Sainte Reine

Sainte Reine

Vierge et mar­tyre (236–251)

Fête le 7 septembre.

Alise-​Sainte-​Reine, l’antique et fameuse Alésia, aujourd’hui bour­gade de la Côte‑d’Or, à douze kilo­mètres au nord-​est de Semur, n’a pas vu dans ses murs les seuls com­bats du héros gau­lois, Vercingétorix. Sainte Reine sou­tint dans cette ville, à laquelle elle a don­né son nom, une de ces luttes qui font vérita­blement hon­neur à l’humanité régé­né­rée dans le sang de son Dieu, et elle y rem­por­ta une vic­toire plus durable que celle de César.

Jeunesse de sainte Reine.

On sait com­bien fut ter­rible, mal­gré son peu de durée, la persé­cution du farouche Dèce. Le mou­ve­ment qu’il lui impri­ma fut tel que, deux ans après sa mort, les chré­tiens étaient encore tra­qués sur tous les points de l’empire.

En 251, le pré­fet des Gaules, Olybrius, arri­vant au pied de la mon­tagne d’Alise, au lieu qu’on appelle aujourd’hui Les Trois-​Ormeaux, fut frap­pé par la vue d’une jeune fille d’une rare beau­té. Le gou­ver­neur for­ma le des­sein de l’épouser et sans autre forme de pro­cès il com­man­da son arrestation.

Reine — tel était le nom de la jeune fille — était née à Alise vers 236. Son père, nom­mé Clément, comp­tait par­mi les plus grands sei­gneurs du pays, et mani­fes­tait un vif atta­che­ment à l’idolâtrie. L’histoire est muette sur le nom de sa mère qui mou­rut en met­tant au monde la future Sainte. Celle-​ci fut confiée à une nour­rice dont un des pre­miers soins fut de lui faire admi­nis­trer le bap­tême. Lorsque plus tard, Clément apprit la chose, il entra dans une si vio­lente colère qu’oubliant les sen­ti­ments de la nature, il chas­sa Reine de sa mai­son, avec défense d’y ren­trer jamais.

Olybrius, pré­fet des Gaules, aper­çoit une jeune fille d’une rare beau­té et forme le des­sein de l’épouser.

L’humble bergère. — Son arrestation.

Reine retour­na auprès de sa nour­rice. A son école elle apprit à croître chaque jour dans l’amour de Dieu. D’un recueille­ment pro­fond, d’une modes­tie angé­lique, elle s’éprit bien­tôt de la beau­té céleste du divin Epoux des âmes : un jour elle se jeta à genoux et lui don­na tout son cœur.

L’humilité, gar­dienne des autres ver­tus et sur­tout de la pure­té, n’était pas moins admi­rable dans cette âme de choix. L’occupation de cette noble patri­cienne était de conduire aux champs les trou­peaux de sa nour­rice, qui per­met­tait plu­tôt cet emploi à sa ver­tu qu’à sa condi­tion. Elle pré­fé­rait les charmes de la soli­tude aux plus déli­cates com­pa­gnies d’Alise, parce qu’elle y conver­sait plus à l’aise avec son Dieu. Là, elle avait tout le temps de faire orai­son, de s’exciter au mépris d’un monde qui passe, pour ne s’attacher qu’aux biens éter­nels. Elle s’y délec­tait sur­tout de la lec­ture de la vie des mar­tyrs ; l’exemple de ces cou­ra­geux ath­lètes de la foi l’en­flammait du désir de don­ner son sang pour son divin Epoux.

Ses vœux furent exau­cés. Suivant sa pieuse habi­tude, Reine menait paître ses trou­peaux à la cam­pagne, quand Olybrius appro­chait d’Alise. On la sai­sit sur un mot du gou­ver­neur. La vierge, qui soup­çonne quelque des­sein infâme, lève les yeux au ciel et adresse au Seigneur cette ardente prière : « Ah ! mon Sauveur ! vous êtes l’Epoux des âmes chastes et le pro­tec­teur des vierges ; souffrirez-​vous qu’un homme cor­rompe ma fidé­li­té, et triomphe de la fai­blesse de mon âge et de mon sexe au pré­ju­dice du sacri­fice que je vous ai fait de mon âme et de mon corps ? Ne per­met­tez pas, mon Dieu, que l’on me fasse cette injure et que l’on m’enlève un tré­sor dont je ne suis que la dépo­si­taire ; accordez-​moi la grâce de mou­rir plu­tôt que de le perdre ! Cette mort me ren­dra double­ment votre épouse, et comme vierge et comme martyre. »

Premier interrogatoire. — Fermeté de sainte Reine.

