tables. Choisissez donc, ô frères, parmi vous, après mûr examen, sept hommes de bon témoignage, pleins du Saint-Esprit et pleins de sagesse, que nous mettrons à la tête de cette œuvre. Et pour nous, nous nous adonnerons tout spécialement à la prière et au ministère de la parole. »
Cette proposition plut à toute l’assemblée, et les disciples élurent Etienne, homme plein de foi et de l’Esprit-Saint, Philippe, Prochorus, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas, prosélyte d’Antioche.
Ils les présentèrent ensuite aux apôtres, qui, après avoir prié, leur imposèrent les mains. Telle fut la première ordination des diacres dans la Sainte Eglise.
Les cinq plénitudes de saint Etienne.
Les vertus d’Etienne lui méritèrent d’être ainsi choisi le premier, et l’Esprit-Saint lui-même, par la voix de saint Luc, a pris soin de nous les faire connaître. Le texte sacré lui attribue, en effet, cinq plénitudes.
II était plein de foi, parce qu’il croyait avec fermeté tous les mystères de la foi, et qu’il avait un don particulier pour les expliquer et persuader.
Il était plein de sagesse, aussi personne ne pouvait résister aux paroles qui sortaient de sa bouche.
Il avait encore la plénitude de la grâce, car il était fort agréable à Dieu, il possédait tous les dons gratuits, et cette grâce se répandait au dehors ; elle parut surtout lorsque ses ennemis l’accusèrent devant le Sanhédrin.
Il était aussi plein de force, et son glorieux martyre en fut la preuve la plus frappante.
Enfin, il avait la plénitude de l’Esprit-Saint qu’il avait reçu, au jour de la Pentecôte, ou plus tard, par l’imposition des mains des apôtres.
Saint Augustin ajoute à tant de dons et de mérites la grâce de la virginité : car, dit-il, malgré sa jeunesse et la beauté de ses traits, les apôtres n’hésitèrent pas à lui donner l’intendance des veuves.
Ses succès excitent la jalousie.
Tant de vertus réunies ne tardèrent pas à porter d’heureux fruits dans Jérusalem. Par son zèle, la parole de Dieu se répandait de plus en plus dans la Ville Sainte, et le nombre des disciples allait toujours croissant.
Etienne, en effet, pour confirmer la doctrine sainte qu’il annonçait, faisait des prodiges et de grands miracles parmi le peuple, et attirait une foule de Juifs à la foi de Jésus-Christ.
Poussés par l’envie et par un faux zèle pour la loi, qu’ils s’imaginaient être détruite par l’Evangile, quelques membres de diverses synagogues dites des Affranchis, des Cyrénéens, des Alexandrins, des Ciliciens et des Asiatiques, se mirent à discuter avec Etienne et à vouloir le confondre. Ils employèrent toute leur subtilité pour détruire la doctrine du saint diacre, mais ils furent toujours vaincus, sans pouvoir jamais répondre à ses arguments, ni résister à la sagesse et à l’Esprit Saint qui parlait par sa bouche.
Accusé et conduit devant le Sanhédrin.
La honte d’avoir été confondus les porta aux extrémités les plus indignes. Alors, ils subornèrent des misérables pour dire qu’ils l’avaient entendu proférer des paroles de blasphème contre Moïse et contre Dieu.
Ils excitèrent ainsi le peuple, les Anciens et les Scribes, et, se jetant à l’envi sur lui, ils l’enlevèrent et le conduisirent avec violence devant le Conseil.
En même temps, ils produisirent les faux témoins qui dirent : « Cet homme ne cesse point de proférer des paroles de blasphème contre le Temple et contre la Loi. Nous l’avons, en effet, entendu dire que Jésus de Nazareth détruira ce lieu et changera les traditions que nous a laissées Moïse. »
Et tous ceux qui siégeaient dans le Conseil, ayant jeté les regards sur Etienne, virent son visage éclatant de lumière, comme celui d’un ange.
Réponse de saint Etienne.
Contrairement à son Maître qui avait gardé le silence devant ses juges, Etienne prit alors la parole, et, s’oubliant lui-même, il ne se préoccupa que de défendre la vérité et de proclamer la gloire de Jésus-Christ. Pourquoi Etienne ne garda-t-il pas lui aussi le silence ? Parce que, fait remarquer saint Augustin, « son Seigneur même avait dit : Ce que je vous enseigne dans les ténèbres, publiez-le au grand jour ; et ce qui vous est dit à l’oreille, prêchez-le sur les toits. »
Il commença à remettre devant les yeux de l’assemblée toutes les grâces que leur nation avait reçues de Dieu depuis Abraham jusqu’à Jésus-Christ. Il leur rappela la prophétie de Moïse touchant le Messie ; il leur remit en mémoire toutes les ingratitudes et toutes les révoltes de leurs pères.
