Jésuite, martyr au Canada (1593–1649)
Fête le 26 septembre.
De tous les missionnaires du Canada, saint Jean de Brébeuf est certainement le plus célèbre. On le regarde avec raison comme le fondateur de la mission des Hurons, mais les remarquables travaux de son court apostolat sont largement dépassés par l’héroïsme de son épouvantable martyre.
Jean de Brébeuf naquit, en la belle fête de l’Annonciation, le 25 mars 1593, en Basse-Normandie, à Condé-sur-Vire, aujourd’hui au diocèse de Coutances, autrefois au diocèse de Bayeux. Sa famille était noble, ancienne et possédait un fief sur cette paroisse. On distingue parmi ses membres : René-Joseph de Brébeuf, seigneur de Mauperthuis et de La Lande, qui fit partie de l’assemblée du Bailliage de Coutances en 1789, et surtout le poète Guillaume de Brébeuf, auteur de la Pharsale et neveu du missionnaire.
Vocation religieuse.
On ne sait rien sur les premières années de Jean de Brébeuf. Il est à croire qu’elles s’écoulèrent dans sa ville natale, au milieu des siens. Mais on ignore le lieu de ses études et l’on ne sait pas davantage le genre d’occupations auxquelles il se livra jusqu’à vingt-quatre ans. Alors seulement nous retrouvons ses traces, au moment où, le 8 novembre 1617, il frappe à la porte du noviciat des Jésuites, à Rouen.
Son humilité, qui se fût contentée du dernier rang, l’avait poussé à se croire indigne du sacerdoce ; en conséquence, il demanda à rester parmi les Frères coadjuteurs : mais ses supérieurs en jugèrent autrement et réussirent à le faire changer d’avis. En sortant du noviciat, en 1619, le Fr. de Brébeuf fut nommé au collège de Rouen pour y faire une classe de grammaire à quelques pauvres écoliers.
Il y rencontra le P. Binet, supérieur, qui eut sur lui une heureuse influence. Le futur apôtre se dévoua sans réserve à ces âmes d’enfants et son dévouement l’emporta vite sur ses forces. Au bout de deux ans, sa santé s’étant affaiblie, il dut abandonner l’enseignement. Jean de Brébeuf profita de ce repos forcé pour se livrer aux études théologiques ; il reçut le sous-diaconat le 25 décembre 1622, et, le 25 mars 1623, jour anniversaire de sa naissance, il eut le bonheur d’être ordonné prêtre à Rouen même.
Comme sa forte santé avait repris sa vigueur première, on lui confia la Procure du collège où, pendant trois ans, il se fit remarquer par ses solides qualités. Il était judicieux, droit, énergique, patient et d’une endurance peu commune. « Je suis un vrai bœuf », disait-il en jouant sur son nom. La confiance qu’il inspirait par sa sagesse et sa prudence lui valut d’être envoyé à Paris, au mois de janvier 1625, pour y remplir une mission fort délicate : il s’agissait de disculper les Jésuites de Rouen d’une accusation abominable imaginée par de haineux criminels. Sa fidélité à suivre la règle faisait l’édification de toute la communauté. Seulement, il avait soif de souffrir pour le Christ et il songeait aux missions étrangères. Comme la Compagnie de Jésus s’apprêtait à fonder la mission de la Nouvelle-France, il demanda à partir. Ses supérieurs accédèrent à son désir.
Premier voyage au Canada.
A cette époque, le Canada était définitivement français, mais les couleurs de France ne flottaient que le long du Saint-Laurent et n’y abritaient que des établissements naissants. Québec se réduisait à quelques cabanes défendues par un retranchement palissadé. Champlain, lieutenant général au Canada, comprit que le catholicisme serait le rempart le plus ferme de cette colonie au berceau, et, en 1615, il appela les Franciscains Récollets.
Ces religieux se mirent aussitôt à l’œuvre, mais, au bout de quelques années, ils réclamèrent des aides. La Compagnie de Jésus répondit à leur appel, et, le 24 avril 1625, sous la conduite du P. Joseph de La Roche d’Aillon, Récollet, six Jésuites s’embarquèrent à Dieppe pour la Nouvelle-France : c’étaient le P. Charles Lalemant, supérieur, ancien recteur du célèbre collège de Clermont, à Paris, et qui compta un frère et un neveu parmi les apôtres de l’Amérique du Nord ; le P. Ennemond Massé, ancien ministre au collège de La Flèche ; le P. Jean de Brébeuf et trois Frères coadjuteurs. Ils arrivèrent à Québec le 19 juin. Un terrain fut concédé aux nouveaux venus dans le fort Jacques-Cartier ; ils en prirent possession le 23 septembre 1625 en y élevant une grande croix ; ce lieu devint plus tard la résidence de Notre-Dame des Anges.