On emmène la vierge aux pieds d’Olybrius.

— Ta race, jeune fille ? demande le tyran.
— Je suis de race noble.
— Ton nom ?
— Je m’appelle Reine.
— Ta pro­fes­sion ?
— J’adore la Très Sainte Trinité.
— Tu portes donc le nom de ce Galiléen ou Nazaréen ?…
— Oui, je suis chré­tienne, et je demande à Jésus-​Christ de me regar­der et de me pro­té­ger comme sa servante.

Olybrius com­prend qu’il per­dra son temps à essayer de séduire une âme si fer­me­ment chré­tienne. Aussi va-​t-​il chan­ger de tac­tique et ten­ter par tous les moyens de l’amener à l’apostasie. En atten­dant, il fait mettre la vierge sous bonne garde, se pro­met­tant de l’interroger le len­de­main, devant tout le public d’Alise, sans doute dans l’espoir de l’intimider davan­tage. Il n’y réus­sit pas.

Deuxième interrogatoire.

Le len­de­main, à l’aube, Olybrius prend place à son tri­bu­nal, et là, en face de ses vaines idoles qu’il vient d’honorer par un sacri­fice, en face d’une foule immense accou­rue à ce spec­tacle, il mande la cou­ra­geuse chré­tienne et l’interpelle en ces termes :

— Jeune fille, adore les dieux, prends pitié de ta vie que tu t’ex­poses à perdre sans retour. Ecoute-​moi, et je te pro­mets des mon­ceaux d’or et un rang hono­rable dans ma mai­son. Mais si tu t’obstines, je n’épargnerai rien pour te tor­tu­rer ; le fer et le feu sont à ma dis­po­si­tion.
— Je suis chré­tienne, répon­dit la vierge, et je pré­fère cette qua­li­té, que j’ai reçue au bap­tême, à toutes celles que la nature et la for­tune pour­raient me don­ner. Je me fais gloire d’être la ser­vante de Jésus-​Christ, mon Seigneur et mon Dieu ; je me suis entiè­re­ment consa­crée à lui, et jamais rien ne sera capable de m’en sépa­rer ; je signe­rai de mon sang cette pro­fes­sion et je souf­fri­rai volon­tiers tous les tour­ments ima­gi­nables pour la sou­te­nir jusqu’à la mort.

La prison. — Barbarie du père de sainte Reine.

L’amour d’Olybrius l’emporta-t-il sur sa cruau­té ? Ou bien se flattait-​il qu’avec le temps l’épouse de Jésus-​Christ chan­ge­rait de sen­ti­ment ? On ne sait. Toujours est-​il qu’il ne pous­sa pas plus loin l’interrogatoire et qu’il se conten­ta de faire conduire Reine en pri­son jusqu’à son retour de Germanie où une sou­daine incur­sion de bar­bares l’appelait au secours des fron­tières de l’empire.

En l’absence d’Olybrius, le propre père de Reine se fît l’exécuteur de la sen­tence pro­non­cée contre elle par le pré­fet des Gaules. Il l’en­ferma dans l’une des tours du châ­teau de Grignon qui lui apparte­nait. Suivant une res­pec­table tra­di­tion, Reine aurait été empri­sonnée à Flavigny, dans un caveau sou­ter­rain, sur l’emplacement duquel s’éleva plus tard un monas­tère de l’Ordre de Saint-​Benoît. L’église des Bénédictins est entiè­re­ment détruite, mais à l’endroit où s’élevait le chœur il existe encore une voûte sou­ter­raine connue sous le nom de pri­son de sainte Reine.

Le père bar­bare ordon­na de ceindre son enfant d’un anneau de fer tenant à une chaîne com­po­sée de quarante-​sept chaî­nons et longue de onze pieds, laquelle était fixée à la muraille par ses deux extré­mi­tés ; de sorte que la pri­son­nière se voyait for­cée de demeu­rer debout jour et nuit, sans pou­voir chan­ger de place. Sou­tenue de la force d’en haut, l’héroïque chré­tienne endu­ra ce sup­plice avec une patience invin­cible. Elle n’avait aucun secours humain, sauf un peu de pain et d’eau qu’un chré­tien lui appor­tait en cachette au péril de sa vie.

Enfin, on annon­ça à Alise le retour d’Olybrius. A peine arri­vé, il s’informa des dis­po­si­tions de sa pri­son­nière. Quelle ne fut pas son irri­ta­tion en appre­nant que le cœur de Reine était encore plus for­te­ment atta­ché à Jésus-​Christ, que son corps ne l’était aux fers dont on l’avait garrottée !