On l’avait traité de blasphémateur contre Moïse et contre le Temple ; mais Etienne réfuta victorieusement ces calomnies, et il prouva que le blasphème et l’impiété n’étaient pas de son côté, mais du côté de ses accusateurs, dignes fils de leurs pères. « Têtes dures et inflexibles, leur dit-il dans une sainte indignation contre leur incrédulité, cœurs et oreilles incirconcis, vous résistez toujours au Saint-Esprit, et vous êtes tels que furent vos pères. Quel est le prophète que vos pères n’aient point persécuté ? Ils ont mis à mort ceux qui leur prédisaient la venue du Juste que vous venez de trahir, et dont vous avez été les meurtriers. Vous avez reçu la loi par le ministère des anges, mais vous ne l’avez point gardée. »
A ces paroles, ils entrèrent dans une rage qui leur rongeait le cœur, et ils grinçaient des dents contre lui.
Saint Etienne voit les cieux ouverts.
Alors, le ciel s’ouvrit, comme pour encourager le saint athlète de Jésus-Christ, et Etienne, tout rempli de l’Esprit-Saint, levant les yeux au ciel, vit la gloire de Dieu, et Jésus debout à sa droite ; et dans sa joie et son admiration, il s’écria : « Voici que je vois les cieux ouverts, et le Fils de l’homme qui est debout à la droite de Dieu. »
Ses ennemis, en entendant ces paroles, poussèrent des cris de mort ; ils se bouchèrent les oreilles et se ruèrent tous sur lui.
Le martyre.
Et l’ayant entraîné hors de la ville, à quelque distance de la porte du Nord, appelée aujourd’hui porte de Damas, ils se mirent à le lapider, selon qu’il était ordonné dans la Loi.
Les faux témoins déposèrent leurs vêtements aux pieds du jeune Saul, appelé plus tard à une éclatante conversion sur le chemin de Damas, et jetèrent les premières pierres contre le martyr.
Or, pendant qu’ils le lapidaient, Etienne, debout, invoquait Dieu et disait : « Seigneur, recevez mon esprit. » Le saint diacre, dit saint Augustin, « se tenait debout afin d’exprimer la confiance qu’il ressentait en lui-même pour avoir bien lutté, bien combattu, pour n’avoir pas fléchi devant l’ennemi, pour avoir méprisé la peur, dédaigné la chair, vaincu le monde et le démon ».
Puis, s’étant mis à genoux, il s’écria à haute voix : « Seigneur, ne leur imputez point ce péché. » Après ces paroles, Etienne s’endormit dans le Seigneur.
C’était le 26 décembre, et probablement de l’année 35 de l’ère chrétienne.
C’est ainsi que les Actes des Apôtres nous rapportent la glorieuse mort du premier martyr, qui mérita à l’Eglise le grand Paul, apôtre des Gentils, car, dit saint Augustin, si Etienne n’avait pas prié, l’Eglise n’aurait pas eu saint Paul.
Après sa mort, des hommes craignant Dieu prirent soin de son corps, et firent ses funérailles en grande pompe.
La mémoire de saint Etienne fut si honorée des premiers fidèles que les apôtres saint Pierre et saint Paul, nous dit le Pape saint Clément, ordonnèrent de fêter le jour de son martyre.
Révélation du lieu de sa sépulture.
Le vendredi 3 décembre de l’an 415, sous les empereurs Honorius et Théodose le Jeune, saint Innocent Ier étant Pape, un prêtre vénérable, nommé Lucien, dormait dans le baptistère de l’église de Caphargamala. C’était sa coutume de passer ainsi la nuit, pour garder les vases sacrés de l’église. Vers la troisième heure, il vit apparaître un vieillard majestueux, qui le toucha avec une verge d’or et l’appela par trois fois, puis il ajouta :
– Pars pour Jérusalem, et dis à Jean, qui en est évêque, de venir ouvrir les tombeaux où les restes illustres de plusieurs grands Saints gisent sans honneur.
