Apôtre (+ vers 53 ou 57).
Fête le 11 juin.
Vie résumée par l’abbé Jaud
Saint Barnabé est qualifié du nom d’Apôtre, quoiqu’il ne fût pas du nombre des douze que Jésus avait choisis ; on lui a donné ce titre glorieux parce que le Saint-Esprit l’avait appelé d’une manière toute spéciale et qu’il eut une grande part, de concert avec les Apôtres, dans l’établissement du christianisme.
Il était Juif, de la tribu de Lévi, et natif de l’île de Chypre ; son nom de Joseph lui fut changé par les Apôtres contre celui de Barnabé, qui signifie fils de consolation. Il avait été ami d’enfance de saint Paul et c’est lui qui, après l’étonnante conversion de cet Apôtre, le présenta à Pierre, le chef de l’Église.
La première mission de Barnabé fut d’aller diriger l’Église d’Antioche, où la foi prenait de grands accroissements ; il vit tant de bien à faire, qu’il appela Paul à son secours, et les efforts des deux Apôtres réunis opérèrent des merveilles. Sur l’inspiration de l’Esprit-Saint, le Prince des Apôtres leur donne l’onction épiscopale, et ils s’élancent, au souffle d’en haut, vers les peuples gentils, pour les convertir. Salamine, Lystre, la Lycaonie et d’autres pays encore, entendent leur parole éloquente, sont témoins de leurs miracles et, sous leurs pas, la foi se répand avec une rapidité prodigieuse. Paul et Barnabé se séparent ensuite, pour donner plus d’extension à leur ministère.
L’île de Chypre, d’où il est originaire, était particulièrement chère à Barnabé ; c’est là qu’il devait sceller de son sang la foi qu’il avait prêchée.
Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l’année, Tours, Mame, 1950
Version longue (La Bonne Presse)
Avant de porter le surnom de Barnabé sous lequel nous l’honorons, cet apôtre s’appelait Joseph, nom qui signifie « accroissement ». Il était d’origine juive, de la tribu de Lévi. Il vit le jour dans l’île de Chypre, où ses aïeux s’étaient réfugiés lorsque la Judée fut envahie par les Romains, sous la conduite de Pompée.
Quand son âge le lui permit, Joseph fut envoyé à Jérusalem pour y étudier à l’école du célèbre Gamaliel, ce fameux docteur en Israël qui, selon les traditions talmudiques, « emporta dans le tombeau l’honneur de la loi ».
L’illustre rabbi comptait de nombreux disciples. A leur tête, un jeune Cilicien, nommé Saul, se distinguait par son zèle, sa science et la pureté de sa vie. On le voyait tous les jours au Temple avec Etienne, le futur diacre, qui devait répandre le premier son sang pour Jésus-Christ. Joseph était à peu près de leur âge. Il se lia avec eux d’une étroite amitié.
Joseph s’attache aux pas du divin Maître.
Cependant, le Sauveur commençait à remplir la Judée de ses prodiges. D’après les traditions des Eglises orientales, le jeune lévite eut l’occasion de l’entendre parler dans le Temple, et il fut ravi de la doctrine de ce nouveau Maître, dont on disait que « nul n’avait parlé comme cet homme ». Le miracle de la piscine probatique auquel il assista ne lui laissa plus de doute : il eut foi en la mission de Jésus-Christ, et fut désormais un de ses ardents admirateurs.
II courut faire part de ce qu’il avait vu et entendu à sa tante Marie, mère de Jean-Marc. A sa parole, toute la famille crut a Jésus, et cette sainte maison devint l’asile du Sauveur à Jérusalem.
Joseph reçoit de saint Pierre le nom de Barnabé.