Nouvel interrogatoire. — Tortures effroyables.

Le pré­fet veut pour­tant ten­ter un nou­vel assaut de caresses d’abord, de tor­tures ensuite. On lui amène donc l’in­no­cente vierge. Olybrius déroule à ses yeux toutes les plus belles pro­messes que peut faire un amour pas­sion­né. A l’entendre, il suf­fi­rait à la jeune chré­tienne de jeter un grain d’encens dans la cas­so­lette qui brûle devant les sta­tues des dieux pour se voir à l’instant la pre­mière dame des Gaules. Inutile effort, Reine demeure inébran­lable dans la foi de son Dieu.

Aux pro­messes suc­cèdent alors les cruau­tés. Sur l’ordre d’Olybrius, Reine est éten­due sur le che­va­let, des bour­reaux la fla­gellent à coups redou­blés. La vic­time, les yeux fixés au ciel, n’a qu’un mot à la bouche : « Seigneur, c’est en vous que j’ai pla­cé toutes mes espé­rances, et je ne serai pas confon­due. » Le sang coule à flots, la chair vole en lam­beaux. Les assis­tants, païens pour la plu­part, en sont émus jusqu’aux larmes.

— De quels hon­neurs te prives-​tu ! lui crient quelques-​uns. Il te suf­fît d’un oui ; immole aux dieux, et tu seras la plus heu­reuse des femmes ; quelle folie que de perdre une si belle for­tune pour sou­tenir le par­ti d’un cru­ci­fié !
— Mauvais conseillers, mau­vais conseils ! répli­quait la vierge. Je ne sacri­fie­rai pas à de vaines idoles de pierre ou de bois. J’adore Jésus-​Christ, seul vrai Dieu, qui me rem­plit de sa force au milieu de mes cruelles souffrances.

Exaspéré, le pré­fet ordonne qu’on lui arrache les ongles et que, l’ayant sus­pen­due en l’air, on lui déchire la peau de tous côtés avec des peignes de fer. L’horreur qu’inspire cette scène de cruau­té sau­vage arrache de nou­velles larmes aux assis­tants. Le farouche Olybrius se voile lui-​même la face du pan de sa toge, tant le spec­tacle est écœu­rant. Mais le calme de la mar­tyre au milieu de l’émotion géné­rale le pétri­fie d’étonnement. « Etrange mys­tère ! s’écrie-t-il. Es-​tu donc seule à ne pas prendre garde à tes tour­ments ? Le sang ruis­selle de tes membres, ton corps n’est qu’une plaie, et tu t’obstines tou­jours ! Sacrifie aux dieux, sinon tu n’échapperas pas encore à ces tor­tures. » Reine semble ne plus même faire atten­tion à ce langage.

Agonie morale.

La nuit seule fut capable de mettre un terme à tant de bar­ba­rie. Reine est enfer­mée dans un affreux cachot pour y attendre le lever de l’aurore. A peine intro­duite dans la pri­son, la vierge n’a rien tant à cœur que de tom­ber à genoux et d’attribuer à son divin Epoux la gloire du triomphe qu’elle vient de rem­por­ter. En même temps elle lui demande de nou­velles grâces pour conti­nuer la lutte.

Mais, par une per­mis­sion mys­té­rieuse de Dieu, elle entra dans une ago­nie sem­blable à celle de Jésus au jar­din des Oliviers. Sans doute Notre-​Seigneur vou­lait don­ner à son épouse un trait de res­semblance de plus avec lui. L’obscurité de la pri­son, la soli­tude où elle se trou­vait, le sou­ve­nir des sup­plices de la veille, la pers­pec­tive des tor­tures que le cruel Olybrius lui pré­pa­rait encore, les dou­leurs aiguës que lui cau­saient ses plaies, la frap­paient d’abattement. Plus de conso­la­tions sen­sibles de la grâce, plus de joies célestes ; mais une tris­tesse, un dégoût d’où il lui sem­blait impos­sible de sortir.

Epreuve inouïe. Elle y résiste cepen­dant, et reste ferme dans son désir d’aimer Jésus-​Christ par-​dessus toute chose.

Dieu console et guérit sa servante.

Dieu est content d’elle ; à la tem­pête il fait suc­cé­der le calme et inonde son âme de conso­la­tions d’autant plus grandes que ses peines avaient été plus poi­gnantes. Ravie en extase, elle vit une grande croix qui tou­chait de la terre au ciel. Au som­met était une colombe d’une blan­cheur éclatante.

