6 janvier 2004

De l’Œcuménisme à l’apostasie silencieuse

En 2004, à l’oc­ca­sion des vingt-​cinq ans de pon­ti­fi­cat du pape Jean-​Paul II, la Fraternité Saint Pie X envoyait offi­ciel­le­ment à Rome l’é­tude sui­vante dont le titre est une allu­sion aux paroles de Jean-​Paul II lui-​même, qui dénon­çait en 2003, une « apos­ta­sie silen­cieuse ». Cette apos­ta­sie n’a-​t-​elle pas son germe dans les inno­va­tions du Concile Vatican II ? C’est la thèse ici sou­te­nue et soli­de­ment argu­men­tée, qui n’a, à ce jour, reçu aucune réponse de la part des auto­ri­tés romaines.

Lettre aux cardinaux

Éminence Révérendissime,

A l’occasion des vingt-​cinq ans du pon­ti­fi­cat du pape Jean-​Paul II, il nous a paru impor­tant de nous adres­ser à vous, ain­si qu’aux autres car­di­naux, afin de vous faire par­ta­ger nos préoccupa­tions majeures sur la situa­tion de l’Église. En rai­son de l’aggravation de l’état de san­té du Saint Père, nous avons renon­cé à lui écrire direc­te­ment bien que, ini­tia­le­ment, l’étude ci-​jointe lui ait été per­son­nel­le­ment destinée.

Par-​delà l’optimisme qui entou­rait les célé­bra­tions de ce 25ème anni­ver­saire, la situa­tion extrê­me­ment grave que tra­verse tant le monde que l’Église catho­lique n’échappe à per­sonne. Le Pape lui-​même, en son Exhortation apos­to­lique Ecclesia in Europa, recon­naît notam­ment que le temps que nous vivons est celui d’une « apos­ta­sie silen­cieuse » où règne une sorte « d’agnosticisme prati­que et d’indifférentisme reli­gieux, qui fait que beau­coup d’Euro­péens donnent l’impression de vivre sans ter­reau spi­ri­tuel et comme des héri­tiers qui ont dila­pi­dé le patri­moine qui leur a été légué [1]. »

Parmi les prin­ci­pales causes de ce bilan tra­gique, com­ment ne pas ran­ger au pre­mier plan l’œcuménisme, ini­tié offi­ciel­le­ment par Vatican II et pro­mu par Jean-​Paul II ? Dans le but avoué de réa­li­ser une uni­té nou­velle, au nom d’une volon­té de « regar­der davan­tage ce qui nous unit plu­tôt que ce qui nous divise », on pré­tend subli­mer, réin­ter­pré­ter ou mettre de côté les élé­ments spé­ci­fi­que­ment catho­liques qui appa­raissent comme causes de divi­sion. Ainsi, mé­prisant l’enseignement constant et una­nime de la Tradition selon lequel le Corps mys­tique du Christ est l’Église catho­lique et qu’en dehors d’elle il n’y a pas de salut, cet œcu­mé­nisme a comme détruit les plus beaux tré­sors de l’Église parce que, au lieu d’accepter l’Unité fon­dée sur la véri­té entière, il a vou­lu construire une uni­té adap­tée à une véri­té mariée d’erreur.

Cet œcu­mé­nisme a été la prin­ci­pale cause d’une réforme liturgi­que dont on sait l’effet désas­treux sur la foi et la pra­tique reli­gieuse des fidèles. C’est lui qui a cor­ri­gé la Bible, déna­tu­rant le texte divi­nement ins­pi­ré pour en pré­sen­ter une ver­sion édul­co­rée, inapte à fon­der la foi catho­lique. C’est lui qui main­te­nant vise à fon­der une nou­velle Église dont le car­di­nal Kasper, dans une récente confé­rence [2], pré­ci­sait les contours. Jamais nous ne pour­rons être en com­mu­nion avec les pro­mo­teurs d’un tel œcu­mé­nisme qui tend à dis­soudre l’Église catho­lique, c’est-à-dire le Christ en son Corps mys­tique et qui détruit l’unité de la foi, vrai fon­de­ment de cette com­mu­nion. De leur uni­té, nous ne vou­lons pas, parce qu’elle n’est pas celle vou­lue de Dieu, elle n’est pas celle qui carac­té­rise l’Église catholique.

