Évêque de Lyon et martyr (130?-208).
Fête le 3 juillet.
Chaque fois que l’hérésie a voulu se mesurer avec l’Eglise, elle a toujours trouvé de rudes adversaires pour lui barrer le chemin, et ces champions de l’Eglise étaient toujours des géants. Contre l’arianisme, un saint Athanase s’est dressé ; contre le pélagianisme, un saint Augustin.
Saint Irénée a tenu un rôle identique à une époque particulièrement délicate, celle des origines chrétiennes ; il eut à lutter, ainsi que nous le verrons, contre un ensemble d’erreurs qu’on appelait la « Gnose ». Contre elle l’évêque de Lyon, dont le nom signifie le Pacifique, soutint de longs et savants combats, qui l’ont fait surnommer par l’antiquité chrétienne « la hache de l’hérésie », ou encore, ainsi que dit Tertullien, « le curieux explorateur de toutes les doctrines » en même temps que « l’homme de la tradition ».
D’un autre point de vue, saint Irénée occupe une place capitale, car son œuvre est comme l’anneau d’or par lequel la doctrine des Pères rejoint l’esprit de l’Evangile. Il fut, en effet, le disciple le plus averti de saint Polycarpe, lui-même disciple de saint Jean, le confident le plus intime des pensées du Sauveur. Il a donc encore dans l’oreille les tout derniers échos de l’Evangile prêché par Jésus.
Pour ce motif, il a été considéré comme pouvant prendre rang parmi les « Pères apostoliques » ; expression qui, entendue dans un sens large, comprend les écrivains des premiers âges, contemporains des apôtres ou qui ont pu connaître quelqu’un d’entre eux.
Saint Irénée à l’école de saint Polycarpe.
On peut situer la naissance d’Irénée autour de l’année 130, à Smyrne ou dans cette région. Par une lettre que lui-même adressait à un de ses amis, du nom de Florin, nous savons qu’il fut disciple de saint Polycarpe :
Mon cher Florin, lui disait-il, je vous vis en Asie Mineure, je n’étais alors qu’un enfant. Vous viviez dans la demeure de Polycarpe ; il vous donnait le spectacle de ses grandes et héroïques actions. Toutes les circonstances de cette période de ma vie, la plus reculée pourtant, se sont gravées dans ma mémoire beaucoup mieux que les événements plus récents. Je pourrais marquer du doigt le lieu où le bienheureux Polycarpe s’asseyait pour s’entretenir avec ses disciples : je crois voir encore sa démarche, son air vénérable, les traits de son visage qui reflétaient si bien la pureté de sa vie. Il me semble l’entendre, quand il parlait à l’assemblée ; il racontait en quelle douce intimité il avait vécu avec Jean et avec les autres qui avaient vu le Seigneur. Il citait leurs paroles et tout ce que ceux-ci lui avaient appris du divin Maître, de ses miracles et de sa doctrine. Avec quelle ardeur, je recueillais ces traditions augustes, dont il plut à la bonté divine d’ouvrir pour moi le trésor. Je les fixais, non sur un parchemin qui s’efface, mais au plus profond de mon cœur, et je les repasse continuellement dans mon esprit.
Par ce document de première valeur, nous voyons comment Irénée relie les temps des apôtres aux siècles suivants, et nous apercevons avec évidence le principe fondamental de l’orthodoxie catholique, qui est de rester fidèle d’une manière inviolable au dépôt de la révélation. L’œuvre d’Irénée marque donc une date considérable dans l’Eglise et la Tradition.
Saint Irénée dans les Gaules.
Irénée se trouvait à Rome lorsque saint Polycarpe subit à Smyrne, en 155, le dernier supplice pour la foi de Jésus-Christ. Ce saint évêque, avant de mourir, voulant donner à la terre des Gaules qu’il aimait spécialement, un gage de sa sollicitude, détacha de son entourage une pieuse colonie de missionnaires qu’il envoya à la conquête spirituelle de notre patrie : c’étaient Pothin, Irénée, Bénigne et d’autres encore, non moins dignes de leur noble mission ; Pothin, en compagnie d’Irénée, se fixa à Lyon, où il établit son siège épiscopal.
L’archéologie est d’accord avec la tradition pour attester l’origine orientale des chrétientés du Rhône. De même, elle atteste que c’est par la vallée du Rhône qu’a commencé l’évangélisation de la Gaule.
