Disciple de saint Paul, premier évêque d’Éphèse et martyr (26 ?-97 ?).
Fête le 24 janvier.
Version courte
Saint Timothée était né en Lycaonie, dans la ville de Lystres, qui fut évangélisée par saint Paul. Le passage du grand Apôtre fut la cause de la conversion de Timothée et de sa famille. Plus tard, quand Paul revint à Lystres, il remarqua Timothée et résolut de se l’associer dans l’apostolat, malgré sa jeunesse. L’admirable jeune homme sacrifia avec joie toutes les espérances terrestres et consentit à quitter sa famille pour se donner entièrement à Dieu et supporter toutes les fatigues et toutes les persécutions de la vie apostolique. Dès lors on peut voir Timothée partout à côté de saint Paul, et à la confiance de l’un répond le dévouement de l’autre.
Après la mort de saint Paul, Timothée, qui avait été préposé par son maître à l’Église d’Éphèse, eut la consolation d’y vivre en l’amitié et la présence du disciple bien-aimé de Jésus, l’Apôtre saint Jean.
Un jour que les Éphésiens célébraient par des orgies une des fêtes de leur déesse Diane, le saint évêque d’Éphèse, indigné, se jette au milieu de ce peuple insensé, lui représente la folie de sa conduite et l’invite à se convertir au christianisme ; mais il est entouré par des furieux, accablé de coups de pierres et de massues et laissé pour mort. Ses disciples le relèvent et le transportent dans le voisinage, où il expire bientôt dans leurs bras et rejoint dans la gloire son maître saint Paul.
L’Église honore en lui l’un des plus célèbres et des plus saints disciples des Apôtres.
Abbé L. Jaud, Vie des Saints pour tous les jours de l’année, Tours, Mame, 1950
Version longue
Au cours de l’année 46, probablement, deux hommes de physionomies bien différentes franchissaient un jour les portes de Lystra, ancienne ville de la Lycaonie Galatique, dont les ruines se trouvent, croit-on, aux environs de Khatoun-Seraï ou de Zoldera, sur l’un des plateaux du Taurus, en Asie Mineure. L’un, de noble et belle prestance, s’appelait Barnabé ; l’autre, chauve, petit, presque laid de visage, était Paul, l’apôtre des Gentils. Chassés d’Iconium (aujourd’hui Koniah) par la persécution, ils venaient de parcourir péniblement les 40 kilomètres qui séparaient les deux villes, soutenus par l’espérance de trouver dans la population de Lystra, encore presque entièrement païenne, des âmes bien disposées, parce que neuves, à recevoir la Bonne Nouvelle.
Première rencontre de saint Timothée avec saint Paul.
La Providence les servit à souhait. A peine arrivés, ils rencontrèrent une famille juive, qui était peut-être, comme Origène semble l’insinuer, apparentée avec saint Paul. Trois personnes seulement la composaient : une aïeule vénérable, nommée Lois, sa fille Eunice et le fils de celle-ci, appelé Timothée. Lois et Eunice observaient fidèlement la loi de Moïse, et Paul en est lui-même le garant lorsque, parvenu au terme de sa carrière, il rappelle (II Tim. 1, 5) « la foi sincère qui habitait dans leurs cœurs ». Quant à Timothée, dont le nom signifie « celui qui honore Dieu », il était alors dans la fleur de l’âge et comptait une vingtaine d’années, puisque, environ cinq ans plus tard, l’Apôtre, revenant à Lystra, le trouva, quoique bien jeune, en état d’être élevé au sacerdoce. Par condescendance pour son époux, qui était païen, Eunice n’avait point fait circoncire son enfant huit jours après sa naissance, comme l’aurait voulu la loi mosaïque ; elle en avait néanmoins surveillé l’éducation avec le plus grand soin et, au témoignage de saint Paul (II Tim. 1, 5), l’avait nourri des Saintes Ecritures dès l’âge le plus tendre. On comprend que les enseignements de Paul, tombant sur un terrain si bien préparé, ne pouvaient produire que des fruits aussi excellents qu’abondants ; bientôt, Lois, Eunice et Timothée embrassèrent la foi chrétienne et furent baptisés.