C’est donc cet œcu­mé­nisme que nous enten­dons ana­ly­ser et dé­noncer par le docu­ment ci-​joint, car nous sommes per­sua­dés que l’Église ne pour­ra cor­res­pondre à sa divine mis­sion si elle ne com­mence par renon­cer clai­re­ment à cette uto­pie et à la condam­ner fer­me­ment, uto­pie qui, selon les propres termes de Pie XI, « dis­loque de fond en comble les fon­de­ments de la foi catho­lique [3]. »

Conscients d’appartenir de plein droit à cette même Église et dé­sireux de tou­jours plus la ser­vir, nous vous sup­plions de faire tout ce qui est en votre pou­voir pour que le Magistère actuel retrouve bien vite le lan­gage mul­ti­sé­cu­laire de l’Église selon lequel « l’union des chré­tiens ne peut être pro­cu­rée autre­ment qu’en favo­ri­sant le retour des dis­si­dents à la seule véri­table Église du Christ, qu’ils ont eu jadis le mal­heur de quit­ter [4]. » C’est alors que l’Église catho­lique rede­vien­dra tout à la fois phare de véri­té et port de salut au sein d’un monde qui court à sa ruine parce que le sel s’y est affadi.

Veuillez croire, Eminence, que nous ne vou­lons aucu­ne­ment nous sub­sti­tuer au Saint Père, mais nous atten­dons cepen­dant du Vicaire du Christ les mesures éner­giques et néces­saires pour sor­tir l’Eglise de l’embourbement dans lequel l’a mis un œcu­mé­nisme faux. Celui qui a reçu le pou­voir suprême, plé­nier et uni­ver­sel sur toute l’Eglise peut poser ces actes salu­taires. Du Successeur du Pierre, nous espé­rons, dans la prière, qu’il écoute notre appel alar­mé et qu’il mani­feste jus­qu’à l’héroïsme cette cha­ri­té qui a été deman­dée au pre­mier pape à la récep­tion de sa charge, la plus grande des cha­ri­tés – « Amas Me plus his » (Jn 21, 16–17) – celle qui doit sau­ver l’Eglise.

Daigne votre Éminence croire en nos sen­ti­ments res­pec­tueux et dévoués en Jésus et Marie.

Menzingen, le 6 jan­vier 2004, en la fête de l’Epiphanie

+ Bernard Fellay Supérieur géné­ral
Franz Schmidberger +, Premier Assistant géné­ral
+ Alfonso de Galarreta Second Assistant géné­ral
+ Bernard Tissier de Mallerais
+ Richard Williamson

Introduction

1. Le 25e anni­ver­saire de l’élection de Jean-​Paul II est l’occasion de réflé­chir sur l’orientation fon­da­men­tale que le Pape a don­née à son pon­ti­fi­cat. Dans la suite du concile Vatican II, il a vou­lu le pla­cer sous le signe de l’unité : « La res­tau­ra­tion de l’unité de tous les chré­tiens était l’un des buts prin­ci­paux du IIe concile du Vatican (cf. UR nº 1) et, dès mon élec­tion, je me suis enga­gé for­mel­le­ment à pro­mou­voir l’exécution de ses normes et de ses orien­ta­tions, consi­dé­rant que c’était là pour moi un devoir pri­mor­dial [5] » Cette “res­tau­ra­tion de l’unité des chré­tiens” mar­quait, selon Jean-​Paul II, un pas vers une uni­té plus grande, celle de la famille humaine tout entière : « L’unité des chré­tiens est ouverte sur une uni­té tou­jours plus vaste, celle de l’humanité tout entière. [6] »

