A) État de la question
Pour contrer la société secrète (clandestinum fœdus) des modernistes infiltrée au sein même de l’Église (in sinu et gremio Ecclesiæ), saint Pie X ne se contenta pas de condamner ses erreurs, mais il voulut imposer à tous les membres de la hiérarchie catholique un serment-profession de foi antimoderniste.
En 1967, au lendemain du Concile Vatican II, le pape Paul VI supprima la formule de profession de foi tridentine et le serment antimoderniste, pour les remplacer par une nouvelle profession de foi, restant obligatoire pour tout prêtre selon les normes des canons 1406–1408. Celle-ci se réduisait à la récitation du Credo, et àune formule générale d’adhésion à la doctrine de l’Église sur la foi et les mœurs (cf DC-1967–1486).
En 1989, quelques mois après les sacres, le cardinal Ratzinger publia une nouvelle profession de foi accompagnée d’un nouveau serment, qui furent immédiatement jugés inacceptables par Mgr Lefebvre. Il faut souligner que la précédente formule de Paul VI, plus acceptable en soi, n’eut jamais cours dans la FSSPX, où l’on a toujours conservé la profession de foi et le serment édicté par saint Pie X. Ainsi, lors des ordinations de 1980, Mgr Lefebvre proclamait :
« Nous demeurons fidèles au serment antimoderniste, et on nous recevra avec ce serment dans les mains, ou alors nous resterons ce que nous sommes. » (Figaro du 30.06.1980)
Le nouveau serment néo-moderniste étant foncièrement opposé à notre serment antimoderniste, dans l’éventualité d’une reconnaissance canonique, il faut nécessairement prévoir à l’avance le très grave problème de conscience qui se posera à terme à chacun de nos prêtres. Car il est évidemment très grave de risquer de nous parjurer un jour quant au serment antimoderniste que nous avons prêté devant l’autel, la main sur l’Évangile.
Pour rester le plus objectif possible, et laisser à chacun la possibilité de former sa conscience à partir de documents sûrs et vérifiables, nous diviserons ces derniers en trois chapitres :
- Textes officiels du nouveau Code de Droit canon, dont nous extraierons les plus importants pour notre sujet.
- Citations de Mgr Lefebvre, affirmant qu’il est « impossible » d’adopter ce nouveau serment-profession de foi de 1989.
- Faits prouvant que pour le Vatican, ce serment est une (sinon « la ») condition sine qua non àtoute normalisation canonique.
Nous concluerons enfin par des considérations en rapport avec la situation actuelle (2015).
B) Extrait du nouveau code de Droit Canon (C. 833)
N.B. : Le nouveau serment étant en vigueur depuis le ler mars 1989 (cf AAS-81[1989]-105 et 1169 ; ORLF 18-04-1989), et le Nouveau Code ayant été promulgué en 1983, on ne le trouvera que dans les éditions subséquentes, au canon 833 (Texte complet français-latin en annexe infra)
[Sujets]
« sont tenus par l’obligation (obligatione) d’émettre personnellement (personaliter) la profession de foi, selon la formule approuvée par le siège apostolique : (…)
6) devant l’Ordinaire du lieu ou son délégué : les curés, le recteur et les professeurs de théologie et philosophie dans les séminaires et à leur entrée en fonction ; ceux qui doivent être promus à l’ordre du diaconat [= tout clerc ayant à exercer le sacerdoce] (…)
8) les supérieurs dans les instituts religieux cléricaux et dans les sociétés de vie apostolique cléricales, selon les constitutions. »
[Profession de foi]
« Moi, N., avec une foi inébranlable, crois et professe tout ce qui est contenu dans le symbole de la Foi, dans son ensemble ou séparément, à savoir : Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre [etc, texte du symbole de Nicée-Contantinople]
[Suit une formule d’adhésion à tous les dogmes de l’Église] (…)
De plus, avec une soumission religieuse de la volonté et de l’intelligence (religioso voluntatis et intellectus obsequio), j’adhère aux doctrines énoncées par le Pontife romain ou par le Collège des évêques, lorsqu’ils exercent le Magistère authentique (magisterium authenticum), même s’ils n’entendent pas les proclamer par un acte définitif (definitivo actu)»
[Serment de fidélité]
Moi, N., dans l’exercice de la fonction de …, je promets de toujours garder la communion avec l’Église catholique, tant dans mes prises de paroles que dans ma manière d’agir. (…)
Je suivrai et favoriserai (sequar et fovebo) la discipline commune de toute l’Église, et je maintiendrai l’observance de toutes les lois ecclésiastiques, surtout celles qui sont contenues dans le Code de Droit Canonique (earum imprimis quæ in Codice Iuris Canonici continentur).
« Je suivrai, avec une obéissance chrétienne, ce que les Pasteurs sacrés déclarent en tant que docteurs authentiques et maîtres de la foi, ou ce qu’ils établissent en tant que recteurs de l’Église ; en outre, j’offrirai fidèlement mon aide (fideliter auxilium dabo) aux évêques diocésains, afin que l’action apostolique, à exercer au nom de l’Église et sur son mandat, soit réalisée dans la communion de l’Église elle-même. Que Dieu m’aide en cela, ainsi que ces saints Évangiles de Dieu que je touche de mes mains. »
[Présentation officielle]
Le texte officiel latin de cette nouvelle profession de foi a été approuvé par Jean-Paul II le ler juillet 1988 [le même jour de l’excommunication suite aux sacres], mis en vigueur le 1er mars 1989, et publié dans l’Osservatore Romano (ORLF n°2047) du 7 mars. Sa Présentation n’est pas signée, mais l’intitulé « Congrégation pour la doctrine de la foi » et la photo vis-à-vis du cardinal Ratzinger, préfet de cette même Congrégation, indiquent sinon son rédacteur, du moins son inspirateur et responsable.
