Impératrice d’Allemagne (931–999).
Fête le 16 décembre.
Au milieu des rivalités et des invasions, de la dépravation des mœurs, des scandales de tout genre qui désolèrent le Xe siècle, Dieu suscita une femme forte, sainte Adélaïde, qui sut vivre sans tache parmi les désordres, et, par son courage et ses vertus, conserver la foi de ses sujets et les préserver de plus grands maux. La vie de cette impératrice a été écrite par saint Odilon, Abbé de Cluny, qui fut son directeur.
Les ancêtres de sainte Adélaïde. – Sa naissance.
Rodolphe II, roi de la Bourgogne transjurane, connu dans l’histoire sous le nom de Rodolphe le Belliqueux, appartenait, par sa mère, à la descendance de Charlemagne. C’était un prince aussi aventureux que brave, et ses Etats, souvent morcelés par les princes voisins, ne pouvaient suffire à satisfaire son ambition.
Aussi écouta-t-il volontiers l’appel des Italiens, las de la tyrannie de l’empereur Bérenger Ier, pour entreprendre la conquête de la péninsule ; couronné à Pavie roi d’Italie, le 13 janvier 922, Rodolphe ne réussit pas à garder la couronne. En effet, quoique maître de plusieurs villes importantes, ayant appris qu’il avait été trahi, il repassa les Alpes et ne songea plus qu’à défendre ses Etats contre les Hongrois. Quant à Bérenger, il avait été assassiné à Vérone en 924.
Sept ans après, en 931, la reine Berthe, épouse de Rodolphe, mit au monde une enfant à laquelle on donna, à son baptême, le nom d’Adélaïde, qui signifie « noble serment ». Voici le motif qui décida du choix de ce nom :
Hugues, comte de Vienne, puis duc de Provence, qui avait succédé par le triomphe des armes à Rodolphe comme roi d’Italie, et avait été couronné à Pavie le 9 juillet 926, se rendit odieux pas la dureté de son gouvernement, l’exagération des impôts, sa vie débauchée et l’inconstance de son caractère. Plusieurs seigneurs, conjurés, firent appel à l’intervention de Rodolphe.
Hugues préféra traiter avec son rival ; le premier acceptait de céder à Rodolphe une partie de ses Etats, des territoires situés dans le royaume de Provence ; en retour, Rodolphe laisserait à Hugues la jouissance de la couronne d’Italie. En signe d’alliance, les deux princes fiancèrent l’un à l’autre leurs enfants, Lothaire, que Hugues son père avait fait proclamer roi d’Italie, conjointement avec lui, en 932, et Adélaïde encore au berceau.
La princesse Berthe, dit son biographe, se plaisait à visiter les nombreux monastères de Provence et de Suisse, à leur faire de grandes largesses. Elle voulut, lors du départ de son époux pour l’Italie, passer quelque temps dans le couvent de Quedlimbourg. Elle emmena avec elle sa jeune Adélaïde, âgée de trois ans, pour la faire instruire dans le silence du cloître, jusqu’au moment où Dieu manifesterait sa volonté sur elle.
« Elle était, dit saint Odilon, une merveille de beauté et de grâce. » On remarqua bientôt en elle les marques d’une piété solide, et un grand mépris pour les grandeurs et les pompes du monde. Elle n’avait que six ans quand Rodolphe, son père, mourut le 11 juillet 937.
En 945, Hugues, abandonné par ses partisans, avait été forcé de renoncer à la couronne d’Italie en faveur de son jeune fils Lothaire II ; lui-même devait mourir à Aides, le 10 avril 946. Cet état de choses devait entraîner de nouvelles complications : Bérenger II, petit-fils de Bérenger Ier, était le chef de la révolte. Toutefois, il respecta, au moins nominalement, le titre de roi de Lothaire.
Mariage d’Adélaïde. – Ses épreuves.
Le mariage si longtemps projeté de Lothaire et d’Adélaïde venait d’avoir lieu en 947, lorsque, trois ans après, Lothaire laissait son épouse désolée : il mourut subitement le 22 novembre 950, d’une attaque de frénésie, assurèrent les courtisans de Bérenger ; d’un breuvage empoisonné, au dire des autres.