Pour l’assurer que cette vision n’était pas l’effet de l’illusion, Dieu la gué­rit ins­tan­ta­né­ment de toutes ses plaies et la rem­plit d’un cou­rage tel que la mar­tyre atten­dit le lever du jour avec une impa­tience inef­fable, prête à endu­rer de nou­veaux tourments.

Dernier interrogatoire.

Le len­de­main Olybrius la fait com­pa­raître devant son tri­bu­nal. Mais il est bien éton­né de la revoir en pleine san­té. Le feu de la pas­sion se ral­lume en lui ; il la conjure d’adorer les idoles et d’ac­cepter sa main. Nouveaux refus de la part de la vierge, nou­velle bar­ba­rie de la part du préfet.

— Je méprise vos vaines pro­messes, réplique Reine. Vous ne vous ser­vez de la reli­gion que comme d’un pré­texte pour cou­vrir vos cri­mi­nelles convoi­tises. Mais je vous déclare, encore une fois, que je serai fidèle à mon Dieu, mal­gré vos tour­ments, et mal­gré la mort.

La fran­chise et la fer­me­té de ce lan­gage mettent le tyran au paroxysme de la colère. Reine est encore éten­due sur le che­va­let en forme de croix. On applique sur ses flancs des torches enflam­mées. Ce sup­plice paraît ne lui faire aucune impres­sion. Elle est si heu­reuse de se voir cru­ci­fiée à l’imitation de son Dieu et de son Epoux, que l’allégresse de son âme rayonne sur son visage. Oly­brius, qui s’en aper­çoit, la fait jeter dans une cuve d’eau froide, pour voir si cette tran­si­tion brusque du feu dans l’eau gla­cée ne lui enlè­ve­ra rien de sa séré­ni­té. Nouveau triomphe de la vierge et de la grâce, nou­velle défaite du tyran. Le corps sur­nage et la mar­tyre de louer son Dieu : « Le Seigneur a mon­tré sa puis­sance, le Seigneur a mani­fes­té sa gloire. Jésus, mon Maître, qui m’avez sau­vée tant de fois de la mort, soyez béni dans les siècles des siècles. »

Discours de sainte Reine aux assistants. — Sa mort.

Olybrius com­prit enfin qu’il n’avait rien à attendre d’une âme si vaillante. Il condam­na Reine à avoir la tête tran­chée ; une heure de délai lui était accor­dée pour se pré­pa­rer au coup de la mort. Le peuple se trans­por­ta en foule à l’endroit des­ti­né à l’exécution, qui était hors de la ville. La vierge deman­da la per­mis­sion de par­ler aux assis­tants ; elle le fît avec tant de grâce et d’onction, de majes­té et de vigueur à la fois que tous les cœurs en furent atten­dris. On admi­rait cette jeune et noble patri­cienne qui affron­tait la mort avec l’héroïsme du plus intré­pide sol­dat. Puis, se tour­nant vers les chré­tiens qui l’entouraient, elle les sup­plia d’employer leurs prières et leurs larmes pour lui obte­nir le par­don de ses péchés : tou­chante humi­li­té d’une âme qui avait tou­jours gar­dé une inno­cence angé­lique. Elle les exhor­ta avec feu à sou­te­nir jusqu’à la mort, s’il le fal­lait, l’honneur de la seule véri­table reli­gion, de cette reli­gion que le Fils de Dieu était venu éta­blir sur la terre en mou­rant sur une croix pour notre salut. Enfin, la vic­time ten­dit le cou au bour­reau qui lui tran­cha la tête, le 7 sep­tembre, l’an de grâce 251.

Les spec­ta­teurs virent son âme s’élever au ciel, en com­pa­gnie des anges dont elle avait si bien repro­duit la pure­té dans sa chair virginale.

Translation de ses reliques au monastère de Flavigny.

Le corps de sainte Reine fut ense­ve­li par les chré­tiens au pied de la mon­tagne d’Alise. On n’oublia pas de dépo­ser dans son cer­cueil la chaîne qui avait été un des plus rudes ins­tru­ments de son mar­tyre. Sa tombe fut illus­trée par de nom­breux miracles. Mais par suite des mal­heurs des temps la mémoire de sainte Reine s’affaiblit si bien de jour en jour qu’on finit par oublier même l’endroit de son tombeau.