Cette présentation officielle est digne d’intérêt, car elle déclare sans ambages « l’objectif » recherché de ce nouveau serment-profession de foi : « une mise à jour du style et du contenu, pour qu’ils soient plus conformes à l’enseignement du Concile Vatican II et des documents successifs. » (ibidem, p. 11). On s’en serait douté, merci quand même de nous avoir prévenus…
C) La réaction de Mgr Lefebvre
Dans un premier temps, il semble que Mgr Lefebvre ait concédé qu’on puisse accepter à la rigueur ce nouveau serment, en y ajoutant une condition précise. Dans une lettre datée du 29 avril 1989, et cité par M. l’abbé Laroche dans Le Sel de la terre (n° 8, p. 78), il écrivait :
« Pour éviter de tomber dans le piège qui est tendu, il suffirait d’ajouter au troisième alinéa qui suit le Credo : « in quantum hoc Magisterium perfecte concordat cum Magisterio indicato in præcedentibus alineis », « pour autant que ce Magistère concorde parfaitement avec le Magistère indiqué dans les précédents alinéas ». Ainsi serait évité le risque d’approuver des doctrines contradictoires. »
Mais Mgr Lefebvre y voyait bien malgré tout « un piège », et dans toutes ses positions publiques sur cette affaire, il déclarera toujours qu’il est moralement « impossible » pour nous de souscrire à un tel engagement :
1) Sermon de la Pentecôte à Écône, le 14 mai 1989 – (Fideliter n° 222, p. 92 – Novembre-décembre 2014) :
« Voyez-vous, voici un exemple encore récent qui nous fait douter d’un retour prochain à la Tradition de ceux qui ont l’autorité à Rome actuellement : dernièrement, au début du mois de mai, a paru un décret à Rome qui inaugure une nouvelle profession de foi. Dans cette nouvelle profession de foi – qui remplace en quelque sorte le serment anti-moderniste de saint Pie X -, il y a le Credo. Pas de problème, ce Credo est celui de toujours ; aucune hésitation donc à signer cette profession de foi qu’est le Credo. Et puis viennent trois articles ; les deux premiers sont parfaitement conformes à la foi traditionnelle ; ils ne font que dire que nous sommes unis à toute la vérité qui a été proclamée par les papes au cours des conciles dogmatiques anciens.
Mais le troisième alinéa, qui est expliqué dans le préambule de cette profession de foi, demande à ceux qui le signent, d’être en accord avec le Magistère de l’Église d’aujourd’hui, c’est-à-dire avec ce que les évêques, dispersés à travers le monde et unis au pape, professent dans leur foi. Et dans ce préambule il est dit explicitement : c’est afin que tout le monde accepte ce qui a été dit et ce qui a été fait pendant le Concile et après le Concile. Voilà ! Alors, à une profession de foi qui aurait été très convenable jusqu’à ce dernier alinéa, on ajoute un alinéa qui nous met dans l’obligation d’accepter le Concile et les conséquences du Concile, qui sont contraires à ce qui est exprimé dans les alinéas précédents, qui affirment quant à eux qu’il faut adhérer à la doctrine traditionnelle de l’Église.
Et c’est précisément cette profession de foi que l’on va faire signer à tous ceux qui se sont soumis de nouveau à l’autorité romaine, évidemment, puisque cette profession de foi est destinée à être signée par tous ceux qui ont une charge quelconque et par tous ceux qui vont recevoir les ordinations. C’est une manière d’exiger désormais de tous ceux qui se sont unis de nouveau aux autorités romaines, en tous points, de se soumettre au Concile et aux conséquences du Concile.
Par conséquent, nous voyons là, la volonté de ceux qui ont actuellement l’autorité dans l’Église de nous soumettre à cet esprit du Concile, qui est un esprit moderniste, libéral, esprit qui a détruit l’Église et qui continue à la détruire. Cela, nous ne pouvons pas l’admettre ! »
2) Entretien à Fideliter, juillet 1989 (n° 70, p. 16) :
- Fideliter : « Que pensez-vous de l’instruction du cardinal Ratzinger instituant le serment de fidélité et qui comporte une profession de foi ? »
- Monseigneur : « Il y a d’abord le Credo, qui ne pose pas de problème. Il est resté intact. Le premier et le deuxième alinéas ne soulèvent pas non plus de difficultés. Ce sont des choses courantes au point de vue théologique. Mais le troisième est très mauvais. C’est pratiquement s’aligner sur ce que les évêques du monde entier pensent aujourd’hui. Dans le préambule il est d’ailleurs clairement indiqué que cet alinéa a été ajouté en raison de l’esprit du Concile. Il se réfère au Concile et au soi-disant magistère d’aujourd’hui qui est celui des conciliaires. Il aurait fallu ajouter : en tant que ce magistère est en pleine conformité avec la Tradition. Telle qu’elle est cette formule est dangereuse. Cela démontre bien l’esprit de ces gens avec lesquels il est impossible de s’entendre. C’est absolument ridicule et faux – comme certains l’ont fait – de présenter ce serment de fidélité comme une résurgence du serment antimoderniste supprimé depuis le Concile. Tout le venin est dans le troisième alinéa qui semble fait exprès pour obliger ceux qui sont ralliés à signer cette profession de foi et d’affirmer leur plein accord avec les évêques. C’est comme si au temps de l’arianisme on avait dit, maintenant vous êtes en accord avec tout ce que pensent les évêques ariens. Non je n’exagère pas, c’est clairement exprimé dans l’introduction. C’est de la fourberie. On peut se demander si l’on n’a pas voulu à Rome, corriger ainsi le texte du protocole [du 5 mai 1988]. Bien qu’il ne nous satisfasse pas, il paraît encore trop en notre faveur en l’article 3 de la déclaration doctrinale, car il n’exprime pas assez la nécessité de nous soumettre au Concile. Alors je pense qu’ils se rattrapent maintenant. Ils vont sans doute faire signer ces textes aux séminaristes de la Fraternité Saint-Pierre avant leur ordination et aux prêtres de cette Fraternité, qui vont alors se trouver dans l’obligation de faire un acte officiel de ralliement à l’Église conciliaire. A la différence du protocole, par ces nouveaux textes on se soumet au Concile et à tous les évêques conciliaires. C’est leur esprit et on ne les changera pas. »
3) Sermon du Bourget, pour ses 60 ans de sacerdoce, le 19 novembre 1989 (Fideliter n° 73, p. 120) :
- Alors, devant cette situation, il est bien certain qu’il est impossible pour nous de pouvoir avoir des contacts suivis avec Rome, parce que jusqu’à présent Rome demande que si nous recevions quoi que ce soit, quelque indult que ce soit pour la Sainte Messe, pour la liturgie, pour les séminaires, nous devrions signer la nouvelle profession de foi qui a été rédigée par le cardinal Ratzinger, au mois de février dernier. Elle contient explicitement l’acceptation du Concile et de ses conséquences.