Adélaïde n’avait alors que dix huit ans et venait de donner le jour à une fille nommée Emma, qui plus tard sera reine en épousant un roi de France, qui portait lui aussi le nom de Lothaire. Les afflictions qui accablèrent la reine Adélaïde à la mort de son mari contribuèrent à l’affermir dans le service de Dieu et à la détacher des biens terrestres. Ses possessions et ses richesses étaient alors immenses ; outre le royaume de son père, elle héritait d’une partie de l’Italie, mais tout cela ne servit qu’à enflammer la convoitise des princes voisins, ennemis de son père, surtout de Bérenger, le plus puissant de tous, qui s’était fait proclamer roi d’Italie, avec son fils Adalbert, le 15 décembre 950.
Au milieu de ces difficultés, Adélaïde se trouva 1out d’un coup sans appui, sans conseil, sans secours ; mais, pleine de confiance en la divine Providence, elle remit tout entre les mains de Dieu, sa personne et ses biens.
Cruauté de Bérenger.
Une nouvelle combinaison se présenta à l’esprit de Bérenger. Il ne rougit pas d’offrir à la reine la main de son fils Adalbert. Adélaïde écarta avec une ferme énergie cette proposition. Bérenger voulut aussitôt s’en venger. Il députa quelques gens de sa suite qui, sur son ordre, allèrent s’emparer de la sainte veuve. Elle fut enfermée dans la forteresse de Garda, dépouillée non seulement de ses immenses possessions, mais aussi de ses meubles, de ses bijoux, de ses vêtements de princesse et même frappée par Villa, femme de Bérenger.
L’héroïque victime, dit Luitprand – qui a raconté cette scène barbare, – souffrit mille outrages et mille indignités ; on lui brisa le corps à coups de poing et de pied, on lui arracha les cheveux, on lui refusa les secours les plus nécessaires. Bérenger la fit ensuite emprisonner avec une de ses suivantes, restée seule fidèle à ses malheurs, dans la tour du château de Garde.
Adélaïde transforma bientôt son cachot en un pieux oratoire ; malgré les précautions de Bérenger, la Providence sut bien la tirer de prison.
L’ermite Martin.
Pendant une nuit obscure, Adélaïde entendit du bruit dans un coin du cachot. Son humble et dévouée compagne, d’abord effrayée, s’avança, et vit des pierres se détacher de la muraille, puis un vieillard montrer la tête par cette ouverture et les inviter toutes deux à quitter la prison. C’était un saint prêtre nommé Martin, qui avait pratiqué une galerie souterraine aboutissant à la prison. Il apporta aux deux captives un déguisement pour leur permettre de traverser la campagne sans éveiller les soupçons.
L’une et l’autre purent sortir de la prison, mais un nouveau péril était réservé aux fugitives. L’obscurité de la nuit était telle, en effet, dit un historiographe, que la princesse tomba dans un étang, où elle aurait infailliblement péri, si Dieu, en qui seul elle avait confiance, ne l’eût fait rencontrer par un pêcheur, qui vint avec sa barque la retirer, elle et sa compagne. Tout ce que put faire le pêcheur fut de les réchauffer au feu qu’il alluma d’un peu de bois ramassé à la hâte et de leur faire cuire un poisson. Peu après, elles vinrent se cacher dans une forêt voisine.
Informé de l’évasion d’Adélaïde, Bérenger la fît traquer de toutes parts ; lui-même se mit à la tête d’une bande de soldats pour la découvrir. Elle fut donc réduite à se dissimuler le jour et à voyager la nuit, souvent par des chemins impraticables et dans des transes continuelles. Un jour qu’elle était cachée dans un champ de blé, elle entendit arriver derrière elle une troupe de cavaliers. C’était Bérenger avec son escorte. Ici encore, Dieu protégea manifestement sa servante, étendue dans le creux d’un sillon.
L’ermite, instruit par une révélation des dangers que couraient les deux victimes des fureurs de Bérenger, s’occupait de leur chercher un asile plus digne. Il se rendit à Reggio, dont l’évêque Adélard avait autrefois été l’ami de Lothaire et d’Adélaïde.
Le château fort de Canossa. – Othon le Grand en Italie.
L’Eglise de Reggio possédait un château fort à Canossa. Bâti sur un rocher à pic des Apennins, dans une position inexpugnable, Adélard crut que ce serait le lieu le plus sûr pour la retraite de la princesse malheureuse et de sa servante, en attendant des jours meilleurs. Elles y furent défendues par une quantité d’hommes armés.