Entre temps, le P. de Brébeuf, employé d’abord auprès des colons français, était désigné pour la mission des Hurons ; cette peuplade devait être par la suite amie du peuple colonisateur et la plus accessible au catholicisme. Mais il n’en fut pas toujours ainsi. En compagnie du P. Joseph de La Roche d’Aillon, le P. de Brébeuf remonta le Saint-Laurent pour se rendre à destination ; mais le meurtre du P. Vial, assassiné par des Hurons après deux ans de séjour chez eux, arrêta les missionnaires en route et les força à rebrousser chemin. Le 28 juillet, l’arrivée à Québec de représentants de ces mêmes tribus réveilla le désir du P. de Brébeuf d’aller les évangéliser. Leur flottille de cent quarante canots portait sept cents hommes. Ils venaient pour faire leur trafic de fourrure et de pelleteries. Les pressantes démarches de Champlain pour leur procurer des missionnaires ne purent aboutir sur l’heure.
Le serviteur de Dieu reçut alors l’ordre de s’adjoindre à quelques sauvages d’une autre tribu, celle des Algonquins, et de les suivre en chasse pendant tout l’hiver, ce qui serait une excellente école pour le familiariser avec leurs coutumes et leur langue. Sept mois durant, il partagea leur vie, supportant leurs fatigues et leurs incessantes privations, dans la neige et dans les forêts. Quand le missionnaire revint à Notre-Dame des Anges, le 27 mai 1646, il brûlait plus que jamais du désir de se consacrer à l’apostolat missionnaire ; le pays huron l’attirait tout particulièrement.
Premier séjour chez les Hurons. – Retour en France.
Lorsque revint la saison des échanges, Champlain envoya trois missionnaires au Comptoir des Trois-Rivières pour partir avec les Hurons. La proposition fut bien reçue, cette fois, mais un petit incident faillit retarder le départ du P. de Brébeuf. Ce dernier, avec sa haute taille et sa forte corpulence, donnait des inquiétudes au patron du canot : « Tu es trop lourd, lui disait-il, tu vas nous faire chavirer. » On calma ses craintes par de beaux présents.
Le P. de Brébeuf débarqua avec ses compagnons près d’Ihonatiria. Aussitôt les Hurons le reconnurent et lui prouvèrent, avec de grands cris, la joie qu’ils éprouvaient à le revoir. Ils se mirent immédiatement en devoir de lui construire une case. Le P. de Brébeuf nous en donne la description dans une lettre :
Je ne saurais mieux expliquer la façon des demeures huronnes qu’en les comparant à des berceaux ou tonnelles de jardin et de verdure. Quelques-unes sont couvertes d’écorces de cèdre, quelques autres de grosses écorces de frêne, d’orme, de sapin ou de prusse. Il y en a de différentes grandeurs, les unes de deux brasses en longueur, d’autres de dix, d’autres de vingt, de quarante. La largeur ordinaire est d’environ quatre brasses, la hauteur est presque pareille. Il n’y a point d’étage. Il ne s’y voit ni cave, ni chambre, ni grenier. Pour fenêtre et cheminée, on laisse un méchant trou par où s’échappe la fumée.
Sans aucun compagnon, car les deux autres missionnaires avaient dû rentrer à Québec au bout de peu de temps, Jean de Brébeuf s’empressa d’organiser sa vie, il visitait les sauvages, s’entretenait avec eux, leur rendant des services, baptisait les enfants en danger de mort, soignait les malades et, à leurs derniers moments, les mettait dans la disposition de recevoir le baptême. Auprès des adultes, il avait beau se dépenser de mille manières, il n’arrivait pas à secouer leur insouciance. Il composa « en langage canadais » un petit catéchisme qui fut plus tard très utile pour les conversions.
La conquête du Canada par les Anglais le ramena en France. Il y demeura trois ans, partie au collège de Rouen, partie au collège d’Eu, en qualité de procureur. Il prononça ses derniers vœux à Rouen le 30 janvier 1630. Son journal spirituel nous fait connaître la ferveur de son âme qui tient à s’immoler davantage par amour pour Jésus-Christ.