- Il faut savoir ce que nous voulons, c’est ce Concile et ses conséquences qui ont détruit la Sainte Messe, qui ont détruit notre foi, qui ont détruit les catéchismes et le règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans les sociétés civiles. Comment pouvons-nous l’accepter ? »
4) » Itinéraire Spirituel », le 8 déc. 1989 (p. 13)
- Les erreurs du Concile et ses réformes deviennent la norme officielle consacrée par la profession de foi du cardinal Ratzinger de mars 1989. »
5) Sermon à Friedrichshafen (D), le 29 avril 1990 (Fideliter n° 76, p. 11)
- Il n’y a guère actuellement d’espoir immédiat, sinon dans la prière et dans le secours de Dieu qui viendra bien un jour, et dans la résolution que nous devons avoir de demeurer catholiques et de défendre la messe catholique. Peut-être me dira-t-on : mais Rome désormais semble accessible à permettre de dire la messe ancienne, la messe catholique, et par conséquent il ne devrait plus y avoir de problèmes pour nous. Mais, c’est là nous mettre dans une contradiction, parce que en même temps que Rome donne par exemple à la Fraternité Saint-Pierre et l’Abbaye du Barroux ( et à d’autres groupements l’autorisation de dire la messe de toujours, en même temps, ils font signer une profession de foi dans laquelle est inscrit le Concile, dans laquelle il faut admettre l’esprit du Concile. C’est une contradiction, parce que l’esprit du Concile s’exprime dans la nouvelle messe. Comment vouloir maintenir la messe de toujours, en acceptant l’esprit qui détruit cette messe de toujours ? C’est se placer dans une contradiction complète, et un jour, tout doucement, on exigera de ceux auxquels on a donné la messe de saint Pie V, la messe de toujours, qu’ils acceptent aussi la messe nouvelle, pour être conformes à ce qu’ils ont signé, puisqu’ils ont signé qu’ils acceptaient l’esprit du Concile et les réformes de Vatican II. On ne peut se mettre ainsi dans une contradiction, dans un illogisme invraisemblable. C’est une situation tout à fait inconfortable. C’est ce qui fait la difficulté pour ces groupements qui maintenant se trouvent dans une espèce d’impasse. »
6) Entretien à Fideliter, janvier 1991, soit trois mois avant sa mort (n° 79, p. 4–5)
- Fideliter : « Pensez-vous que la situation se soit encore dégradée depuis que vous aviez – avant les sacres – engagé des conversations qui avaient abouti à la rédaction du protocole du 5 mai 1988 ? »
- Monseigneur : « Oh oui ! Par exemple le fait de la profession de foi qui est maintenant réclamée par le cardinal Ratzinger depuis le début de l’année 1989, c’est un fait très grave. Car il demande à tous ceux qui se sont ralliés ou qui pourraient le faire, de faire une profession de foi dans les documents du Concile et dans les réformes post-conciliaires. Pour nous c’est impossible. Il faudra encore attendre avant d’envisager une perspective d’accord. Pour ma part, je crois que seul le Bon Dieu peut intervenir, car humainement on ne voit pas de possibilités pour Rome de redresser le courant. »
- [ Question de Fideliter, sur les ralliés qui prétendent ne rien avoir concédé sur la liturgie et la doctrine ]
- Monseigneur : « Quand ils disent qu’ils n’ont rien lâché, c’est faux. Ils ont lâché la possibilité de contrer Rome. Ils ne peuvent plus rien dire. Ils doivent se taire étant données les faveurs qui leur ont été accordées. Il leur est maintenant impossible de dénoncer les erreurs de l’Église conciliaire. Tout doucement ils adhèrent, ne serait-ce que par la profession de foi qui est demandée par le cardinal Ratzinger. »
N.B. : On aura remarqué que Mgr Lefebvre parle seulement de la nouvelle profession de foi, avec son alinéa 3 qui suit le Credo, et non du nouveau serment qui lui est joint. Sans doute parce qu’elle figurait seule, en son texte latin, dans l’Osservatore Romano édition française du 7 mars 1989, avec la présentation dont Monseigneur fait aussi mention. La traduction française de la profession de foi et du serment, approuvée par la Conférence épiscopale française, ne sera publiée par la Documentation catholique qu’après la mort de Mgr Lefebvre, dans le n° 2033 du 4–18 août 1991.
- Le Serment et le nouveau code. Nul doute qu’il n’aurait aussi critiqué ce serment, obligeant à observer et « favoriser » toutes les lois du Nouveau Code, dont il avait écrit au cardinal Ratzinger, le 17 avril 1985 : « En plusieurs points de première importance, le nouveau Code de Droit Canon est inacceptable par son opposition au magistère définitif de l’Église. » (Fideliter n°46, p. 2). Dès la publication de ce nouveau Code, il avait dit à ses séminaristes : « Ce Droit canon est inacceptable » ( COSPEC 99 B,1403–1983), et dans une lettre ouverte à Jean-Paul II, co-signée par Mgr de Castro-Mayer, il avait dénoncé publiquement « les erreurs du nouveau Droit Canon, pour ne pas dire les hérésies. » (Suppl. Fideliter de nov. déc. 1983, p. 5). Dans une retraite sacerdotale à Écône, il disait à ses prêtres, en septembre 1986 : « Ils sont en train de détruire l’Église, non par les lois particulières, mais par les lois fondamentales de ce nouveau Droit canon, qui est totalement inspiré par ce mauvais esprit moderniste qui s’est exprimé dans le Concile et après le Concile. » (Fideliter n° 55, p. 9). Il nous est donc inacceptable de jurer la main sur l’Évangile de promouvoir ce nouveau Code de lois auprès des âmes qui nous font confiance pour sauvegarder leur foi catholique et traditionnelle.