Les mauvais traitements, les souffrances qu’endurait Adélaïde, indignaient l’Europe. Les feudataires italiens se repentaient d’avoir si aveuglément accueilli Bérenger, car sa tyrannie surpassait celle d’Hugues. Ils résolurent d’appeler à leur secours Othon le Grand, roi de Germanie. Ils députèrent près de lui des ambassadeurs qui s’y trouvèrent en même temps que l’ermite Martin. Le roi, à la demande des messagers, lui accorda une audience particulière. Martin lui apprit les malheurs d’Adélaïde, son évasion, le lieu de sa retraite et l’espoir que cette infortunée reine mettait en son secours.
Depuis quatre ans, Othon avait perdu sa femme, la reine Edith, fille d’Edouard Ier, roi d’Angleterre, et décédée le 26 janvier 947. Il retint auprès de lui Martin et lui dit sans préciser davantage ses intentions : « Vous verrez bientôt que le roi de Germanie sait punir les traîtres et protéger l’innocence opprimée. »
Mariage d’Othon avec sainte Adélaïde.
Peu de temps après, Othon, à la tête d’une armée formidable pénétra en Italie. Il fit son entrée solennelle à Pavie et chargea le prêtre Martin de convoquer en cette même ville la veuve de Lothaire. Peu de temps après, il épousait la vertueuse princesse. En octobre 951, Othon recevait à Pavie la couronne des rois d’Italie. Othon retourna ensuite en Allemagne avec sa nouvelle épouse qui se concilia sans peine l’affection de Ses sujets par sa piété et sa charité inépuisable. Bérenger continuait de régner en Italie, mais avec l’obligation de se reconnaître le feudataire du roi de Germanie, Othon.
Othon le Grand, empereur.
Le Pape saint Léon III avait autrefois rétabli l’empire d’Occident en la personne de Charlemagne, à la condition que les empereurs seraient les défenseurs titulaires de l’Eglise romaine contre les infidèles, les hérétiques, les séditieux. Cette situation qui pouvait offrir des avantages sérieux présentait aussi des inconvénients sans nombre par suite de la dépendance où se trouva l’Eglise par rapport au pouvoir temporel.
Quoi qu’il en soit, Othon Ier demanda d’abord cette dignité au Souverain Pontife, le saint Pape Agapit II, et ne l’obtint pas. Le jeune Pape Jean XII la lui conféra le 2 février 962 et l’empereur jura « de conserver au Pape sa vie, sa dignité, de ne rien ordonner pour le gouvernement de Rome, de rétablir le patrimoine de saint Pierre, et d’exalter l’Eglise et son chef ». A ce titre, les Romains prêtaient aux empereurs un serment de fidélité subordonnée à la fidélité qu’ils devaient au Pape, leur véritable roi.
Malheureusement, cette bonne harmonie entre Othon et Jean XII ne dura guère. Les torts étaient du côté de ce dernier, élu trop jeune au Souverain Pontificat, alors qu’il n’avait pas les qualités requises pour être investi d’une si éminente dignité. Othon réunit une assemblée d’évêques plus ambitieux que sages, qui prononcèrent contre Jean XII une sentence de déposition, et élurent un antipape, Léon VIII. Assurément, Othon eut tort, et les évêques encore plus ; ils n’avaient pas le droit de juger le Pape. Benoît V, successeur légitime de Jean XII, el élu en 964, fut assiégé dans Rome et exilé à Hambourg, où il devait mourir en g65. Ces tristes événements causèrent une grande douleur à la pieuse Adélaïde ; elle priait beaucoup pour l’Eglise du Christ, déchirée de diverses manières, et pour l’empereur. Elle fut exaucée. L’antipape Léon VIII étant mort en mars 965, Othon approuva la candidature d’un nouveau Pontife qui fut Jean XIII. Celui-ci ayant été chassé de Rome par les barons romains, appela Othon à son secours. Le prince se hâta d’accourir et punit sévèrement les conspirateurs.