Lyon était alors la capitale de la Gaule romaine. Sur les deux rives de la Saône, s’étendait le quartier des Asiatiques, qui étaient venus en cette région pour y faire du commerce. Beaucoup d’entre eux suivaient la religion du Christ et ils se pressaient volontiers autour de leurs missionnaires, orientaux comme eux, leur demandant, au milieu de l’universelle anarchie, des doctrines, un idéal de vertu et de pureté. Mais la loi romaine était très sévère pour les chrétiens ; leur situation était réglée par un rescrit de Trajan, datant de 111 à 113, et qui leur interdisait de faire profession de leur foi. De ce fait, la persécution, éteinte depuis quelques années, se ralluma avec plus de violence que jamais. Les prisons regorgèrent de fidèles, le sang coula à torrents, il y eut à Lyon tout un peuple de martyrs. Saint Pothin lui-même, vieillard plus que nonagénaire, fut massacré par la foule idolâtre (177). Irénée échappa on ne sait comment à la rage des persécuteurs.
Le messager des martyrs.
Au moment où l’hérésie gnostique vint aggraver le péril de la malheureuse Église de Lyon, du fond de leur cachot où ils étaient retenus, quarante-huit confesseurs de la foi résolurent dans cette extrémité de s’adresser au Pape saint Eleuthère, comme au Père commun de la chrétienté, afin de lui demander, à propos des erreurs qui venaient de s’élever parmi eux, ce qu’ils avaient à croire et à pratiquer.
Pour transmettre leur message au chef suprême des fidèles, ils voulurent choisir le prêtre le plus distingué de l’Eglise lyonnaise, celui, par conséquent, dont la présence eût été le plus nécessaire durant cette affreuse tourmente qui avait emporté déjà Pothin, leur guide et leur pilote. Ce prêtre était Irénée. Mais la prudence la plus merveilleuse avait dicté leur choix aux confesseurs de Jésus-Christ, car s’ils privaient leur Église de la présence d’un vaillant défenseur, c’était pour que le Pape leur rendît, en la personne d’Irénée, un second et digne évêque.
Celui-ci refusa d’abord cette mission : s’éloigner de Lyon, n’était ce point abandonner l’espoir si cher à son âme de trouver le martyre avec ses frères ? Mais les saints confesseurs exigèrent à tout prix ce sacrifice, et, après une vive résistance, Irénée dut se rendre à leurs prières. En conséquence, il prit le chemin de la Ville Eternelle, porteur d’une lettre pour le Souverain Pontife, qui finissait par ces mots élogieux :
Cette épître vous sera remise par notre frère et collègue Irénée, qui a cédé à nos instances en acceptant ce message. Nous vous supplions de l’accueillir comme un apôtre zélé du testament de Jésus-Christ et nous vous le recommandons à ce titre.
Le vœu des confesseurs s’accomplit, car Irénée, pendant son séjour à Rome, reçut la consécration épiscopale de la main d’Eleuthère. Le Pape lui remit également une réponse adressée à toutes les Églises qui combattaient pour la foi du Christ dans les Gaules. Après avoir heureusement conclu les affaires qui avaient motivé son voyage, Irénée se mit à rechercher diligemment les cérémonies, coutumes et traditions que les princes des apôtres, saint Pierre et saint Paul, avaient enseigné à l’Eglise romaine et qui, depuis, s’y étaient conservées avec fidélité. Son dessein était de les implanter ensuite dans l’Eglise lyonnaise. Après une année passée dans ces travaux, il revint dans les Gaules s’asseoir sur le siège épiscopal d’où les satellites avaient arraché le vénérable Pothin pour le traîner au tribunal païen.
On connaît les noms de quarante-huit vaillants qui, à la même époque que saint Pothin, subirent le martyre. Il convient d’ajouter à leur liste les saints Marcel et Valérien (178), qui versèrent leur sang pour Jésus-Christ, l’un à Chalon-sur-Saône, l’autre à Tournus, à 30 kilomètres de Mâcon, et enfin saint Symphorien, dont s’honore la ville d’Autun (180). Mais leur nombre est beaucoup plus grand, puisque saint Eucher les appelle « un peuple de martyrs ».
La lutte contre les hérésies.