- Le Serment de 89 et les évêques. Enfin, ce serment complémentaire de la Profession de foi engage à suivre les évêques, comme les « docteurs authentiques et maîtres de la foi », et à offrir une « aide fidèle aux évêques diocésains » (fideliter auxilium dabo) ; ce qui pose un autre problème de conscience insurmontable dans les circonstances postconciliaires. Écoutons encore ce que nous a répété Mgr Lefebvre au sujet des évêques conciliaires, jusqu’à sa mort :
- Conférence de presse du 9 déc. 1983 : « Je pense qu’il y a une bonne partie des évêques qui ne sont plus catholiques. » (Fideliter n° 37, p. 13);
- Sermon du Jeudi-Saint 1986 à Écône : « Désormais, les évêques et beaucoup de prêtres n’ont plus la foi catholique. » (Fideliter n° 51, p. 2);
- Lettre du 29 janvier 1989 : « Vouloir maintenir et faire l’expérience de la Tradition sous des évêques modernistes et libéraux, c’est une utopie et un mensonge. » (Fideliter n° 68, p. 25);
- Entretien à Fideliter, juillet 1989 : « Il nous faut absolument convaincre les fidèles qu’il s’agit bien d’une manœuvre [le ralliement], que c’est un danger de se mettre entre les mains des évêques conciliaires et de la Rome moderniste, c’est le plus grand danger qui les menace. Si nous avons lutté pendant vingt ans pour éviter les erreurs conciliaires, ce n’est pas pour nous mettre maintenant dans les mains de ceux qui les professent. » (Fideliter n° 70, p. 13)
Il est donc évident pour tout prêtre qui veut poursuivre le bon combat de la foi à la suite de Mgr Lefebvre, que ce serait une folie et un parjure que de prêter ce serment post-conciliaire qui fait promettre la main sur l’Évangile de reconnaître dans les évêques diocésains des docteurs et maîtres authentiques de la vraie foi catholique, et de s’engager à les aider fidèlement dans leur nouvelle religion apostate.
- Le Serment de 89 et nos Supérieurs. Il faut aussi savoir que le Nouveau Code comporte une clause spéciale pour les Supérieurs d’Instituts religieux, leur faisant jurer de faire observer (urgebo) particulièrement le Nouveau Code, de se soumettre au magistère actuel, et de se mettre volontiers au service des évêques diocésains. (Texte complet en annexe infra).
D) Une condition sine qua non posée par le Vatican
Pour bien saisir toute l’importance de notre sujet, il ne suffit pas de savoir ce à quoi oblige le nouveau serment-profession de foi de 1989, et ce qu’en pensait Mgr Lefebvre, mais il faut bien se graver dans l’esprit que ce serment néo-moderniste est, depuis quinze ans de négociations entre la FSSPX et le Vatican, considéré par ce dernier comme une condition sine qua non à toute régularisation canonique. On peut même affirmer qu’il est la principale condition sine qua non posée par les autorités néo-modernistes, qui savent bien qu’une fois ce point acquis, tout le reste suivra.
L’expérience en a été déjà faite par les supérieurs de l’IBP, qui ont obtenu dans leurs statuts de pouvoir faire une critique « sérieuse et constructive » de Vatican II, mais qui le 23 mars 2012 se sont vus intimer par la Commission Ecclesia Dei « d’intégrer l’étude du Magistère actuel des Papes et de Vatican II » dans leurs séminaires, « en prenant pour support l’intégrité de la doctrine catholique exposée par le Catéchisme de l’Église catholique. » Mesures qui ne sont en fait qu’une application régulière du nouveau serment qu’ont dû faire ces mêmes supérieurs, se mettant ainsi en contradiction avec leurs propres statuts. On attend toujours de leur part, après une dizaine d’années de délai pour le faire, la publication de leurs travaux exposant les résultats de leur « critique sérieuse et constructive » de Vatican II …
Les autorités vaticanes sont si attachées à ce serment qui verrouille efficacement contre toute incartade au nouveau Magistère, qu’elles l’imposent fermement aux dissidents de tout bord qui demandent à revenir au bercail, comme les anglicans ou les prêtres chinois. A ces derniers par exemple, Benoît XVI a imposé de renouveler ce serment-profession de foi chaque année le Jeudi-Saint « comme témoignage de la pleine communion retrouvée. » (DC n° 2384, p. 676)
Conscients de toute l’importance de cet acte aux yeux des responsables du Vatican, nous pouvons maintenant mieux percevoir comment ils ont tenu à le poser comme condition sine qua non dans les négociations avec la FSSPX depuis l’an 2000 :
- En février 2001, Mgr Fellay présentait ainsi à ses prêtres les propositions alléchantes du cardinal Hoyos : « Rome ferait un décret, par lequel serait érigé une sorte de quasi-diocèse personnel (…). Ce serait une sorte de ratification en droit de ce que nous sommes et faisons en fait. Nous et en particulier les évêques, n’aurions rien de spécial à signer, aucune déclaration particulière, mais simplement la profession de foi que toute personne doit prononcer, en recevant une charge ecclésiastique, avec le serment de fidélité. Il s’agit bien sûr de la profession de foi et du serment de fidélité du cardinal Ratzinger, ce qui n’est pas sans poser une difficulté. » (Cor unum n° 68, pp. 1–2)
- M. l’abbé de la Rocque, dans une conférence à Nantes le 18 mai 2012, au sujet des discussions doctrinales (2009–2011) auxquelles il avait participé, affirme que dès la première rencontre, les représentants du Vatican commençaient par évoquer les conditions d’un accord pratique, et y rappelaient l’obligation de faire le serment-profession de foi de 1989 ainsi que l’acceptation du nouveau catéchisme, du nouveau Code etc…
- Le 14 septembre 2011 : « …après la trêve estivale, Mgr Fellay est convoqué par le cardinal Levada, officiellement pour évaluer ensemble les discussions doctrinales. A peine arrivé, lui a été lu le texte qu’on a appelé « le préambule doctrinal », base d’une proposition canonique (20 à 30 lignes) qui contenait : la profession de foi du cardinal Ratzinger de 1989, la profession de foi de Paul VI. Tout cela a été lu à Mgr Fellay et à ses deux assistants, et on leur a expliqué que la signature de ces documents était un préalable indispensable à toute reconnaissance canonique. » (Conférence de M. l’abbé de La Roque, ibid., CD1, piste 03)
- Le 17 juin 2012, Mgr Fellay écrivit une lettre au pape Benoît XVI demandant pourquoi le Vatican n’avait pas accepté sa Déclaration doctrinale du 15 avril, et au lieu de « remettre à plus tard la résolution des différends encore en cours sur certains points du Concile et de la réforme liturgique », avait exigé « l’acceptation totale des points litigieux avant d’aller plus loin. »
La réponse du pape, datée du 30 juin 2012, est très révélatrice et montre une fois de plus combien le serment-profession de foi qu’il a lui-même imposé au lendemain des sacres lui tient à cœur : « (…) la déclaration doctrinale en question, préparée par la Congrégation pour la doctrine de la foi ainsi que par la Commission pontificale Ecclesia Dei, et approuvée explicitement par moi avant de vous être transmise, intègre les éléments jugés indispensables pour être à même de prononcer la Profession de foi et le serment de fidélité pour assurer une charge exercée au nom de l’Église, garants de la pleine communion ecclésiale. » (Cor unum n° 104, mars 2013)
- Enfin, le 20 octobre 2014, dans un entretien à Famille chrétienne, Mgr Pozzo, de la Commission Ecclesia Dei, a rappelé que s’il y avait réintégration canonique de la FSSPX, ses prêtres devraient faire le serment-profession de foi, et que c’était obligatoire pour eux, non facultatif :
- Famille Chrétienne : « Quel est alors le point non négociable ? »
- Mgr Pozzo : « Ce qui est essentiel, ce à quoi on ne peut pas renoncer, c’est l’adhésion à la Professio fidei et au principe selon lequel c’est au seul magistère de l’Église qu’a été confié par le Seigneur la faculté d’interpréter authentiquement, c’est à dire avec l’autorité du Christ, la parole de Dieu écrite et transmise. »
Étant donné ces cinq éléments convergents et vérifiables, il est objectivement certain et indéniable que pour le Vatican, ce serment-profession de foi est une condition sine qua non, et non susceptible d’exemption ou de mitigation pour les prêtres de la Tradition qui rejoindraient les rangs de la hiérarchie officielle.