Un événement extraordinaire devait, peu de temps après, empêcher saint Paul de continuer son œuvre auprès de cette famille privilégiée et des autres habitants de Lystra, qui avaient aussi en grand nombre accueilli la parole de Dieu. Un jour, Paul prêchait. Parmi ses auditeurs, il aperçoit un homme qui, paralysé dès sa naissance, n’avait jamais pu faire usage de ses jambes. Il le regarde et lui commande : « Lève-toi droit sur tes pieds ! » Aussitôt le paralytique obéit ; il se lève, saute et marche, comme s’il n’avait jamais été infirme. A cette vue, la foule éclate en transports d’enthousiasme. Pour elle, Paul et Barnabé sont des dieux : on va offrir un sacrifice en leur honneur. Les deux apôtres eurent toutes les peines du monde à empêcher cet hommage sacrilège. Les habitants de Lystra cédèrent cependant à leurs objurgations ; ils se retirèrent, mais en gardant une vive rancune à l’égard de Paul et de Barnabé. Quelques jours après, ils assaillirent à coups de pierres Paul qui passait dans la rue et le laissèrent pour mort. L’Apôtre put cependant se relever et se retirer chez Eunice. Il y passa la nuit, y fut soigné de ses blessures et put dès le lendemain quitter la ville. Avant de partir, il recommanda à cette sainte femme de développer dans le cœur de son fils la divine semence qu’il y avait déposée ; Eunice devait s’acquitter pleinement de cette délicate mission.
Vocation de saint Timothée à l’apostolat. – Son ordination.
Lorsque cinq ans plus tard, vraisemblablement en l’an 52, saint Paul revint à Lystra, une de ses premières visites fut pour Eunice, qui lui offrit, sans doute, une généreuse hospitalité. Il retrouva Timothée dans toute la force et la grâce de ses quelques vingt-cinq ans. Le jeune homme avait merveilleusement profité des leçons maternelles, comme aussi des dons naturels et surnaturels que Dieu, qui voulait en faire son prêtre et son apôtre, lui avait prodigués. De fait, ses compatriotes eux mêmes avaient remarqué ses qualités et ses vertus, tous en faisaient le plus juste éloge.
Paul eut aussitôt l’impression que Dieu, suivant l’expression de saint Jean Chrysostome, allait « lui rendre en Timothée ce qu’il lui avait enlevé par la retraite de Barnabé ». Il eut comme l’intuition qu’il trouverait en ce jeune homme si bien doué un ami avec lequel il ne ferait qu’un cœur et qu’une âme et pour lequel il pourrait avoir l’affection d’un père à l’égard de son fils. Il se mit donc à en étudier les dispositions et les aptitudes, puis, ayant reçu de Dieu, semble-t-il, une révélation à ce sujet, il lui fit part de son projet et lui proposa de l’associer à ses courses apostoliques. Bien que timide de son naturel et d’une santé plutôt chétive, Timothée accepta les offres de saint Paul. Le cœur de l’Apôtre tressaillit d’allégresse, mais il voulut cependant attendre, réfléchir encore, s’entourer de toutes les précautions ; il alla à Iconium et emmena son disciple avec lui. Dans cette ville, il recueillit les mêmes témoignages en faveur de l’élu. Alors, il n’hésita plus et il lui imposa les mains en présence du Collège presbytéral. A ce moment solennel, la grâce descendit abondante dans l’âme du nouveau prêtre, une grâce spéciale, dont saint Paul eut révélation (I Tim. IV, 14) et que plus tard il rappellera à Timothée, en le conjurant de la ressusciter en lui.
Sa circoncision. – Il accompagne saint Paul en Galatie.