Après la Pentecôte, Joseph fut un des premiers à donner l’exemple de ce détachement admirable qui faisait dire à saint Jean Chrysostome que l’Eglise de Jérusalem offrait à son berceau le spectacle de la république des anges. Il est expressément nommé dans les Actes comme « ayant vendu tous ses biens pour en apporter le prix aux pieds des apôtres ». [1] Son désintéressement fut bientôt imité par la multitude des fidèles. Il convenait que Barnabé, qui devait un jour porter lui aussi le titre d’apôtre, pût dire comme les Douze : « Voici que nous avons tout quitté pour vous suivre. » C’est pour ce motif, sans doute, que l’Esprit-Saint cite son nom parmi ceux qui renonçaient à tout ce qu’ils possédaient.
Cet élan de générosité volontaire remplissait de consolation le cœur des apôtres, et augmenta leur affection pour Joseph, auquel ils donnèrent le surnom de Barnabé, c’est-à-dire, fils de consolation, ou encore fils de l’exhortation, hébraïsme qui signifie : celui qui a le don d’exhorter. C’est sous ce beau nom que le monde entier vénère le compagnon de saint Paul.
Saint Barnabé présente aux apôtres Paul converti.
Quand l’Eglise, animée du souffle de la Pentecôte, se fut manifestée en face de la Synagogue, Barnabé eut part à toutes les tribulations de ses frères. Les pharisiens et les sadducéens du grand Conseil, qui trouvaient dans les institutions mosaïques la satisfaction de tous leurs intérêts, ne pouvaient entendre, sans un frémissement de rage, proclamer la divinité de ce Jésus qu’ils avaient crucifié. Le diacre Etienne n’hésita pas à imprimer sur la face de ces hypocrites de la légalité les stigmates d’une flétrissure immortelle. Un tel courage lui mérita d’être la première victime de leur fureur : la populace se rua sur lui et l’entraîna hors de la ville pour le lapider. Au moment du supplice, « les témoins, disent les Actes des Apôtres, déposèrent leurs manteaux auprès d’un homme, jeune encore, dont le nom était Saul ».
C’était l’ancien condisciple d’Etienne et de Barnabé. Caractère ardent, il s’était laissé séduire par l’apparente austérité des pharisiens, avait embrassé leurs secte, et était devenu un violent persécuteur de l’Eglise. Il entrait à main armée dans les maisons des fidèles, saisissait hommes et femmes et les traînait en prison.
Mais Jésus l’attendait sur le chemin de Damas où Saul se rendait, « ne respirant que menaces et carnage contre les disciples du Seigneur ». Celui que nous appelons maintenant saint Paul tomba foudroyé par la grâce.
Après une retraite de trois ans en Arabie, il regagna Jérusalem, où le souvenir de ses anciennes fureurs était encore vivant. Là il cherchait à se joindre aux frères, mais ceux-ci ne pouvaient croire qu’il eût embrassé la foi, et toutes les assemblées lui restèrent interdites. Barnabé, son ami de jeunesse, fut le seul qui lui ouvrît sa demeure. Après avoir entendu de sa bouche le récit des mer- Veilles opérées à Damas, il présenta le nouvel élu du Seigneur à Pierre, chef de l’Eglise, et à Jacques, évêque de Jérusalem.
Il leur raconta comment celui-ci avait vu le Seigneur sur le chemin, comment le Seigneur lui avait parlé, et avec quelle assurance lui-même avait agi à Damas au nom de Jésus.
Ac 9, 27.
Le crédit de Barnabé était grand ; sur sa parole, saint Paul fut admis dans la société des frères, et l’Apôtre des Gentils commença aussitôt l’exercice de sa mission dans la Ville Sainte.
Saint Paul et saint Barnabé à Antioche.
Cependant, les fidèles, dispersés par la persécution, s’en allèrent de tous côtés, semant la parole évangélique. Antioche en reçut plusieurs dans ses murs et les conversions s’y multiplièrent, non seulement parmi les Juifs, mais aussi parmi les Grecs. Cette chrétienté naissante avait besoin d’un chef : Barnabé fut délégué et partit aussitôt. Sous sa direction, l’Eglise d’Antioche progressa merveilleusement.