E) RAPPORT AVEC LA SITUATION ACTUELLE
La profession de notre Foi selon le Code traditionnel
Le Code de droit canonique, dans lequel saint Pie X a voulu résumer toute la sagesse disciplinaire de l’Eglise, se devait de nous préciser nos devoirs de conscience par rapport à la profession de foi catholique.
Par rapport à la Profession de foi de 1989 et de son alinéa 3, il nous faut en notre période de crise de l’Église connaître et retenir le canon 1324, qui ne concerne pas les vérités de foi définies, mais celles qui sont enseignées par le magistère du Pape et des évêques, « même s’ils n’entendent pas les proclamer par un acte définitif », pour reprendre la formule du nouveau serment. Car depuis le dogme de l’Assomption, l’ensemble des actes magistériels relèvent finalement de cette catégorie.
Voici donc le texte du canon 1324 : « Ce n’est pas assez d’éviter la perversité hérétique (hæreticam pravitatem), il faut fuir aussi avec diligence (diligenter fugare) les erreurs qui s’en rapprochent plus ou moins. »
Or depuis Vatican II inclus, nombre d’actes magistériels non infaillibles enseignent soit des hérésies (par exemple le nouveau catéchisme : » L’ancienne alliance n’a jamais été révoquée », CEC n. 121), soit des « erreurs qui s’en rapprochent plus ou moins », erreurs trop nombreuses et pour être niées, et pour être énumérées ici. La loi de l’Église nous fait donc un devoir grave de conscience de fuir ces erreurs avec diligence, et c’est ce que nous faisons concrètement en refusant depuis tant d’années la « pleine communion » avec cette hiérarchie qui veut imposer son nouveau magistère.
Ensuite, la loi de l’Église, au canon suivant, fait un autre devoir de conscience (tenentur) aux fidèles et a fortiori aux prêtres, « de professer ouvertement leur foi dans toutes les circonstances où leur silence, leurs tergiversations ou leur attitude impliqueraient (secumferrent) une négation implicite de la foi (implicitam fidei negationem). » (c. 1325 § 1)
Aujourd’hui, face aux attaques contre la foi perpétrées à la faveur de formules pernicieuses ou ambiguës du Concile, des Synodes, des encycliques, du nouveau catéchisme etc…, pour un clerc qui a reçu la grâce de connaître la véritable et traditionnelle doctrine de l’Eglise, se taire sur ces erreurs, tergiverser, adopter une attitude de possible réconciliation avec une hiérarchie qui ne professe plus la vraie foi catholique « implique une négation implicite » de cette même foi.
Le serment de 89 au regard de la loi traditionnelle de l’Église
Enfin, la loi de l’Église, au canon 1316, prescrit en conscience de ne jamais prêter aucun serment, « sinon en vérité, avec sérieux, et avec justice (praestari nequit, nisi in veritate, in judicio et in justitia) . » (c. 1316 § 1). Au Moyen Âge, on enseignait que ces trois conditions étaient les trois « compagnes » du serment. St Thomas (IIa- Ilæ, q. 89, a. 3) explique que la veritas exclut le mensonge, le judicium la légèreté, la justitia tout ce qui serait contraire au droit.
Que tout prêtre de la Tradition tenté par une « normalisation » s’examine bien sur ces trois conditions d’un serment qu’il serait nécessairement amené à prêter un jour ou l’autre (condition sine qua non pour exercer une charge dans la hiérarchie actuelle).
Qu’il ne s’imagine pas le faire avec vérité en y incluant quelque restriction mentale échappant au délégué de l’Ordinaire qui sera témoin. Qu’il ne le considère pas avec légèreté, comme une simple formalité administrative, mais bien comme une rétractation publique – même si elle est faite incognito en sacristie – de la profession de foi tridentine et du serment antimoderniste qu’il avait juré pour toujours devant Dieu.
Qu’il se pose la question s’il a le droit de poser un tel acte, dont il peut déjà mesurer certaines graves conséquences : cautionner les erreurs postconciliaires, ou au moins y consentir en gardant le silence ; accepter tous les articles du nouveau code, et les faire observer par ses fidèles ; se soumettre à l’évêque du lieu dans ce qu’il enseignera, commandera, (par exemple, d’assister ou même concélébrer à la Messe chrismale…) et cela non de manière passive, mais avec « une fidèle assistance » …
Le serment de 89 exclut actuellement une solution canonique
Quant aux prêtres opposés à toute forme de ralliement, à la suite de Mgr Lefebvre, ils comprendront bien, qu’il est impossible non seulement de prêter un jour un tel serment, mais aussi du fait même qu” « il est bien certain qu’il est impossible pour nous de pouvoir avoir des contacts suivis avec Rome » en vue d’un accord en de telles conditions. C’était évident en 1989 pour les quatre évêques, le Supérieur général et les prêtres présents, quand leur fondateur prêchait cela devant eux au Bourget, mais c’est oublié – pour ne pas dire occulté – depuis le Jubilé de l’an 2000…
Que l’on maintienne des discussions doctrinales avec le Vatican pour défendre la foi traditionnelle, à l’exemple de Mgr Lefebvre et ses dubia, très bien, nous faisons notre devoir en temps d’apostasie générale. Mais que l’on se donne dans ces contacts suivis une feuille de route dont le terminus est une solution canonique, une normalisation canonique, une reconnaissance canonique dont on sait qu’elle obligera de facto à prêter ce serment canonique et à se parjurer, cela ne peut que poser un grave problème de conscience à tout prêtre plus soucieux des principes que de ses intérêts.