– Seigneur, qui êtes-vous, demanda Lucien, et quels sont les Saints dont vous parlez ?
– Je suis, répondit-il, le docteur juif Gamaliel, qui ai élevé l’apôtre du Christ, Paul. A l’orient du tombeau où repose mon corps, se trouve aussi celui d’Etienne, que les Juifs lapidèrent hors de la porte septentrionale de Jérusalem sur la route de Cédar. Son corps resta là, exposé pendant plusieurs jours, sans que les oiseaux ni les bêtes osassent y toucher. J’avais aimé, durant sa vie, ce ministre de Jésus-Christ, je partageais désormais sa foi, et voulais avoir part à son héritage. J’allai donc trouver les fidèles de Jérusalem, et je les engageai à se rendre secrètement au lieu où gisait son corps ; ils purent s’en saisir et, le plaçant sur mon char, ils le transportèrent à vingt milles de Jérusalem, dans ma maison de campagne qui porte encore mon nom (Caphargamala signifie « villa de Gamaliel »). Là, nous fîmes pendant quarante jours les funérailles solennelles, et je le mis dans mon propre tombeau. Nicodème, qui venait voir Jésus de nuit, est à côté, dans un autre cercueil. Les Juifs, ayant su qu’il avait été baptisé par les disciples du Christ, le chassèrent de la ville. Je le reçus dans ma maison où il termina ses jours, et je l’ensevelis à côté d’Etienne. J’enterrai encore dans le même tombeau mon fils Abibas, qui mourut avant moi, à l’âge de vingt ans, après avoir reçu, comme moi, le baptême de la main des apôtres. Et plus tard, mon corps fut déposé près du sien.
Le prêtre demanda alors :
– Mais où pourrons-nous trouver votre sépulcre ?
– Au milieu du champ qui se nomme maintenant Delagabria (les hommes de Dieu).
Après ces mots, la vision disparut. Le prêtre Lucien sembla se réveiller alors comme d’un songe, et il se mit à prier avec ferveur.
Craignant qu’un excès de crédulité ne le fît traiter d’imposteur, Lucien, pour s’assurer que cet avertissement venait de Dieu, demanda dans sa prière que cette vision se renouvelât une deuxième et une troisième fois, et, pour mériter cette faveur, il jeûna plusieurs jours.
Le vendredi suivant, le vieillard lui apparut de nouveau dans les mêmes circonstances ; il lui reprocha de n’être pas allé voir l’évêque de Jérusalem, puis lui montra de quelle façon étaient disposés les corps dans le tombeau, en lui faisant voir quatre corbeilles placées régulièrement. Il y en avait trois d’or et une d’argent. Des trois premières, l’une était pleine de roses rouges ; elle figurait le martyr Etienne ; les deux autres étaient pleines de roses blanches, qui représentaient saint Nicodème et saint Gamaliel. La corbeille d’argent, remplie de fleurs odoriférantes, figurait l’innocence du jeune Abibas.
Après cela, la vision disparut. Lucien voulut encore attendre un autre signe, et le vendredi suivant, 17 décembre, Gamaliel lui apparut une troisième fois, mais l’indignation éclatait sur son visage. Après cette dernière vision, Lucien partit pour Jérusalem.
L’évêque Jean, en entendant ces choses, pleura de joie et commanda au prêtre Lucien de commencer les fouilles.
Invention et translation des reliques de saint Etienne.
Dès le lendemain, Lucien réunit ses fidèles dans l’église de Caphargamala ; puis, après le chant des hymnes, on se dirigea en procession vers le champ indiqué. Un vénérable moine du nom de Migetius, à qui Gamaliel était également apparu, indiqua le lieu précis du tombeau. Les chrétiens se mirent à fouiller à cet endroit, et bientôt l’on vit apparaître trois cercueils. Le premier portait pour inscription un nom syriaque écrit en grec, Celiel, ce qui signifie Etienne ou Couronné ; le second portait de même Nasuam, ce qui veut dire Nicodème ou Victoire du peuple. Le troisième, qui renfermait deux corps, portait l’inscription Abibas et Gamaliel.
L’évêque de Jérusalem, averti, vint aussitôt avec les évêques de Sébaste et de Jéricho, au bourg de Caphargamala.
Dès qu’on eut ouvert le cercueil de saint Etienne, la terre se mit à trembler. En même temps, il s’exhala un parfum très agréable qui frappa tous les assistants. Soixante-treize malades de tout genre qui se trouvaient dans la foule furent guéris à l’instant.