Le jour de Noël 967, le jeune roi Othon II, son fils, déjà roi d’Italie, reçut de Jean XIII la couronne impériale, dans la basilique de Saint-Pierre, et fut associé au trône paternel. A cette occasion, Othon le Grand envoya un ambassadeur à la cour de Constantinople demander pour son fils la main de la princesse Théophanie, fille de l’empereur d’Orient Romain II. La jeune princesse s’embarqua avec les ambassadeurs venus d’Occident sur un navire pavoisé et couvert de fleurs. Quand elle arriva à Rome, Jean XIII la reçut dans la basilique de Saint-Pierre, et bénit son union avec Othon II. La splendeur des fêtes données à Rome en cette occasion éclipsa l’éclat de celles que la princesse avait vues à Constantinople. Après quoi, Othon II reprit le chemin de l’Allemagne, où la jeune impératrice eut bientôt conquis tous les cœurs.
Saint Ulric, évêque d’Augsbourg, avait accompli le pèlerinage de Rome peu après les fêtes du mariage du jeune empereur. Au retour, il passa par Ravenne, où l’empereur Othon le Grand séjournait alors avec son auguste épouse Adélaïde. Au moment où on lui annonça l’arrivée de l’homme de Dieu, Othon sortit du palais pour aller à sa rencontre, sans prendre garde qu’il n’avait pas achevé de se chausser. On vit donc cet empereur traverser les rues de la ville avec un pied nu pour aller s’agenouiller sous la bénédiction d’un Saint.
La pieuse Adélaïde reçut l’évêque comme l’envoyé du Seigneur, et quand le saint vieillard reprit sa route, des officiers impériaux furent mis à sa disposition pour l’escorter. L’empereur remit à l’évêque des sommes considérables pour les distribuer en aumônes et attirer la bénédiction du ciel sur son royaume. Il réclamait en même temps les prières des monastères pour que ses torts vis-à-vis de la Papauté fussent effacés. Ulric le lui promit, ainsi que le pardon.
Sainte Adélaïde veuve une seconde fois.
A partir de ce moment, Othon, déjà d’un âge avancé, se prépara à la mort. Fils de sainte Mathilde, frère de l’évêque de Cologne saint Brunon, époux d’Adélaïde, l’empereur se montra généralement digne d’une telle parenté. Il fut le tuteur du jeune roi de France Lothaire, auquel il fit épouser la princesse Emma. Il mourut en mai 973, à Memleben.
Exil de sainte Adélaïde.
Le fils d’Othon Ier succéda à son père et fut heureux sur le trône, tant qu’il s’inspira des conseils de sa mère. Celle-ci avait pris un grand soin de son éducation. Au milieu des délices de la cour, la vie d’Adélaïde était austère et se faisait remarquer par la pratique de toutes les vertus, particulièrement par une grande charité pour les pauvres.
Othon II ne manquait ni d’énergie ni de courage, mais d’expérience. Les factieux comptaient sur sa jeunesse pour secouer le joug qu’ils avaient porté sans murmure sous le règne de son père. Grâce à leurs intrigues, la discorde éclata dans le palais impérial, et Adélaïde, après avoir souffert toutes sortes de calomnies et d’ingratitudes, dut s’échapper pour sauver sa vie. Avec elle, le bon génie de l’empire sembla disparaître, la révolte fut au comble. Othon II, qui avait entraîné contre le roi de France, Lothaire, le prince Charles, frère de ce dernier, fut battu par le roi de France ; celui-ci reconquit sur lui la Lorraine et pilla Aix-la-Chapelle (978).
Réconciliation d’Othon avec sa mère.
A la nouvelle du bannissement de l’impératrice, une vive indignation avait éclaté en Allemagne. On avait donné à entendre au jeune Othon que sa mère dilapidait les trésors de l’Etat, qu’elle s’était mise à la tète d’une conjuration, dans le but de le détrôner. Les princes germains n’osèrent prendre la défense de la pieuse femme qui, voyant l’irritation de son fils, avait dû s’expatrier pour sauver sa vie.
Le bienheureux Mayeul, Abbé de Cluny, osa seul rappeler Othon au devoir de la piété filiale. L’empereur se repentit et envoya chercher sa mère. Autant la Germanie déplorait l’absence d’Adélaïde, autant la Bourgogne se réjouissait de la posséder. « La ville de Lyon, dit saint Odilon, cet illustre mère nourrice de la philosophie ; l’antique cité de Vienne, résidence des rois, furent tour à tour honorées de la visite de notre Sainte. » Quand elle arriva en Allemagne, Othon se prosterna à ses pieds, lui demanda pardon ; dès lors, il fut vis-à-vis d’elle le plus respectueux des fils.