La « Gnose » était, au iie siècle de notre ère, un peu ce qu’était au début du xxe, parmi les gens d’une instruction moyenne, plus étendue que solide, le « scientisme », cette idolâtrie du progrès qui prétend remplacer la religion et la morale. Les gnostiques se préoccupaient d’avoir une religion scientifique – le mot grec gnosis signifie connaissance – qui, en soi, n’a rien de blâmable ; mais leur subtilité leur avait fait imaginer les trouvailles les plus invraisemblables. D’après Valentin, l’un de leurs maîtres, la création s’explique par trois choses : la matière, le « Démiurge », auteur de ce monde imparfait, et le « Sauveur », chargé de réparer l’œuvre manquée du Démiurge. A ces prétendus dogmes les gnostiques ajoutent celui de « l’émanation », et prétendent faire sortir toutes choses du sein d’un Dieu suprême, être ineffable et irrévélé ; c’est le Père ou « abîme », uni de toute éternité à sa compagne, la « Solitude silencieuse ». De leur union naît « l’Intellect » qui épouse « Vérité », lesquels engendrent à leur tour « Verbe et Vie » dont sont issus enfin « Homme » et « Église ». Ce sont les huit « Eons » de « l’Ogdoade ». D’autres couples s’unissent qui, au nombre de quinze, constituent le « Plérome », c’est-à-dire la société parfaite des « êtres ineffables » … Le reste est à l’avenant, et constitue la plus bizarre des lignées où les hommes se rangent en trois catégories, les « hyliques » ou matériels, les « psychiques » ou animés, et les « pneumatiques » ou spirituels.
Telles étaient les idées qui venaient d’être importées sur les rives de la Saône et du Rhône ; en fait, la Gnose opérait de terribles ravages dans la communauté chrétienne.
Irénée pouvait sourire de tant d’extravagances, mais il mesurait aussi l’immense portée du péril couru par la foi des simples, submergés et séduits par tant de subtilités.
C’est alors qu’il composa son Livre contre les hérésies, admirable traité en cinq parties, écrit en langue grecque.
L’auteur avertit modestement le lecteur que celui-ci ne doit pas rechercher dans son traité des agréments littéraires, ce que ne lui permettent ni son travail de missionnaire parmi les Gaulois, ni son manque d’habileté dans les artifices du langage. Cependant, on voit qu’Irénée connaissait les poètes et les philosophes de l’antiquité.
Contre des adversaires très dangereux, l’auteur emploie toutes les ressources de la dialectique la plus vigoureuse. Il expose d’abord toute nue l’hérésie gnostique, et son exposé souvent ironique est déjà une réfutation. « Lorsqu’une bête malfaisante, dit-il, est cachée dans une forêt, celui qui la poursuit éclaircit le fourré, de façon à laisser voir la bête elle-même. » Puis il établit un dilemme, ou raisonnement, offrant deux solutions contradictoires : Ou votre Plérome contient tout, comme son nom l’indique, et alors, pourquoi en excluez-vous le monde visible ? ou il ne contient pas tout, et alors, pourquoi le nommez-vous le Plérome ? Puis il les pourchasse dans leurs plus bizarres sinuosités, sans leur permettre de souffler.
C’est un sujet de joie et de fierté pour le chrétien de trouver à une date si reculée, sous la plume d’Irénée, nos propres croyances exprimées avec une netteté parfaite, par exemple, dans le passage suivant :
L’Eglise de Jésus-Christ, répandue par toute la terre, jusqu’aux extrémités du monde, a reçu des mains des Apôtres et de leurs disciples le dépôt de la foi qu’elle professe. Elle consiste à croire en un seul Dieu, Père tout-puissant, qui a fait le ciel et la terre, la mer et tout ce qui s’y trouve contenu ; en un seul Jésus-Christ, Fils de Dieu, qui s’est fait homme pour notre salut, et au Saint-Esprit qui, par la bouche des Prophètes, a prêché les desseins de Dieu, pour les temps à venir ; l’avènement de Jésus-Christ dans sa chair, sa naissance au sein d’une Vierge, ses souffrances et sa mort, sa résurrection, son ascension dans le ciel où ce bien-aimé Fils de Dieu, son Père, pour ressusciter tous les hommes, et rendre à chacun selon ses œuvres ; afin qu’en présence de Jésus-Christ, Seigneur, Dieu, Sauveur et Roi, tout genou fléchisse dans le ciel, sur la terre et dans les enfers, ainsi qu’il est ordonné par Dieu son Père, que toute langue le confesse et lui rende l’hommage qui lui est dû. Nous croyons que les esprits de malice, les anges rebelles, que les impies, les méchants, les hommes qui se sont abandonnés à l’iniquité, au blasphème, seront châtiés par le supplice du feu qui ne s’éteindra jamais ; et que les serviteurs de Dieu, tous ceux qui, soit dès le commencement, soit après avoir fait pénitence de leurs péchés, auront persévéré dans l’observation de ses commandements, seront récompensés par le don d’une vie éternelle, incorruptible, au sein d’une immortelle gloire.