Ordonné prêtre, Timothée reçut de son maître la mission de prêcher l’Evangile. Toutefois, fils d’un père païen, il n’avait jamais reçu l’initiation judaïque de la circoncision. Cette situation pouvait compromettre gravement le succès de son apostolat auprès des Juifs, qui n’auraient consenti que très difficilement à reconnaître l’autorité d’un incirconcis. Dans cette conjoncture délicate, Paul fit preuve d’un esprit pratique et d’une condescendance remarquable. Personnellement, il était d’avis que la circoncision ne pouvait être imposée aux païens qui embrassaient le christianisme, et il avait fait prévaloir sa thèse à l’assemblée de Jérusalem ; mais il admettait aussi qu’il n’était pas défendu d’y soumettre ceux qui y consentaient de leur plein gré. Il crut que dans le cas de Timothée il valait mieux faire une concession aux idées du jour ; prenant donc à part son jeune disciple (Act. XVI, 3), il le circoncit. Timothée comprit parfaitement les raisons de sagesse et de prudence qu’avait son maître, et avec une humilité admirable il se soumit à cette douloureuse cérémonie, afin d’assurer le succès de son ministère.
Tout obstacle étant ainsi levé, Paul jugea bon, au dire de saint Jean Chrysostome, de conférer à son disciple la dignité épiscopale. Avec la plénitude du sacerdoce, Timothée reçut le pouvoir de gouverner l’Eglise et même le don des miracles ; dès lors, sa vie se confondra, pendant plus de dix ans, avec celle de saint Paul.
Accompagnés de Silas, les deux missionnaires quittèrent alors Iconium, traversèrent la Phrygie et gagnèrent la Galatie proprement dite. La prédication de Paul et de Timothée dans cette région présente, pour les Français, un intérêt tout particulier ; les Galates descendaient, en effet, de ces Celtes ou Gaulois qui, au IIIème siècle avant Jésus-Christ, avaient envahi l’Asie Mineure et s’y étaient établis entre la Phrygie, la Cappadoce, la Bithynie et le Pont. De leur origine, ils avaient gardé au physique une blonde chevelure, des yeux bleus ; au moral, un esprit vif, une fougue irrésistible dans le premier élan, une incorrigible légèreté, une extrême mobilité d’âme. Paul et Timothée convertirent un grand nombre de Galates et organisèrent dans le pays diverses communautés bientôt florissantes. Les succès obtenus durant cette première mission furent pour le disciple de l’Apôtre un encouragement précieux ; il devait toutefois faire bientôt la triste expérience que dans la vie apostolique il y a souvent des déboires. Trois ou quatre ans s’étaient à peine écoulés, que les inconstants Galates se mettaient à écouter de faux docteurs et que Paul était obligé de leur écrire une lettre véhémente pour les adjurer de rester fidèles à la doctrine qu’il leur avait enseignée lui-même.
Première mission en Macédoine et en Grèce.
En quittant la Galatie, Paul et Timothée se dirigèrent vers la Mysie avec l’intention de visiter l’Asie proconsulaire, où s’élevaient de grandes villes telles qu’Ephèse et Smyrne, mais l’Esprit-Saint ne le permit pas (Act. XVI, 6). Paul résolut alors de passer en Bithynie ; un nouvel avertissement du ciel le fit renoncer à son projet. Prenant donc la route du Nord-Ouest et traversant la Mysie, les deux voyageurs descendirent les pentes de l’Ida, atteignirent les champs où fut Troie, les plaines qu’arrosent le Simoïs et le Scamandre, et arrivèrent à Troas, sur les bords de la mer. Dans le port d’où, treize cents ans plus tôt, Enée fuyant sa patrie en flammes était parti pour chercher un refuge en Italie, de nombreux vaisseaux étaient à l’ancre. Sur lequel d’entre eux prendre passage ? Paul se posait la question, la Providence se chargea de la réponse. Une nuit, tandis qu’il reposait, un homme lui apparut et lui dit : « Viens en Macédoine, à notre secours. » (Act. XVI, 9.) Au matin, l’Apôtre se mit à la recherche d’un navire en partance pour cette contrée et s’y embarqua. Après avoir fait relâche à Samothrace, les missionnaires débarquèrent le lendemain à Néapolis, l’actuelle Cavala, puis, s’engageant dans la montagne, ils arrivèrent à Philippes.