Les évêques, après avoir baisé les reliques du protomartyr, les enfermèrent dans une châsse précieuse. Puis on procéda, au chant des psaumes et des hymnes, à leur translation à Jérusalem. A ce moment, une pluie bienfaisante commença à tomber et mit fin à la longue sécheresse qui désolait la contrée.
L’histoire de cette découverte et de cette translation, écrite en grec par le prêtre Lucien lui-même et traduite en latin par le prêtre espagnol Avit, produisit une profonde sensation dans toute l’Eglise, et partout l’on sollicita la faveur de posséder quelques parcelles des reliques du glorieux saint Etienne. Déjà, la ville d’Ancône possédait une des pierres qui avaient servi à la lapidation du saint diacre : elle avait été apportée dans cette ville par un chrétien témoin du martyre.
Miracles de saint Etienne à Mahon et à Hippone.
A l’époque de l’invention des reliques de saint Etienne, Paul Orose, prêtre espagnol, passa en Afrique pour conférer avec saint Augustin, puis à Jérusalem pour consulter saint Jérôme. Il fut le premier, qui apporta aux pays d’Occident des reliques du bienheureux Etienne. Le prêtre Avit lui en donna quelques parcelles pour l’évêque de Braga, en Lusitanie. Mais les Goths l’empêchèrent de passer en Espagne, et il laissa les reliques à Mahon, principale ville de l’île Minorque. Sévère, évêque de l’île, s’y rendit afin de recevoir ce trésor sacré et d’ouvrir des conférences avec les Juifs, fort nombreux en cette ville. La présence de ces reliques opéra un prodige étonnant. En 418, dans l’espace de huit jours, cinq cent quarante Juifs se convertirent et demandèrent le baptême.
En 424, l’Eglise d’Hippone reçut une portion des reliques du premier martyr. Saint Augustin nous raconte dans ses écrits un grand nombre de miracles dont il fut le témoin oculaire.
A Césarée, dans l’Algérie actuelle, il y avait une famille considérable de dix enfants. Le fils aîné se livra aux plus détestables excès, et s’emporta même jusqu’à lever sur sa mère une main parricide. Tous ses frères et sœurs, présents à cette scène de violence inouïe, ne firent rien pour protéger leur mère. Alors, celle-ci, désespérée de tant d’ingratitude, lança sur tous ses enfants une malédiction solennelle. A l’instant, le fils aîné fut pris d’un tremblement convulsif dans tout le corps. Dans l’espace d’une année, tous les autres enfants reçurent le même châtiment. Ils allèrent cacher leur honte dans d’autres pays, cherchant leur guérison près des grands sanctuaires. Le second fils l’obtint, à Ravenne, par l’intercession du diacre saint Laurent. Le sixième et le septième de ces enfants, Paul et sa sœur Palladie, vinrent à Hippone en 425. Le jour de Pâques, Paul se tenait debout, les mains appuyées sur la grille qui entourait la memoria du bienheureux Etienne, lorsque subitement il fut guéri. Saint Augustin adressa la parole au peuple, et, montrant Paul, il dit : « Au lieu d’entendre un récit, vous assistez à un miracle ; au lieu d’un parchemin, vous voyez la face rayonnante d’un miraculé. »
Le mardi de Pâques, il fit placer Paul et Palladie sur les degrés de la chaire afin que le peuple les vît, le premier, déjà guéri, mais la sœur encore agitée. Puis, les ayant fait retirer, il prêcha sur le respect des enfants envers leurs parents, et la modération des parents envers leurs enfants. Mais, au milieu de son sermon, des cris de joie s’élevèrent dans l’église. Palladie venait à son tour d’être guérie.
Le reste du corps fut apporté de Constantinople à Rome sous le pontificat de Pelage Ier, vers 560, et déposé dans le tombeau de saint Laurent, au Campo Verano ; la fête de cette seconde translation est le 7 mai.
Quant à l’invention et à la première translation à Jérusalem, l’Eglise les célèbre le 3 août.
En France.
La France a voué une grande dévotion à saint Etienne ; sans compter les chapelles et églises, treize cathédrales le reconnaissent pour leur patron, et plusieurs, depuis l’époque des premiers prédicateurs de la foi dans les Gaules.
A. R.
Sources consultées. – Actes des Apôtres (chap. vi-vii). – Saint Augustin, Œuvre » oratoires. – (V. S. B. P., n° 253.)