Nulle autorité ne peut imposer un tel serment
Problème de conscience qui n’est pas nouveau dans la crise de l’Église : obéir aux supérieurs et compromettre notre foi avec celle des autres, ou leur désobéir pour continuer le bon combat de la foi ? La réponse reste la même que celle de Mgr Lefebvre après sa condamnation en 1975 : « Dans le cas de tout ordre comportant un danger de corruption de la foi et des mœurs, la « désobéissance » est un devoir grave. » (Fideliter n° 11, p. 58). Dans la situation présente, « tout ordre » doit se traduire par : toute disposition venant des supérieurs et qui nous obligerait à poser un acte personnel, en l’occurrence : ce serment de 89.
Le 23 septembre 2014, Mgr Fellay et ses deux assistants ont rencontré à Rome le cardinal Müller et les responsables de la Commission Ecclesia Dei (Mgr di Noïa et Mgr Pozzo). Le communiqué officiel publié par le Vatican concluait ainsi : « Les parties, qui ont examiné certaines questions d’ordre doctrinal et canonique, ont convenu de procéder par paliers mais dans un délai raisonnable vers le dépassement des difficultés. Et ce dans la perspective désirée d’une pleine réconciliation. » Communiqué non démenti par Menzingen.
D’ores et déjà, nous devons prévoir deux sortes de dispositions venant des Supérieurs aboutissant à la « pleine réconciliation » qui entraînera ce serment : soit un accord bipartite, du style de la Déclaration doctrinale du 15 avril 2012 (qui admettait le nouveau serment-profession de foi dans une discrète note en bas de page), soit une reconnaissance unilatérale « sans rien signer », du style de celle proposée par le cardinal Hoyos début 2001, mais qui poserait l’incontournable condition sine qua non du serment de 89.
Reconnaissance unilatérale et serment
C’est cette dernière formule qui semble la plus probable, étant la plus facile à faire accepter psychologiquement par les prêtres et les fidèles de la Tradition. Cette hypothèse n’est pas du domaine de la fiction. On en parle ouvertement. Elle semble avantageuse aux deux parties : du côté de la FSSPX, les supérieurs pourront arguer qu’on n’a rien signé, que c’est ce que Mgr Lefebvre a toujours demandé, que rien n’a changé pour nous et qu’on continue toujours le même combat. Du côté romain, on paraîtra tolérant, miséricordieux envers les « sans-papiers » et prêt à se porter vers les périphéries.
D’ailleurs le mot « accords » sonne mal à bien des oreilles, et il apparaît proscrit du vocabulaire dans la Fraternité ; même Dom Gérard (Lettre aux amis du monastère n° 52) et les prêtres de Campos lui préféraient le terme de « reconnaissance ». Quand ces derniers envoyèrent leur lettre de ralliement à Jean-Paul II, le 15 août 2001, leur requête était bien expressive : « Nous avons toujours considéré être dans l’Église catholique (…) cependant juridiquement nous avons été considérés comme vivant en marge de l’Eglise. Voici donc notre demande : que nous soyons acceptés et reconnus comme catholiques. » (cf Sel de la Terre n° 40, p. 153).
A comparer avec la conférence de Mgr Fellay le 28-12-2012 à New Hambourg (Canada) : « Je n’ai absolument aucune idée de quand un accord se fera, et le terme accord ne convient pas : mais ce sera une reconnaissance, une normalisation [agreement is not the right word : but recognition, normalization]. Nous avons un droit à être étiquetés catholiques car nous le sommes. » (source internet Cathinfo et You Tube).
Qu’il nous soit permis ici de poser une distinction : être étiquetés catholiques par la hiérarchie néo-moderniste est une chose, et déjà acquise. Mgr Perl déclarait à la presse le 12-10-1997 : « Personne ne nie qu’ils sont catholiques. » (cf. Fideliter n° 120, p. 64). Ethuit ans plus tard, le cardinal Hoyos à la TV italienne : « Ils sont à l’intérieur de l’Eglise » (13–11-2005).
Plus récemment, ce fut la reconnaissance administrative de la FSSPX en Argentine, qui a amené Mgr Pozzo à déclarer à Rome : « Il ne s’agit pas d’une reconnaissance juridique de la FSSPX comme société cléricale. La question de la légitimité de l’exercice du ministère sacerdotal de leurs prêtres reste ouverte. L’archevêque de Buenos Aires a reconnu que ses membres sont catholiques, même si pas encore en pleine communion avec Rome. » (La Croix du 13-04-2015).
Mais accepter d’être intégrés officiellement à cette même hiérarchie néo-moderniste, par le biais d’une « normalisation » canonique sous couvert d’une simple « reconnaissance », est tout à fait autre chose, et dans son principe, et dans ses conséquences. Dont la plus patente, comme nous l’avons longuement exposé, est la condition sine qua non du serment-profession de foi à cette nouvelle religion néo-moderniste. Car le sens du mot reconnaissance a bien été précisé par Mgr Pozzo : une reconnaissance officielle de la FSSPX « comme société cléricale » sera une « reconnaissance juridique ».
Ce serment doit être considéré absolument comme un parjure à notre serment anti-moderniste, auquel Mgr Lefebvre nous a tant recommandé la fidélité :
« Vous prononcez des serments, eh bien vous ne pouvez pas être à la fois fidèles à ces serments et accepter tout ce qui se dit et tout ce qui se fait depuis le Concile. Ce n’est pas possible. » (Conf. Écône 8-06-1978, COSPEC 59 B).
Moment du non possumus
Le jour où le Vatican lancera son opération « main tendue », en proposant aux prêtres de la Tradition catholique une « reconnaissance » officielle (et normalisation canonique), ceux-ci devraient être bien conscients de toutes ces choses, du péril imminent que court leur Foi, et du non possumus que leur conscience sacerdotale doit témoigner alors publiquement. Si leurs Supérieurs acceptaient – ce qu’à Dieu ne plaise – cette reconnaissance juridique, ils perdraient de facto la justification de leur juridiction de suppléance sur leurs sujets.
Ceux-ci s’étaient engagés solennellement dans un Institut non rallié, et parce qu’il était non rallié. Du jour où leur Institut devient rallié, même sous le titre coloré d’une simple « reconnaissance » acceptée officiellement, vis-à-vis de la hiérarchie néo-moderniste, ils deviennent libres de leurs liens sacrés avec lui.