C’est à Philippes que Timothée éprouva la première grande douleur de sa carrière apostolique : il dut, en effet, s’y séparer de son maître. Le succès le plus éclatant avait couronné les efforts de Paul et de ses auxiliaires, mais ces succès mêmes avaient allumé la colère de Juifs fanatiques, réfractaires à la lumière évangélique. Dénoncé aux autorités civiles, mis en prison, puis délivré miraculeusement, Paul dut quitter la ville. Avant de partir, il se décida à un grand sacrifice et demanda à Timothée de rester à Philippes pour y continuer son œuvre. Pour la première fois le jeune missionnaire allait vivre loin de Paul ; sa timidité s’en effraya. Il dut cependant se résigner, s’acquitta de sa mission avec tout le zèle dont il était capable et y éprouva probablement de véritables consolations. Les Philippiens, qui restèrent toujours particulièrement chers au cœur de saint Paul, méritèrent dès ce moment, on peut le croire, les félicitations que l’Apôtre leur adressa, lorsque vers la fin de sa vie il les louait de leur obéissance et les appelait « sa joie et sa couronne » (Philipp. II, 12 ; IV, 1).
Au sortir de Philippes, Paul s’était dirigé vers Thessalonique, l’actuelle Salonique, puis il était allé à Bérée ; Timothée put l’y rejoindre. Mais peu après, l’Apôtre, ayant été obligé de quitter Bérée, se rendit à Athènes ; il y fit aussitôt venir son disciple. Cette réunion ne devait pas être de longue durée. Bientôt, en effet. Paul recevait de mauvaises nouvelles de Thessalonique, où les fidèles se trouvaient en butte à toutes sortes de vexations et de persécutions. Empêché d’aller lui-même les consoler dans leurs épreuves et les fortifier dans la foi, il jugea ne pouvoir mieux faire que de leur envoyer Timothée à sa place. Celui-ci se montra de nouveau digne de cette confiance ; il remplit sa mission avec succès, puis il se hâta de retourner auprès de Paul. L’Apôtre n’était plus à Athènes. Après quelques semaines il était venu s’installer à Corinthe ; c’est là que Timothée le retrouva. Au retour de son bien-aimé disciple, Paul s’empressa d’envoyer aux Thessaloniciens une première lettre pour les féliciter de leur courage et de leur persévérance, et, peu de temps après, il leur en adressa une seconde pour les éclairer sur divers points de doctrine et de morale ; en tête de ces deux lettres, il voulut que le nom de Timothée figurât à la suite du sien.
Saint Timothée accompagne saint Paul à Jérusalem. – Nouvelles missions en Macédoine et en Grèce.
Maître et disciple séjournèrent à Corinthe un an et demi environ. Au printemps de l’an 55, Paul décida d’aller à Jérusalem pour les fêtes de Pâques ou de Pentecôte, on ne sait au juste ; Timothée l’accompagna. Après quelques jours passés à Ephèse, ils arrivèrent à Césarée de Palestine et de là s’acheminèrent vers la Ville Sainte.
Quel ne fut pas le bonheur de Timothée, en foulant pour la première fois la terre sacrée où le Sauveur avait accompli l’œuvre de notre rédemption et qu’il avait arrosée de son sang divin ! C’est évidemment avec un cœur rempli d’amour et de reconnaissance qu’il visita Bethléem, le Cénacle, la grotte de l’Agonie, le Calvaire, le mont des Oliviers. Quelle ne fut pas sa joie de converser avec Pierre, le chef de l’Eglise, avec Jean, le disciple bien-aimé, avec Jacques, le frère du Seigneur ! Il y vit peut-être aussi tous les autres apôtres. En effet, si c’est vraiment à lui que Denys l’Aréopagite a adressé son livre Des noms divins, il les rencontra tous réunis alors pour assister, comme le veut la tradition, au bienheureux trépas de la sainte Mère de Dieu et il aurait été lui-même témoin de ce glorieux événement.