Irénée précise nettement le rôle de la Très Sainte Vierge dans l’œuvre de la Rédemption :
Comme Eve, ayant un mari, mais étant encore vierge, fut par sa désobéissance cause de mort pour elle-même et pour l’humanité entière, ainsi Marie, ayant, elle aussi, un époux prédestiné et étant cependant vierge elle aussi, devint, par son obéissance, pour elle et pour toute l’humanité, une cause de salut.
Il écrit encore sur le même sujet :
Comme Eve se laissa séduire par le discours d’un ange et abandonna Dieu en transgressant sa parole, ainsi Marie reçut de la bouche d’un ange la joyeuse nouvelle qu’elle porterait Dieu, en obéissant à sa parole. Et si la première fut désobéissante à Dieu, la seconde se laissa persuader de lui obéir, afin que la Vierge Marie devînt l’avocate de la vierge Eve. Et comme le genre humain fut enchaîné à la mort par une vierge, c’est par une Vierge aussi qu’il est sauvé, puisque la balance est en équilibre, la désobéissance d’une vierge compensée par l’obéissance de la Vierge.
On admire aussi dans ce traité la clarté avec laquelle il parle du principat suprême et du magistère infaillible du Souverain Pontife. Aussi, un témoignage si éclatant de la croyance des premiers siècles à ce dogme arrachait-il à un professeur protestant cet aveu : « Si les livres d’Irénée sont authentiques, il faut tous nous faire catholiques romains. »
Au temps de sa jeunesse, le futur évêque de Lyon avait eu pour maître saint Papias, évêque d’Hiérapolis, qui professait l’opinion millénariste, selon laquelle le Messie devait revenir un jour sur la terre et y régner corporellement pendant un millier d’années. Irénée suivit, il est vrai, sur ce point, les idées de son maître. Mais il convient de rappeler qu’à cette époque le millénarisme était une opinion qui pouvait être encore librement discutée ; ce n’est qu’au ve siècle que saint Augustin lui donnera le coup de grâce, en offrant une interprétation exacte de l’Apocalypse sur lequel le millénarisme prétendait s’appuyer.
La Pâque. – Les « quartodécimans ».
A la fin du iie siècle, une grave question continuait de diviser le monde catholique : quelques Églises d’Orient et plusieurs personnages persistaient à célébrer la fête de Pâques le quatorzième jour du mois de nisan, qui commençait avec la première lune de mars, c’est-à-dire à la date même où le Sauveur la célébra, suivant l’ancienne loi et la coutume persistante des Juifs ; de l’autre côté, le Pape saint Victor, comme l’avait fait son prédécesseur saint Anicet vers l’an 154, commanda, vers l’an 191, de la célébrer le premier dimanche qui suivait le 14 nisan, c’est-à-dire le jour où Notre-Seigneur était ressuscité, et cela afin de se conformer à renseignement de saint Pierre et non plus à l’usage judaïque.
La controverse fut extrêmement vive, puisque le Pape déclara excommunier les « quartodécimans » ou partisans du « 14 », c’est-à-dire surtout les Églises d’Asie. Irénée intervint près de saint Victor, et l’on peut croire que son geste eut un résultat heureux car, soit que le Pontife eût rapporté son décret, soit qu’il n’insistât plus sur la sanction, quelques Églises maintinrent l’ancienne date du 14 nisan, et l’usage n’en fut complètement aboli que par le concile de Nicée en 325. Il n’en reste pas moins qu’à la fin du iie siècle l’autorité de l’évêque de Rome n’est contestée par personne, alors même que ses décisions sont jugées trop sévères, voire inopportunes. La démarche respectueuse et pressante de l’évêque de Lyon confirme le fait historique de la suprématie pontificale dès les premiers âges.
Propagation de la foi.
Lyon a toujours été un centre d’apostolat, et nous voyons saint Irénée y commencer l’œuvre des Missions étrangères ; il formait, en effet, des disciples qui, avec le titre « d’évêques des nations », allaient prêcher l’Evangile par toute la Gaule, sans délimitation de peuple ni de diocèse.