Deuxième mission chez les Hurons.
Le traité de Saint-Germain-en-Laye, en 1631, rétablit la mission des Jésuites au Canada. De retour à Québec le 23 mai 1633, le P. de Brébeuf avait eu le bonheur de baptiser un enfant algonquin qui mourut à une lieue de Québec. Mais c’était surtout chez les Hurons qu’il désirait retourner. Un groupe arrivait à Québec au mois de juillet 1633, puis s’en retournait sans missionnaire. Une autre fois, il vint au-devant de plusieurs d’entre eux jusqu’à Trois-Rivières, accompagné des PP. Antoine Daniel, né à Dieppe, et Davost. Les sauvages laissèrent les missionnaires vers le village de Toanché. De là ils se dirigèrent vers Ihonatiria. L’arrivée du P. de Brébeuf avait été accueillie par des cris de joie : « Te voilà, Echou ! (C’est ainsi qu’ils appelaient le missionnaire.) Nous t’attendons depuis si longtemps, nous voilà contents. » Chacun voulait l’abriter sous son toit. Les trois Jésuites préférèrent une cabane pour eux seuls. Cette cabane fut dédiée à saint Joseph. Les sauvages venaient leur rendre visite ; ils semblaient curieux de voir fonctionner le moulin et d’entendre sonner l’horloge, qu’ils appelaient « le capitaine du jour ». Les missionnaires réunissaient les enfants du village : la séance s’ouvrait par le Pater, mis en vers hurons ; venait ensuite le signe de la croix, puis l’explication des prières et des commandements.
Parfois aussi les Pères groupaient les anciens du village chez eux. Dans la conversation, on arrivait vite aux vérités chrétiennes. Ces indigènes écoutaient et répondaient de temps à autre un « très bien » ou « cela doit être vrai », mais ils avaient soin d’ajouter : « Cela doit être bon pour les Français, nous sommes un autre peuple et nous avons d’autres coutumes. » Cette année-là, le P. de Brébeuf put baptiser cinq ou six adultes et beaucoup d’enfants en danger de mort.
La jeunesse, la portion choisie du troupeau chrétien en tout temps et en tout lieu, réclamait particulièrement l’attention des Pères qui espéraient former plus tard une bonne chrétienté. Pour les préserver de l’exemple pernicieux de la famille, le P. de Brébeuf conçut l’idée de fonder une sorte de Séminaire huron à Québec ; cette entreprise, malheureusement, ne réussit pas. A cette peine vint s’ajouter une nouvelle épreuve. Une épidémie faillit compromettre leur ministère. En septembre, la maladie s’abattit sur les membres de la petite communauté. Lorsqu’ils se rétablirent, la maladie se propagea dans la tribu. Les Indiens accusèrent aussitôt « les robes noires » d’être venues chez eux pour les perdre ; mais les missionnaires surent vite prouver leur innocence. Chacun se dévoua dans le village à soigner les malades. Le P. de Brébeuf gagna la confiance et ouvrit le ciel aux moribonds. Il réussit à conférer le baptême solennel à un adulte qui jouissait d’une grande considération dans le pays.
Comme l’épidémie avait en partie décimé le village d’Ihonatiria, le P. de Brébeuf alla fonder un nouveau poste à Ossossané où les habitants désiraient sa venue ; seulement, les sorciers ameutèrent la population contre lui. Elle était décidée à lui faire un mauvais sort : « Si quelque jeune guerrier voulait bien vous casser la tête, murmura un vieux chef à l’oreille du missionnaire, au sortir d’une assemblée, nous n’aurions rien à dire. » Comme il rentrait à la résidence, un sauvage frappé d’un coup de hache, tomba mort à ses pieds. Le Père crut qu’on s’était trompé de victime. Chaque jour il s’attendait à être massacré. Dans la lettre qu’il écrivit à son supérieur, le P. Le Jeune, tout en lui faisant ses adieux, il s’abandonnait entièrement entre les mains de la Providence.
La tempête se calma peu à peu ; le serviteur de Dieu profita de cette accalmie pour transférer à Teanaustasié le poste d’Ihonatiria. Ce nouveau poste fut aussi dédié à saint Joseph. C’est à cette même mission de Saint-Joseph qu’appartenait le P. Antoine Daniel. Le 4 juillet 1648, ce religieux fut tué par les Iroquois sur le seuil d’une chapelle, au moment où il venait de célébrer le Saint Sacrifice.
Le martyre.