Il dut cependant s’arracher bientôt, trop tôt à son gré à toutes ces émotions inoubliables. Au bout de quelques semaines, de quelques jours peut-être, Paul lui annonça qu’il fallait partir et entreprendre de nouvelles courses apostoliques. Le voyage dura quatre ans. L’Apôtre des nations revit la plupart des chrétientés qu’il avait précédemment fondées, demeura trois ans à Ephèse et poussa jusqu’en Illyrie, d’où il revint à Jérusalem. A Lystra, Timothée put embrasser, avec quelle tendresse on le devine, sa pieuse mère. D’Ephèse, saint Paul le chargea d’une double mission. Certains abus s’étaient glissés parmi les chrétiens de Corinthe. Paul jugea que dans la circonstance il convenait de remédier au mal par la bonté plutôt que par la rigueur. Il confia donc à son disciple, dont il connaissait le caractère calme et indulgent, le soin de cette affaire, et il l’envoya à Corinthe. Toutefois, il lui prescrivit de passer par la Macédoine et d’y recueillir les offrandes destinées aux chrétiens de Jérusalem. Aussi, lorsque le jeune missionnaire arriva en Grèce, une lettre de Paul l’y avait précédé, où l’Apôtre recommandait aux Corinthiens de lui faire bon accueil. La situation s’était d’ailleurs améliorée et Timothée put bientôt rejoindre son maître en Macédoine, peut-être à Philippes. C’est de là, d’après M. Fillion, que Paul écrivit aux Corinthiens une seconde lettre, dans laquelle nous retrouvons le nom de Timothée à la suite de celui de saint Paul.
Deuxième voyage à Jérusalem. – A Rome.
Vers la fin de l’an 58, Paul vint à Corinthe et il y demeura trois mois. Son intention était d’y prendre la mer au commencement de l’année suivante et d’aller à Jérusalem pour les fêtes de Pentecôte. Au dernier moment, il dut modifier ses projets et remonta en Macédoine pour s’y embarquer. Toutefois, sur son ordre, Timothée et quelques autres compagnons prirent un chemin plus court et allèrent l’attendre à Troas. De là, on fit voile pour Milet, où l’on resta quelque temps, et finalement tous débarquèrent à Ptolémaïs. Le reste de la route se fit à pied.
A Jérusalem, une cruelle épreuve vint bientôt fournir à Timothée l’occasion de témoigner à son maître son dévouement et son affection. Traqué par les Juifs et dénoncé à l’autorité civile, Paul fut enfermé dans la forteresse, puis conduit à Césarée devant le gouverneur de la Judée pour les Romains. Sans aucun doute, Timothée fit alors tout ce qui lui fut humainement possible pour soutenir et consoler le captif à César, fut embarqué pour Rome ; il y arriva au printemps de 62. Timothée fut-il du voyage ? Les Actes ne le nomment pas expressément parmi les disciples qui accompagnèrent saint Paul. En tout cas, s’il ne partit pas avec lui, il le rejoignit sans trop tarder, puisque nous voyons son nom à la suite de celui de son maître en tête des Epîtres aux Colossiens, aux Philippiens et à Philémon, qui furent écrites de Rome, vers l’an 65. En s’appuyant sur l’Epître aux Hébreux (XIII, 23), certains commentateurs ont même pensé qu’il y fut arrêté et mis en prison. Quoi qu’il en soit, Paul ayant été libéré partit au commencement de 64 pour l’Espagne, d’où repassant par l’Italie il retourna en Asie. Rien ne permet de dire que Timothée revint directement en Asie ; il est, au contraire, tout naturel de supposer que Paul le prit, comme d’habitude, pour compagnon de voyage
Saint Timothée évêque d’Ephèse. – Son martyre.