Aussi, n’avons-nous aucune peine à admettre le bien fondé des récits bourguignons du vie siècle qui rattachent à saint Irénée, de la façon la plus formelle, l’évangélisation de Langres et de Dijon par saint Bénigne, celle de Besançon par le prêtre Ferréol et le diacre Ferjeux, celle de Saulieu par les saints Andoche et Tyr, celle de Valence par les saints Félix, Achillée et Fortunat.
L. Cristiani.
C’est pour ce motif que la Franche-Comté a toujours spécialement honoré le nom d’Irénée, en qui elle vénère le père spirituel des saints Ferréol et Ferjeux.
L’avertissement céleste.
Cependant, l’heure de la récompense approchait. L’empereur romain Septime Sévère, informé de l’influence immense exercée à Lyon par Irénée, fît cerner la ville par les gladiateurs les plus cruels, avec le mot d’ordre d’égorger quiconque refuserait de sacrifier aux dieux. Irénée fut averti par un ange du danger qu’il courait. L’évêque répondit à ce message par une prière qui nous a été ainsi transmise :
Seigneur Jésus-Christ, lumière éternelle, splendeur de la justice, source et principe de piété, je vous rends grâce d’avoir daigné me réjouir et me consoler par le ministère de votre ange. Donnez à ce peuple, qui est le vôtre, la constance qui empêchera qu’aucun ne défaille dans la confession de votre nom ; soutenus par votre force, qu’ils obtiennent dans un noble triomphe le prix annoncé par vos saintes promesses, et qu’ils trouvent, en mourant, la gloire de l’immortalité.
Après cette prière, Irénée s’occupa à fortifier ses frères dans le Christ.
On peut admettre avec Paul Allard que Septime Sévère, l’auteur du violent édit de 202, ait fait exécuter les chrétiens rencontrés sur sa route quand il repassa à Lyon vers 208. Le Martyrologe hiéronymien signale au 28 juin de cette année la mort, à Lyon, de l’évêque Irénée avec six autres.
L. Cristiani.
D’après une ancienne inscription qu’on voit à Lyon, au fronton de l’église qui porte le nom du Saint, le nombre global des martyrs d’alors est évalué à dix-neuf mille hommes sans compter les femmes et les enfants. Le Martyrologe dit que saint Irénée reçut la glorieuse « couronne du martyre avec presque tout le peuple chrétien de la cité » épiscopale.
Les reliques du disciple de saint Pothin et de saint Polycarpe furent conservées à Lyon dans un chapelle souterraine de l’église Saint-Irénée, sur la montagne de Fourvière, jusqu’à l’an 1562, époque où les huguenots, profanant cette auguste tombe, les dispersèrent. Le crâne, jeté sur la voie publique par ces misérables, fut recueilli par des mains pieuses qui le déposèrent dans l’église primatiale de Saint-Jean, où on le vénère encore.
Le culte.
La fête de saint Irénée, évêque de Lyon, était célébrée solennellement par de nombreux diocèses de France, surtout par ceux du Midi. Les anciens diocèses de Lodève et d’Agde, pour n’en citer que deux, avaient élevé cette fête au rite double. Le calendrier des chanoines de Saint-Ruf, près Avignon, associait le 28 juin, au nom de saint Irénée, le souvenir de ses compagnons.
Les coptes honorent ce Saint le 18 juin ; les grecs-ruthènes le 23 août. Dans le calendrier romain approuvé en 1913, sa fête, déplacée du 28 juin, en raison de la vigile des saints Pierre et Paul, est reportée au 9 juillet.
Benoit XV l’a introduite en 1922 dans la liturgie de l’Eglise universelle, en maintenant la date du 28 juin. [Note de LPL : La fête est fixée au 3 juillet dans le missel de Jean XXIII].
A.Poirson.
Sources consultées – L. Cristiani, Saint Irénée (Paris, 1928). – E. Lacoste, Les Papes à travers les âges, t. Ier (Paris). – O. Bardenhewer, Les Pères de l’Eglise (Paris, 1899). – Mgr Freppel, Les Pères de l’Eglise des trois premiers siècles (Paris, 1894). – (V. S. B. P., n° 229.)
Source de l’article : Un saint pour chaque jour du mois, Juin, La Bonne Presse, 1932