Ce jour-là sera vraiment le jour de la volonté de Dieu, non pas celui de leur impatience ou de leur volonté propre, qui choisirait d’elle-même le moment de partir, mais celui fixé par la Providence. Car vouloir rester malgré tout, ce serait alors se mettre en occasion prochaine de pécher gravement contre la foi, cautionner une manœuvre subversive pour la Tradition catholique, et y entraîner les fidèles qui nous font confiance.
En attendant, veillons et prions, avertissons-nous mutuellement de cette menace réelle pour notre foi, ce qui est un devoir de charité entre confrères, et de justice pour les Supérieurs envers leurs sujets. Si notre conscience sacerdotale se refuse absolument à prêter un tel serment, elle se doit aussi de refuser d’obéir à des Supérieurs qui l’accepteraient, s’obligeant ainsi à imposer à leurs sujets le nouveau Magistère, le nouveau Code etc… Entretenons en nous et dans les autres le feu sacré du bon combat de la Foi, et restons confiants dans la divine Providence.
Que les Saints Cœurs de Jésus et de Marie nous soutiennent en ces temps troublés que traversent l’Église et la Tradition.
Capucins de Morgon – Juin 2015
Annexes 1 et 2
1 – Texte complet, latin-français, du serment-profession de foi de 1989. Source : Montréal, 1990, avec traduction approuvée par la conférence épiscopale des évêques du Canada. (p. 491–493)
Can. 883 – Obligatione emittendi personaliter professionem fidei, secundum formulam a Sede Apostolica probatam, tenetur : 1° coram praeside eiusve delegato, omnes qui Concilio Oecumenico vel particulari, synodo Episcoporum atque synodo dioecesana intersunt cum voto sive deliberativo sive consultivo ; praeses autem coram Concilio aut synodo ; 2° promoti ad cardinalitiam dignitatem iuxta sacri Collegii statuta ; 3° coram delegato ab Apostolica Sede, onmes promoti ad episcopatum, itemque qui Episcopo dioecesano aequiparantur ; 4° coram collegio consultorum, Administrator dioecesanus ; 5° coram Episcopo dloecesano eiusve delegato, Vicarii generales et Vicarii episcopales necnon Vicarii iudiciales ; 6° coram loci Ordinarlo eiusve delegato, parochi, rector, magistri theologiae et philosophiae in seminariis, initio suscepti muneris ; promovendi ad ordinem diaconatus ; 7° coram Magno Cancellario eoque deficiente coram Ordinario loci eorumve delagatis, rector universitatis ecclesiasticae vel catholicae, initio suscepti muneris ; coram rectore, si sit sacerdos, vel coram loci Ordinario eorumve delagatis, docentes qui disciplinas ad fidem vel mores pertinentes in quibusvis universitatibus tradunt, initio suscepti muneris ; 8°Superiores in institutis religiosis et societatibus vitae apostolicae clericalibus, ad normam constitutionum. « Ergo N. firma fide credo et profiteor omnia et singula quæ continentur in Symbolo fidei, videlicet : « Credo in unum Deum Patrem omnipotentem, factorem coeli et terræ, visibilium omnium et invisibilium et in unum Dominum Jesum Christum, Filium Dei unigenitum, et ex Patre natum ante omnia sæcula, Deum de Deo, lumen de lumine, Deum verum de Deo vero, genitum non factum, consubstantialem Patri per quem omnia facta sunt, qui propter nos homines et propter nostram salutem descendit de cœlis, et incarnatus est de Spiritu Sancto, ex Maria Virgine, et homo factus est ; crucifixus etiam pro nobis sub Pontio Pilato, passus et sepultus est ; et resurrexit tertia die secundum Scripturas, et ascendit in coelum, sedet ad dexteram Patris, et iterum venturus est cum gloria iudicare vivos et mortuos, cuius regni non erit finis ; et in Spiritum Sanctum Dominum et vivificantem, qui ex Patre Filioque procedit ; qui cum Patre et Filio simul adoratur et conglorificatur ; qui locutus est per Prophetas ; et unam sanctam catholicam et apostolicam Ecclesiam. Confiteor unum baptisma in remissionem peccatorum, et expecto resurrectionem mortuorum, et vitam venturi sæculi. Amen. « Firma fide quoque credo ea omnia quæ in verbo Del scripto vel tradito continentur et ab Ecclesia sive sollemni iudicio sive ordinario et universali Magisterio tamquam divinitus revelata credenda proponuntur. « Firmiter etiam amplector ac retineo omnia et singula quæ circa doctrinam de fide vel moribus ab eadem definitive proponuntur. « Insuper religioso voluntatis et intellectus obsequio doctrinis adhæreo quas sive Romanus Pontifex sive Collegium episcoporum enuntiant cum Magisterium authenticum exercent etsi non definitivo actu easdem proclamare intendant. » | Can. 833 – Sont tenus par l’obligation d’émettre personnellement la profession de foi, selon la formule approuvée par le Siège Apostolique : 1° devant le président ou son délégué, tous ceux qui participent avec voix délibérative ou consultative à un Concile Œcuménique ou particulier, au synode des Évêques ou au synode diocésain ; quant au président, il émet cette profession devant le Concile ou le synode ; 2° ceux qui sont promus à la dignité cardi¬nalice, selon les statuts du sacré Collège ; 3° devant le délégué du Siège Apostolique, tous ceux qui sont promus à l’épiscopat, ainsi que ceux qui sont équiparés à l’Évêque diocésain ; 4° devant le collège des consulteurs, l’Administrateur diocésain ; 5° devant l’Évêque diocésain ou son délégué, les Vicaires généraux, épiscopaux et judiciaires ; 6° devant l’Ordinaire du lieu ou son délégué, les curés, le recteur et les professeurs de théologie et de philosophie dans les séminaires, à leur entrée en fonction ; ceux qui doivent être promus à l’Ordre du diaconat ; 7° devant le Grand Chancelier ou, à son défaut, devant l’Ordinaire du lieu ou leurs délégués, le recteur d’une université ecclé¬siastique ou catholique à son entrée en fonction ; devant le recteur, s’il est prêtre, ou devant l’Ordinaire du lieu ou leurs délégués, les enseignants des disciplines concernant la foi et la morale dans les universités, à leur entrée en fonction ; 8° les Supérieurs dans les instituts religieux cléricaux et dans les sociétés de vie apostolique cléricales, selon les constitutions. « Moi … avec une foi inébranlable, crois et professe tout ce qui est contenu dans le Symbole