En retournant en Asie, Paul s’arrêta à Ephèse. Il y prit une grave détermination. Sentant approcher la fin de sa carrière, il voulut pourvoir au gouvernement définitif des chrétientés qu’il avait fondées. Faisant donc taire ses sentiments personnels, il confia à son disciple préféré la direction permanente des chrétiens d’Ephèse et l’institua premier évêque de cette ville. Timothée pouvait alors avoir une quarantaine d’années ; il dut se résigner à accepter la lourde charge qui lui était imposée, mais ce ne fut pas sans verser d’abondantes larmes qu’il se sépara de son maître. Celui-ci d’ailleurs ne devait pas le laisser complètement livré à lui-même. Un an plus tard, il lui écrivait de Macédoine une première lettre ; quelque temps après, il retournait le voir à Ephèse ; enfin, la dernière année de sa vie, il lui adressait de sa prison de Rome une seconde lettre. Dans toutes ces occasions, il se montra pour son disciple plein de tendresse et de sollicitude, lui donnant les conseils les plus détaillés pour la bonne administration de son Eglise, les avis les plus paternels relativement à sa vie privée et même au soin de sa santé ! Cette affection ne se démentit jamais jusqu’au dernier jour : Paul eût voulu le revoir avant de mourir, et dans sa seconde lettre, il lui en témoigne le désir, en l’invitant à venir à Rome. Timothée put-il répondre à cette invitation ? Nous ne savons. Ce qui est hors de doute, c’est que lorsque, au courant de l’été 67, il apprit la mort de son cher maître, il en ressentit la plus vive douleur.
Les relations que Timothée entretint dans la suite avec saint Jean atténuèrent du moins son affliction et le soutinrent dans ses difficultés. L’apôtre de la charité avait, en effet, établi à Ephèse sa résidence habituelle et il exerçait sa juridiction apostolique sur toute l’Asie Mineure. Timothée ne manqua pas d’en profiter ; il eut certainement avec lui des entretiens répétés et usa largement de ses conseils. De son côté Jean s’y prêta volontiers et c’est peut-être au disciple de Paul, comme plusieurs l’ont supposé, qu’il adressa dans l’Apocalypse (II, 2–5) ces paroles à la fois louangeuses et sévères :
Je connais les œuvres, les travaux, la patience ! Je sais que tu ne peux supporter les méchants ; que tu as éprouvé ceux qui se disent apôtres et ne le sont pas, et que tu les as trouvés menteurs ; que tu as de la patience, que tu as eu à supporter pour mon nom, et que tu ne t’es point lassé. Mais j’ai contre toi que tu t’es relâché de ton premier amour. Souviens-toi donc d’où tu es tombé, repens-toi et reviens à tes premières œuvres ; sinon, je viendrai à toi, et j’ôterai ton chandelier de sa place, à moins que tu ne te repentes. Pourtant tu as eu la faveur que tu hais les œuvres des nicolaïtes, œuvres que moi aussi je hais.
Quoi qu’il en soit, si Timothée avait perdu quelque peu de sa ferveur première, il répara une infidélité passagère, d’ailleurs bien explicable, par une mort héroïque.
En l’an 97, à ce que l’on croit, les habitants d’Ephèse célébraient les fêtes de Diane, leur grande divinité. Le 22 janvier, ils avaient organisé une procession en l’honneur de la déesse et s’y livraient, comme chaque année, à des excès de tous genres. Timothée se porta à la rencontre du cortège pour essayer de l’arrêter. Mais la populace exaspérée se jeta sur le pontife, le frappa à coups de pierres et de massues et le traîna, sanglant, à travers les rues de la ville. Les chrétiens parvinrent à le relever et ils le transportèrent sur une colline voisine, où bientôt après il rendit le dernier soupir.
Les reliques de saint Timothée ont été transportées à Constantinople au IVème siècle, avec celles de saint André, et déposées dans la basilique des Saints-Apôtres, le 24 juin 356, et le Martyrologe Romain en fait, mémoire au 9 mai. Sa fête, fixée dans l’Eglise latine au 24 janvier, a été élevée par Pie IX au rite double le 18 mai 1854.
Th. Vettard. Sources consultées. – Actes des Apôtres. – Epîtres de saint Paul à Timothée. – Fillion, la Sainte Bible commentée (1888–1904). – Vigouroux, Manuel biblique (Paris, 1879). – Abbé Fouard, Saint Paul, ses missions (Paris, 12e éd., 1914). – Emilh Baumann, Saint Paul (Paris, 1926). – (V. S. B. P., n° 484.)
Source : Un saint pour chaque jour du mois, 1re série, La Bonne Presse