A Antioche comme à Jérusalem, les Juifs convertis voyaient avec peine l’entrée des païens dans l’Eglise. Ils auraient voulu, du moins, qu’on ne les reçût pas sans les assujettir aux prescriptions de la loi mosaïque. Barnabé combattit ces préjugés, et dès qu’on sut qu’il était possible de devenir disciple du Sauveur sans se faire Juif, on accourut en foule à son appel.
Barnabé eut bientôt besoin de nouveaux ouvriers pour recueillir une si abondante moisson. Il partit « pour Tarse afin d’y chercher Saul » qui continuait, dans sa ville natale, à se recueillir.
Quand il l’eut trouvé, il l’amena à Antioche. Ils demeurèrent une année entière dans cette ville et y instruisirent une foule considérable, si bien qu’à Antioche les disciples commencèrent à recevoir le surnom de chrétiens.
En ces jours-là (dans le cours de l’an 42), dit saint Luc, des prophètes de Jérusalem vinrent à Antioche. L’un d’eux, nommé Agab, inspiré par l’Esprit-Saint, se leva et prédit qu’une grande famine désolerait bientôt l’univers. Elle arriva, en effet, sous l’empereur Claude. Tous les disciples, prévoyant les besoins où allaient se trouver les fidèles de Judée, résolurent d’envoyer, chacun selon ses moyens, de quoi les secourir, et prièrent Barnabé et Saul de leur porter eux-mêmes ces aumônes.
Ac 9, 25–30.
Les deux chefs de l’Eglise d’Antioche ne montèrent à Jérusalem que lorsque la famine se fut déclarée en Palestine, c’est-à-dire en l’an 44, selon l’historien Josèphe. Mais, depuis la prédiction d’Agab, de graves événements étaient survenus à Jérusalem, si bien que les deux envoyés n’y trouvèrent plus ni Pierre ni les autres apôtres, mais seulement les « anciens ». Ce nom, qui apparaît ici pour la première fois dans la hiérarchie de l’Eglise, désigne un nouvel ordre de ministres sacrés, les « prêtres », du mot grec presbyteros ; en l’absence des apôtres, ce sont eux qui veillent sur les fidèles et leur administrent les sacrements les plus indispensables à la vie chrétienne.
C’est aux « anciens » que Saul et Barnabé remirent les aumônes des chrétiens d’Antioche, puis ils redescendirent en cette ville, emmenant avec eux Jean-Marc, le cousin de Barnabé.
Première mission.
Les ministres du Seigneur s’étant assemblés afin de célébrer les mystères, le Saint-Esprit leur dit : « Séparez-moi Saul et Barnabé pour l’œuvre à laquelle je les ai appelés. »
Alors, après un jeûne solennel et de longues prières, ils imposèrent les mains aux deux élus, leur conférèrent la dignité épiscopale, et les abandonnèrent à la direction céleste. Le départ eut lieu très probablement au cours de l’année 45.
Les deux envoyés de l’Esprit-Saint prirent avec eux Jean-Marc et se rendirent à Séleucie, d’où ils s’embarquèrent pour l’île de Chypre. Ce fut là qu’ils commencèrent leur apostolat ; la parole évangélique retentit dans cette île de la volupté, ébranlant les portiques des temples de Vénus, et renversant les divinités immondes.
Les deux apôtres prêchèrent Jésus-Christ avec un égal succès à Salamine et à Paphos. Dans cette dernière ville résidait le proconsul romain Sergius Paulus, « homme prudent », disent les Livres Saints. Celui-ci manda Saül et Barnabé pour apprendre de leur bouche la religion du Christ. Un Juif « se livrant à la magie » et surnommé pour ce motif Elymas, qui se trouvait dans la maison de Sergius Paulus, cherchait à détourner le proconsul de la foi Rempli de l’Esprit-Saint, Saul fixa son regard sur lui :
– Esprit de mensonge et de perfidie, fils de Satan, ne cesseras-tu point de pervertir les voies droites du Seigneur ? Voici que la main de Dieu est sur toi : tu seras aveugle et, pendant un certain temps, tu ne verras plus la lumière du jour.