de la Foi, dans son ensemble ou séparément, à savoir : « Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible, je crois en un seul Seigneur, Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles : il est Dieu, né de Dieu, lumière, née de la lumière, vrai Dieu, né du vrai Dieu, engendré, non pas créé, de même nature que le Père ; par lui tout a été fait. Pour nous les hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel ; par l’Esprit Saint il a pris chair de la Vierge Marie, il s’est fait homme. Crucifié pour nous sous Ponce Pilate, il souffrit sa passion et fut mis au tombeau. Il ressuscita le troisième jour, conformément aux Écritures, et il monta au ciel, il est assis à la droite du Père. Il reviendra dans la gloire, pour juger les vivants et les morts ; et son règne n’aura pas de fin. Je crois en l’Esprit Saint, qui est Seigneur et qui donne la vie ; il procède du Père et du Fils ; avec le Père et le Fils, il reçoit même adoration et même gloire ; il a parlé par les prophètes. Je crois en l’Église, une sainte, catholique et apostolique. Je reconnais un seul baptême pour le pardon des péchés, J’attends la résurrection des morts, et la vie du monde à venir. Amen. « Avec une foi inébranlable, je crois aussi à tout ce qui est contenu ou transmis dans la parole de Dieu, et à tout ce qui est proposé par l’Église pour être cru comme divinement révélé, que ce soit par un jugement solennel ou par un magistère ordinaire et universel « J’embrasse aussi fermement et retiens pour vrai tout ce qui concerne la doctrine de la foi ou la morale et est proposé par cette même doctrine de façon définitive. « Tout particulièrement avec un respect religieux de la volonté et de l’intellect, j’adhère aux doctrines énoncées par le Pontife Romain ou par le Collège des Évêques lorsqu’ils exercent le magistère authentique, même s’ils n’entendent pas les proclamer par un acte définitif ». |
2 – Comme document « complémentaire de la profession de foi » la Congr. pour la doctrine de la foi a publié une formule de serment de fidélité en vigueur à partir du 01-03-1989 (AAS 81 (1989) 106 et 1169). Jusqu’à cette date, cette obligation n’atteignait que les prêtres promus à l’épiscopat (c. 389) ; à partir du 01-03-1989, la Congr. pour la doctrine de la foi l’étend aux personnes énumérées au c. 833, 5°-8°; ce serment est prêté à l’occasion de la réception de l’une ou l’autre des charges mentionnées dans le canon :
« Ego N. in suscipiendo officio promitto me cum catholica Ecclesia communionem semper servaturum, sive verbis a me prolatis, sive mea agendi ratione. tement. « Magna cum diligentia et fidelitate onera explebo quibus teneor erga Ecclesiam, tum universam, tum particularem, in qua ad meum servitium, secundum iuris præscripta, exercendum vocatus sum. « ln munere meo adimplendo, quod Ecclesiæ nomine mihi commissum est, fidei depositum integrum servabo, fideliter tradam et illustrabo ; quascumque igitur doctrinas iisdem contrarias devitabo. « Disciplinam cunctæ Ecclesiæ communem sequar et fovebo observantiamque cunctarum legum ecclesiasti¬carum, earum imprimis quæ in Codice luris Canonici continentur, serbavo. « Christiana obœdientia prosequar quæ sacri Pastores, tamquam authentici fidei doctores et magistri declarant aut tamquam Ecclesiæ rectores statuunt, atque Episcopis diœcesanis fideliter auxilium dabo, ut actio apostolica, nomine et mandato Ecclesiæ exercenda, in eiusdem Ecclesiæ communione peragatur. « Sic me Deus adiuvet et sancta Dei Evangelia, quæ manibus meis tango ». | « Moi _dans l’exercice de la fonction … promets de rester toujours en communion avec l’Église catholique, que ce soit en paroles, ou dans mon comportement. Avec diligence et fidélité extrêmes, j’accomplirai les devoirs auxquels je suis tenu envers l’Église universelle et particulière, où je suis appelé à exercer mon service selon les prescriptions du droit. « Dans l’exercice de la fonction qui m’est confiée au nom de l’Église, je conserverai intègre, je transmettrai fidèlement et j’illustrerai le dépôt de la foi ; j’éviterai donc toute doctrine qui soit contraire à celui-ci. « Je suivrai et promouvrai la discipline commune de toute l’Église et l’observance de toutes les lois ecclésiastiques, j’observerai surtout celles qui sont conte¬nues dans le Code de Droit canonique. « Je suivrai, avec une obéissance chrétienne, ce que les Pasteurs sacrés déclarent en tant que docteurs authen¬tiques et maîtres de la foi, ou ce qu’ils établissent en tant que recteurs de l’Eglise ; en outre, j’offrirai fidèlement mon aide aux évêques diocésains, afin que l’action apostolique, à exercer au nom de l’Eglise et sur son mandat, soit réalisée dans la communion de l’Eglise elle-même. « Que Dieu m’aide, ainsi que les saints Evangiles de Dieu que je touche de mes mains ». |
Le texte des par. 4–5 du serment de fidélité à prononcer par les personnes visées par le c. 833, 8e est le suivant :
« Disciplinam cunctae Ecclesiae communem fovebo observantiamque cunctarum legum ecclesiasticarum urgebo, earum imprimis quæ in Codice luris Canonici continentur . « Christiana obœdientia prosequar quæ sacri Pastores, tamquam authentici fidei doctores et magistri declarant, aut tamquam Ecclesiæ rectores statuunt, atque cum Episcopis diœcesanis libenter operam dabo, ut actio apostolica, nomine et mandato Ecclesiæ exercenda, salvi indole et fine mei Instituti, in eiusdem Ecclesiæ communione peragatu ». | « Je promouvrai la discipline commune de toute l’Eglise et je solliciterai l’observance de toutes les lois ecclésiastiques, surtout celles qui sont contenues dans le Code de Droit canonique. « Je suivrai, avec une obéissance chrétienne, ce que les Pasteurs sacrés déclarent en tant que docteurs authen¬tiques et maîtres de la fol, ou ce qu’ils établissent en tant que recteurs de l’Église ; en outre, je me mettrai volontiers au service des évêques diocésains, afin que l’action apostolique, à exercer au nom de l’Église et sur son mandat, préserve la nature et le but de mon institut, et soit réalisée dans la communion de l’Eglise elle-même ». |