Quand, tombé gravement malade en Italie – on a dit aussi qu’il devait succomber des suites d’une blessure causée par une flèche empoisonnée, – il sentit qu’il allait mourir, il fit partager son trésor en quatre portions ; la première, pour les églises ; la deuxième, pour les pauvres ; la troisième, pour sa sœur, sainte Mathilde, abbesse de Quedlimbourg ; la quatrième, pour son armée. Il fit ensuite sa confession à haute voix, devant le Pape et les évêques, en reçut l’absolution et mourut le 7 ou le 8 décembre 983. Il fut enterré à la porte orientale de Saint-Pierre, appelée Paradis, au pied de la statue du Sauveur.
Théophanie refusa la régence, qui fut confiée par les seigneurs de la Germanie à la pieuse Adélaïde, que la reconnaissance publique avait surnommée la « mère des peuples ». En possession de la puissance, elle ne se souvint de ses ennemis que pour les combler de bienfaits.
Pour diriger sa conscience, elle eut saint Adelbert, archevêque de Magdebourg, puis l’Abbé de Cluny, saint Odilon. Elle déploya sa générosité envers les pauvres et les églises. Elle érigea, restaura et dota de nombreux monastères d’hommes et de femmes dans toutes les parties de ses Etats, surtout en Bourgogne.
Mort de sainte Adélaïde.
Au témoignage de son biographe, Adélaïde visita les monastères d’Agaune, de Genève, de Lausanne, multipliant partout ses largesses impériales. Elle fit rebâtir le monastère de Saint-Martin de Tours, ruiné par un incendie ; elle envoya aussi un manteau impérial pour orner le tombeau du saint évêque. Au messager chargé de porter ces offrandes, elle fit cette recommandation : « Je vous prie, très cher fils, quand vous les déposerez au tombeau du glorieux saint Martin, de vous exprimer ainsi : “Evêque de Dieu, recevez ces humbles présents que vous offre, par mes mains, Adélaïde, servante des serviteurs de Dieu, pécheresse par nature, impératrice par la grâce du Seigneur. Recevez ce manteau de son unique fils Othon, et priez pour lui, vous qui avez eu la gloire de revêtir de votre propre manteau le Christ en la personne d’un mendiant.” »
Saint Odilon vint la visiter quand elle était encore en Bourgogne. Le Saint parle ici de lui-même avec beaucoup d’humilité. « Parmi la foule qui se pressait autour de sainte Adélaïde, se trouvait un religieux indigne du litre d’Abbé qu’on lui décernait et qu’estimait la pieuse impératrice. Ils se regardèrent l’un et l’autre et pleurèrent. Puis, l’impératrice prit le bord de la robe du moine, étoffe vile et grossière, la baisa et lui dit : « Mon fils, priez pour moi, ainsi que vos saints religieux. »
Adélaïde voulut reposer auprès de son époux, Othon le Grand, au monastère de Seltz ou Sehl-sur-le-Rhin. Elle s’y rendit au commencement de décembre 999. La fièvre la saisit dès son arrivée, et elle fut réduite à toute extrémité en peu de jours. Son âme, recueillie en Dieu, s’absorbait dans la prière. Ses yeux, levés au ciel, cherchaient le Christ, unique objet de ses désirs. Elle reçut l’Extrême-Onction et participa au sacrement du corps du Seigneur. A sa prière, les clercs chantèrent les psaumes de la Pénitence et les litanies des Saints. L’auguste impératrice mêla sa voix à celle des assistants, puis son âme, s’échappant de son corps, alla rejoindre en toute joie et sérénité les chœurs angéliques, le 16 décembre.
Il est à remarquer que si sainte Adélaïde figure au calendrier franc-comtois (le 11 décembre), à celui de Lorraine (le 16 décembre), etc., le Martyrologe Romain ne la nomme pas. Sa fête est au 17 décembre dans le nouveau Propre de Strasbourg.
A. L.
Sources consultées. – César Cantu, Histoire des Italiens, t. IV (Paris, 1860). – Dom Baudot, Dictionnaire d’hagiographie (Paris, 1925). – Louis Moréri, Le grand dictionnaire historique (Paris, 1759). – (V. S. B. P., n° 303.)