A l’instant même les yeux d’Elymas se voilèrent, et, témoin de ce miracle, le proconsul embrassa la foi. (Ac 13, 6–12.)
Ce fut alors que Saul, s’emparant du nom de ce proconsul qu’il venait de conquérir à Jésus-Christ, échangea le nom juif qu’il tenait de ses aïeux contre celui de Paul, que portait ce proconsul. Celui-ci persévéra dans la foi, et mourut, d’après une tradition que relate le Martyrologe, évêque de Narbonne ; la fête de ce Saint se célèbre le 23 mars.
Les apôtres à Pergé.
De Chypre, Paul et Barnabé passèrent en Asie Mineure et débarquèrent à Perga ou Pergé de Pamphylie, avec l’intention d’évangéliser les populations de ces contrées montagneuses. Effrayé par une telle perspective, Jean-Marc se découragea, se sépara d’eux et retourna à Jérusalem auprès de sa mère. Nos deux missionnaires, franchissant la chaîne du Taurus, arrivèrent à Antioche de Pisidie.
Un jour de sabbat, ils entrèrent dans la synagogue et s’assirent au milieu des Juifs. Après la lecture de la loi et des prophètes, les princes de l’assemblée, apercevant les frères étrangers, les invitèrent à prendre la parole. Paul fit une belle exhortation, et les Juifs en furent si satisfaits qu’ils prièrent les apôtres de revenir au prochain sabbat parler encore sur le même sujet.
Durant la semaine, beaucoup de Juifs et de prosélytes entretinrent Paul et Barnabé, qui continuèrent à les exhorter à demeurer fidèles à la grâce de Dieu. Au sabbat suivant presque toute la ville se rassembla pour les entendre. Les rabbins en conçurent une telle jalousie qu’ils éclatèrent en blasphèmes contre la doctrine de Paul. Alors Paul et Barnabé leur dirent avec fermeté :
– Puisque vous refusez d’entendre la parole de Dieu, nous allons nous tourner vers les Gentils.
Ac 13, 43–47.
C’est ce qu’ils firent, et la parole du Seigneur se répandit comme une semence féconde dans tout le pays. De plus en plus irrités, les Juifs firent éclater une persécution violente contre Paul et Barnabé, en suscitant contre eux l’animosité des femmes pieuses et influentes et des principaux de la ville. Ils réussirent à faire expulser les apôtres qui, secouant sur ces obstinés la poussière de leurs pieds, allèrent à Iconium, la moderne Konia, qui se trouve à cent vingt kilomètres d’Antioche de Pisidie.
Iconium. – Sainte Thècle.
Iconium faisait alors partie de la province romaine de Galatie. On y vénérait la divinité de Cybèle, mère des dieux, dont le culte ne respirait que frénésie sauvage et débauche. En cette ville la communauté juive avait une synagogue. C’est là que Paul et Barnabé commencèrent leurs prédications, agissant en toute assurance au nom du Seigneur, qui rendait témoignage à la parole de sa grâce par les signes et les prodiges qu’il opérait par leurs mains. Une grande multitude de Juifs et de Grecs reçurent la foi.
Mais ici encore la foule se divisa et l’hostilité devint telle que les apôtres faillirent être lapidés. Ils allèrent porter l’Evangile à Lystres, ville de Lycaonie, et dans tout le pays d’alentour.
Les Pères nous ont conservé le souvenir d’une illustre chrétienne d’Iconium, sainte Thècle, dont ils exaltent la virginité et le courage. Elle versa son sang pour le Christ. On croit que sa conversion date de cette première mission de Paul et de Barnabé.