Cette mort était pour le P. de Brébeuf un avertissement. Mais Dieu ménagea des consolations nombreuses à son messager. La grâce fécondait le sol qu’il avait arrosé de ses sueurs et de ses larmes. Jamais le nombre des baptêmes n’avait été aussi considérable ; jamais les néophytes ne s’étaient montrés plus fervents. La foi portait ses fruits. Quand le P. de Brébeuf était arrivé au pays des Hurons, il n’y avait pas trouvé un seul chrétien. A sa mort, on en comptait environ 8 000. Les missionnaires furent obligés de se disperser pour répondre aux besoins des âmes. Jean de Brébeuf vint au poste de Saint-Ignace qui se distinguait par sa ferveur. C’est là qu’il allait cueillir la palme du martyre.
Les Iroquois, tribu voisine, avaient en haine la tribu des Hurons et les Français ses alliés. Aussi méprisaient-ils les hommes blancs et se flattaient-ils d’anéantir les uns et les autres et tout particulièrement « les robes noires » dont l’enseignement condamnait leurs superstitions.
Le 16 mars 1649, les Iroquois arrivèrent de nuit à la frontière de la mission. La première station était celle de Saint-Ignace ; ils y pénétrèrent au point du jour. Tous les Hurons furent pris et massacrés. Le P. Jean de Brébeuf et avec lui le P. Gabriel Lalemant, neveu de son premier supérieur, s’étaient réfugiés à Saint-Louis. Ce village fut également assiégé et, après une héroïque résistance, tomba aux mains de l’ennemi. Un éclair de joie féroce brilla sur le visage des Iroquois lorsqu’ils virent deux missionnaires parmi les prisonniers. Ils les ramenèrent à Saint-Ignace, après leur avoir ôté leurs vêtements et arraché les ongles.
Le P. de Brébeuf allait être supplicié le premier. Quand il vit le lieu de son martyre, il se mit à genoux et baisa le poteau qui allait être l’autel de son sacrifice. La cruauté des bourreaux ne fut surpassée que par l’héroïque intrépidité de leur victime. Les uns enfonçaient dans sa chair des pointes de fer rougies au feu ; d’autres lui appliquaient des charbons embrasés sur les différentes parties du corps. Ceux-ci le frappaient avec des bâtons ; ceux-là lui enlevaient des lambeaux de chair qu’ils dévoraient.
Comme la victime du Calvaire, l’homme de Dieu ne fit entendre aucune plainte. S’il paraissait insensible à ses souffrances, il ne l’était pas devant celles de ses frères. Il rompait le silence pour louer Dieu et donner quelque parole d’encouragement à ses compagnons. Cette liberté de langage irrita ses bourreaux. Pour l’arrêter ils lui enfoncèrent dans la bouche des charbons enflammés, lui coupèrent les lèvres et les narines, laissant à découvert toutes les dents. Les cruels Iroquois lui disaient : « Tu as répété aux autres que plus on souffrait dans cette vie, plus la récompense serait grande dans l’autre. Nous voulons embellir ta couronne. » Et alors, faisant rougir leurs haches au feu, ils les lui appliquèrent sur les épaules comme un collier et ajoutèrent avec dérision : « Tu dois nous remercier maintenant. » Parmi les bourreaux il y avait quelques Hurons apostats qui voulurent faire une imitation sacrilège du baptême. Plusieurs fois ils lui versèrent sur la tête et les épaules de l’eau bouillante en disant : « Nous te baptisons pour que tu sois bienheureux dans le ciel ; car sans un bon baptême on ne peut pas être sauvé. » Ensuite on lui entoura les reins d’une ceinture d’écorce de bouleau enduite de résine et on y mit le feu. La vue du sang, loin de calmer les bourreaux, les avait rendus plus furieux. Ils lui arrachèrent la chevelure avec la peau de la tête et jetèrent des cendres brûlantes sur les plaies. Enfin, après trois heures de tourments, un coup de hache acheva la victime qui eut la tête tranchée. C’était le 16 mars 1649. La férocité des sauvages n’était pas encore satisfaite : un chef arracha le cœur du martyr et le dévora, puis les restes du corps mutilé furent coupés par morceaux et partagés à la foule.
La nuit suivante, ce fut le tour du P. Gabriel Lalemant. Avant la fin de la même année 1649, le 7 décembre, étaient encore massacrés les PP. Charles Garnier, de Paris, et Noël Chabanel, de Siaugues (Haute-Loire).