Au milieu du ixe siècle, les Bénédictins du couvent de Saint-​Pierre de Flavigny, qui pos­sé­daient des domaines à Alise, réso­lurent de rele­ver le culte d’une si illustre vierge. Leur abbé, Egile ou Cigile, en confé­ra avec Jonas, évêque d’Autun, qui approu­va fort et encou­ragea ce pieux des­sein. Après un jeûne de trois jours, les moines de Flavigny, pré­cé­dés de leur abbé et de l’évêque de Dol, Salacon ou Salomon, que Jonas avait prié de le rem­pla­cer, se rendent en pro­cession au tom­beau pré­su­mé de la Sainte. Une colombe, qui vient se repo­ser en ce même endroit, enlève jusqu’au moindre doute sur le point du sol qui cache le pré­cieux tré­sor. Egile creuse lui-​même la terre, pen­dant que ses reli­gieux chantent des psaumes. Enfin le sépulcre appa­raît : le corps est là avec le chef, cou­vert encore des che­veux, ain­si que la chaîne de fer que l’on connaît.

Dès le len­de­main, la sainte dépouille fut trans­por­tée à Flavigny, avec toute la pompe pos­sible, au milieu d’un grand concours de peuple. On l’ensevelit dans l’église de l’abbaye.

Cette trans­la­tion se fit l’an 864, sous le règne de Charles le Chauve, et tous les ans, les moines de Flavigny en solen­ni­saient la mémoire, le 22 du mois de mars.

Après une exis­tence plus que mil­lé­naire l’abbaye de Saint-​Pierre dis­pa­rut comme tant d’autres à la fin du xviiie siècle et son église fut détruite, tan­dis que l’ancienne col­lé­giale deve­nait église parois­siale. Par la suite le dio­cèse de Dijon eut à Flavigny un Petit Séminaire, où le P. Henri-​Dominique Lacordaire éta­blit sa troi­sième fon­dation domi­ni­caine vers 1849 [1].

Le culte de sainte Reine.

A l’époque de la Terreur, les agents du dis­trict de Semur s’em­parèrent des reli­quaires et des châsses conte­nant les restes de la Sainte, qu’ils lais­sèrent intacts et qui sont encore conser­vés dans l’église parois­siale de Flavigny. Auprès se trouve la chaîne aux quarante-​sept anneaux. Chaque année, le dimanche de la Trinité et le dimanche qui suit la fête de sainte Reine, les reliques sont por­tées en triomphe par les rues de la petite ville. Même en pleine Terreur, le 26 mai 1793, la muni­ci­pa­li­té de Flavigny avait orga­ni­sé une pro­ces­sion offi­cielle des reliques. Mais actuel­le­ment la pro­ces­sion ne se rend plus, comme elle le fai­sait autre­fois, de Flavigny à Alise Sainte-Reine.

Une seconde com­mune de la Côte‑d’Or, celle de Grésigny, ajoute aus­si à son nom pri­mi­tif celui de la Sainte. Trois com­munes de France, situées res­pec­ti­ve­ment en Loire-​Inférieure, en Haute-​Saône et en Savoie, s’appellent Sainte-Reine.

La vierge mar­tyre est la patronne de la paroisse d’Alise, et, dans le même dio­cèse de Dijon, la patronne et titu­laire de deux églises parois­siales, Tune du doyen­né de Flavigny, Jailly-​les-​Moulins, l’autre du doyen­né de Baigneux-​les-​Juifs, Orret.

Le culte de la Sainte s’est conser­vé dans le Nivernais et en Cham­pagne. Une source abon­dante, dans la com­mune de Menestreau, arron­dis­se­ment de Cosne, porte le nom de sainte Reine. Au dio­cèse de Troyes, on compte trois cha­pelles dédiées à la vierge d’Alise et qui sont l’objet d’un pieux pèle­ri­nage : ce sont les cha­pelles de Roche, de Bérulle et de Brevonnes. La pre­mière obtint des reliques de la Sainte en 1851.

Il exis­tait autre­fois dans la paroisse de Saint-​Eustache, à Paris, une célèbre confré­rie éri­gée en 1608 par Paul V, en l’honneur de sainte Reine. En 1685, l’autel de la confré­rie y était encore orné d’une belle image de pierre de la Sainte, rap­por­tée d’Angleterre par un négo­ciant de la paroisse, ce qui prouve que le culte de la vierge d’Alise s’était implan­té au moyen âge de l’autre côté de la Manche.

E. Gayraud.

Sources consul­tées. — Petits Bollandistes. — Abbé Fr. Grignard, La vie de sainte Reine d’Alise (Paris et Dijon, 1881). — (V. S. B. P., n° 453.)

Notes de bas de page
  1. Note de LPL : et où se trouve actuel­le­ment le sémi­naire Saint Curé d’Ars de la FSSPX[]