Le boiteux guéri. – Apothéose. – Lapidation.
A leur arrivée à Lystres, Paul et Barnabé débutèrent par un miracle. Un infirme, privé dès sa naissance de l’usage des jambes, était assis à l’entrée de la ville et écoutait la prédication de Paul. L’Apôtre fixa sur lui son regard et vit qu’il avait la foi.
– Lève-toi, lui dit-il, tiens-toi debout sur tes pieds.
Et l’infirme se leva guéri. Les nombreux témoins de ce prodige éclatèrent en cris d’enthousiasme, disant :
– Des dieux sont descendus parmi nous sous une forme humaine.
Ils donnaient à Barnabé le nom de Jupiter et à Paul celui de Mercure, parce que c’était Paul qui avait porté la parole. Un prêtre de Jupiter vint avec des couronnes et fit amener des taureaux, qu’il voulait, avec le peuple, offrir en sacrifice aux deux divinités.
Les apôtres étaient loin de s’attendre à pareille aventure. Déchirant leur tunique, ils se jetèrent parmi la foule en criant :
– Amis, qu’allez-vous faire ? nous sommes des mortels, des hommes comme vous ! Abandonnez ces vaines superstitions et convertissez-vous au Dieu vivant qui a créé les cieux, la terre, les mers, le monde entier ! Du haut du ciel, il répand ses bienfaits, dispense les pluies et les saisons fécondes et remplit nos cœurs d’allégresse par l’abondance de ses dons.
Malgré ces exhortations, ils eurent beaucoup de peine à empêcher la foule d’accomplir un sacrifice en leur honneur.
Cependant, quelques Juifs, accourus d’Antioche de Pisidie et d’Iconium, réussirent à soulever la multitude dans un sens opposé. Une émeute éclata, et Paul, traîné hors de la ville par la populace furieuse, fut accablé d’une grêle de pierres et laissé pour mort sur la place. Les disciples vinrent chercher son corps ; mais Paul se leva plein de vie et partit pour Derbée le lendemain, en compagnie de Barnabé (Act. xvi, 7–19).
Tous deux, retournant ensuite sur leurs pas, visitèrent les Eglises qu’ils avaient déjà évangélisées, fortifiant partout le courage des néophytes et les exhortant à persévérer.
Après avoir traversé de nouveau la Pisidie et la Pamphilie, ils firent entendre la parole de Dieu à Pergé qu’ils n’avaient pu évangéliser à leur premier passage. Puis ils arrivèrent à Attalia, d’où ils s’embarquèrent pour rentrer à Antioche de Syrie.
Cette première mission avait duré un peu plus de quatre ans.
Premier Concile de Jérusalem. – Désaccord entre Paul et Barnabé au sujet de Jean-Marc.
Quelque temps après leur retour, Paul et Barnabé durent se rendre à Jérusalem pour assister au premier Concile que présida l’oracle de l’Eglise, l’apôtre Pierre. Dans cette auguste assemblée, les deux apôtres racontèrent publiquement les progrès surprenants que la foi faisait tous les jours parmi les Gentils. Les prodiges accomplis par leurs mains attestaient que Dieu avait pour agréable la conversion des Gentils, alors même qu’ils n’adoptaient pas les pratiques légales, et qu’on ne saurait les leur imposer. Telle fut la sentence promulguée par le Concile.
Au récit de tant de merveilles, Jean-Marc se repentit de son inconstance. Tl protesta qu’il ne quitterait plus son parent Barnabé ; de fait il le suivit à Antioche. Mais Paul avait gardé un mauvais souvenir de la défaillance de Jean-Marc. Bientôt, quand il sera question de reprendre avec Barnabé le cours de leurs missions, l’Apôtre des Gentils ne voudra plus de Marc pour compagnon.
Quelque temps, en effet, après le Concile, Paul dit à Barnabé : – Retournons visiter les frères que nous avons évangélisés.