Un groupe de huit martyrs. – Reliques et culte.
Trois jours après la mort des PP. Jean de Brébeuf et Gabriel Lallemant, une inexplicable panique mettait en fuite les Iroquois qui rentrèrent dans leurs forêts. Les Pères, accourus de Sainte-Marie, purent reconnaître les restes des deux témoins du Christ. Ils les recueillirent comme un trésor inestimable et les transportèrent eu 1650 à Québec où on les garda pieusement. La famille de Brébeuf offrit un reliquaire pour y enfermer le crâne de son glorieux parent. Ce reliquaire est surmonté d’un buste en argent de l’illustre martyr ; il est conservé par les religieuses Augustines hospitalières de Québec. En 1652, l’archevêque de Rouen, qui avait juridiction sur la Nouvelle-France, ouvrit le procès de béatification ; plusieurs guérisons à la suite d’application des reliques furent signalées dès le xviie siècle ; une autre devait être reconnue en 1905 par un médecin protestant.
Pendant plus de deux cents ans, on se contenta d’admirer les vertus et le courage de ces martyrs et de leurs compagnons mis à mort vers le même temps en des missions voisines, dont plusieurs sur le sol actuel des Etats-Unis. On conserva pieusement leurs restes, mais l’enquête si bien commencée et poursuivie n’arrivait pas à faire aboutir la cause de béatification. Les événements qui bouleversèrent la France et le Canada expliquent suffisamment cette apparente négligence.
L’église Saint-Gerbold, à Venoix, près de Caen, abritait avant la Révolution le tombeau de trois Brébeuf : le poète de la Pharsale, le frère de celui-ci, mort curé de Venoix, et leur mère. Sur ce tombeau fut placée en 1691 une inscription latine gravée sur le marbre, et dont les dernières lignes rappelaient le souvenir du martyr. Le texte de cette inscription a été rétabli en 1875 dans l’église paroissiale reconstruite au XIXe siècle.
En 1884, le troisième concile plénier de Baltimore, puis, deux ans plus tard, le septième concile provincial de Québec firent des démarches en Cour de Rome pour obtenir la béatification des héroïques missionnaires. La même année, on entreprit l’érection d’une église commémorative à Waubaushene, dans l’Ontario. En 1904, l’archevêque de Québec commença le procès préliminaire ; en 1909, le concile canadien de Québec adressa au Pape Pie X une supplique qui aboutit à un décret favorable de la S. Congrégation des Rites en mars 1912, et, le 9 août 1916, Benoît XV signait l’introduction de la cause. Enfin le 2 juin 1925 Pie XI publiait à la fois le décret affirmant le martyre et le décret de tuto, et le 21 juin suivant, avait lieu à Saint-Pierre de Rome la béatification de huit missionnaires du nouveau continent : Jean de Brébeuf et quatre autres missionnaires en pays canadien : Gabriel Lalemant, Antoine Daniel, Charles Garnier, Noël Chabanel, plus trois martyrs mis à mort aux Etats-Unis : Isaac Jogues, d’Orléans, tué d’un coup de hache le 18 octobre 1646 ; René Goupil, d’Angers, « donné » aux missions puis profès coadjuteur Jésuite, tué d’un coup de hachette le 29 septembre 1642 ; Jean de La Lande, de Dieppe, simple « donné », successeur du précédent au service du P. Isaac Jogues, avec qui il mourut.
La cause de ces huit bienheureux fut reprise dès le 24 novembre 1925, et, le 29 juin 1930, Pie XI plaçait solennellement au rang des Saints ces martyrs français et fixait leur fête au 26 septembre.
La joie du Canada pour la canonisation de ces missionnaires venus de France a été très vive : le Saint-Père a reçu des télégrammes du premier ministre de la province de Québec, du maire de Québec, ainsi que des Hurons de Lorette.
A.-Ch. D.
Sources consultées. – P. Martin, S. J., Hurons et Iroquois, Le P. Jean de Brébeuf, sa vie, ses travaux, son martyre (Paris, 1898). – P. Henri Fouqueray, S. J., Martyrs du Canada, ouvrage publié par le P. Alain de Becdelièvre (Paris, 1930). – P. Frédéric Rouvier, Le P. Jean de Brébeuf, de la Compagnie de Jésus, premier apôtre des Hurons, (Lille, 1890). – E. Chardavoine, Annuaire pontifical catholique de 1926 et de 1931 (Paris, Bonne Presse).