C’était aussi le désir de Barnabé, mais il voulait emmener Jean- Marc. Paul insistait au contraire pour que celui qui les avait quittés en Pamphilie ne fût pas admis à les suivre. Il en résulta un vif désaccord entre les deux apôtres. Ni l’un ni l’autre ne crut devoir céder, et ils se séparèrent.
Dieu le permit, sans doute, pour multiplier et agrandir les champs de l’apostolat. Paul partit de son côté avec Silas et parcourut l’Asie Mineure, tandis que Barnabé, suivi de Jean-Marc, faisait voile pour l’île de Chypre.
La suite des événements donna raison à la confiance de Barnabé. Marc fut désormais fidèle et devint un ardent prédicateur de la foi. Plus tard il s’attachera à saint Pierre, qui l’amènera à Rome, lui ordonnera de mettre l’Evangile par écrit et l’enverra fonder l’Eglise d’Alexandrie. Enfin, Paul lui-même l’eut en haute estime, il le mentionne plusieurs fois avec éloge dans ses Epîtres.
Apostolat de saint Barnabé.
Les Actes des Apôtres ne nous apprennent plus rien sur la vie de Barnabé, et l’histoire documentée perd sa trace. Autant jusqu’ici nous marchions avec assurance à la lumière du récit de saint Luc, autant maintenant il faut se contenter d’aller à tâtons.
Il est très vraisemblable, assurément, que le zèle de Barnabé ne se limita pas à évangéliser l’île de Chypre. S’il s’était cantonné dans ce petit espace, au lieu d’étendre de tous côtés son action, il aurait été, parmi les apôtres, le seul de son espèce, si l’on excepte toutefois saint Jacques le Mineur, premier évêque de Jérusalem. Il est donc permis d’admettre, avec la tradition, que Barnabé sortit de Chypre, parcourut l’Egypte et l’Italie. L’Eglise de Milan se vante de l’avoir eu pour premier apôtre et l’a choisi comme patron.
Martyre de saint Barnabé.
Après avoir évangélisé divers pays, Barnabé revint à Chypre, attiré par le désir de se consacrer spécialement à ses compatriotes. Il s’établit à Salamine, capitale de l’île. Sa parole, ses exemples, ses miracles convertirent des multitudes, ce qui ne pouvait manquer de mettre les Juifs en fureur. Prévoyant la persécution, Barnabé réunit les fidèles, leur recommande la fermeté dans la foi et leur prédit sa mort prochaine. Il se rend ensuite à la synagogue, où les Juifs s’emparent de lui et le jettent dans un cachot, puis, la nuit venue, ils lui font subir divers supplices et, finalement, le lapident (11 juin 53 ou 57). Il fut enseveli secrètement par Jean-Marc dans une caverne. Le souvenir de cette cachette s’effaça avec le temps ; mais, en 488, le martyr apparut à Anthème, évêque de Salamine, et lui révéla le lieu de sa sépulture.
Son corps fut retrouvé. Sur sa poitrine reposait un exemplaire de l’Evangile de saint Matthieu en langue hébraïque, que Barnabé avait copié de sa main. Ce précieux manuscrit fut envoyé par Anthème à l’empereur Zénon qui le fit garder dans son palais et construisit un magnifique sanctuaire sur le sépulcre même de Barnabé.
Le nom de Barnabé figure aux diptyques du Canon de la messe, à la commémoraison des morts, après le nom de l’apôtre Mathias.
E. Lacoste. Sources consultées. – Actes des Apôtres, particulièrement ch. iv vers la fin ; ch. ix, 26, 27 ; ch. xi, 21–30 ; ch. xiii, xiv, xv. – Surius, 11 juin. – Mgr Duchesne, Saint Barnabé, dans les Mélanges De Rossi. – Analecta Bollandiana, 1893. – (V. S. B. P., n° 118.)
- Ac 4, 36–37.[↩]