2. En rai­son de ce choix fon­da­men­tal, Jean-​Paul II a esti­mé devoir « reprendre en main cette “magna char­ta” conci­liaire qu’est la consti­tu­tion dog­ma­tique Lumen gen­tium [7] » laquelle défi­nit l’Église comme un « sacre­ment, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain. [8] » Cette “reprise en main” était faite en vue de « réa­li­ser tou­jours mieux cette com­mu­nion vitale dans le Christ de tous ceux qui croient et espèrent en lui, mais éga­le­ment en vue de contri­buer à une plus ample et plus forte uni­té de la famille humaine tout entière [9] » ; Jean-​Paul II a consa­cré l’essentiel de son pon­ti­fi­cat à la pour­suite de cette uni­té, mul­ti­pliant ren­contres inter­re­li­gieuses, repen­tances et gestes œcu­mé­niques. Ce fut éga­le­ment la prin­ci­pale rai­son de ses voyages : « Ils ont per­mis d’atteindre les Églises par­ti­cu­lières dans tous les conti­nents, en por­tant une atten­tion sou­te­nue au déve­lop­pe­ment des rela­tions œcu­mé­niques avec les chré­tiens des dif­fé­rentes Confessions [10] » ; Jean-​Paul II a don­né l’œcuménisme pour trait carac­té­ris­tique du Jubilé de l’an 2000. [11] En toute véri­té, donc, « on peut dire que toute l’activité des Églises locales et du Siège apos­to­lique ont eu ces der­nières années un souffle œcu­mé­nique. [12] » Désormais, vingt-​cinq ans ont pas­sé, le Jubilé s’en est allé : l’heure des bilans a sonné.

3. Longtemps, Jean-​Paul II a cru que son pon­ti­fi­cat serait un nou­vel Avent [13] per­met­tant à « l’aube de ce nou­veau mil­lé­naire [de] se lever sur une Église qui a retrou­vé sa pleine uni­té. [14] » Alors se serait réa­li­sé le « rêve » du Pape : « Tous les peuples du monde en marche, de dif­fé­rents lieux de la Terre, pour se réunir auprès du Dieu unique comme une seule famille. [15] » La réa­li­té est tout autre : « Le temps que nous vivons appa­raît comme une époque d’égarement [où] beau­coup d’hommes et de femmes semblent déso­rien­tés. [16] » Règne par exemple sur l’Europe une « sorte d’agnosticisme pra­tique et d’indifférentisme reli­gieux », au point que « la culture euro­péenne donne l’impression d’une “apos­ta­sie silen­cieuse.” [17] » L’œcuménisme n’est pas étran­ger à cette situa­tion. L’analyse de la pen­sée de Jean-​Paul II (1re par­tie) nous fera consta­ter, non sans une pro­fonde tris­tesse, que la pra­tique œcu­mé­nique est héri­tée d’une pen­sée étran­gère à la doc­trine catho­lique (2e par­tie) et mène à l’“apostasie silen­cieuse” (3e partie).

Chapitre I. Analyse de la pensée œcuménique

L’unité du genre humain et le dialogue interreligieux

Le Christ, uni à chaque homme

4. A la base de la concep­tion du Pape se trouve l’affirmation selon laquelle « Jésus-​Christ (qui) “s’est uni d’une cer­taine manière à tous les hommes” (Gaudium et spes, nº 22), même si ceux-​ci n’en sont pas conscients. [18] » Jean-​Paul II explique en effet que la Rédemption appor­tée par le Christ est uni­ver­selle non seule­ment en ce sens qu’elle est sur­abon­dante pour le genre humain tout entier et qu’elle est pro­po­sée à cha­cun de ses membres en par­ti­cu­lier, mais sur­tout parce qu’elle est appli­quée de fait à tous les hommes : si donc, d’un côté, « dans le Christ, la reli­gion n’est plus une “recherche de Dieu comme à tâtons” (Act 17, 27), mais une réponse de la foi à Dieu qui se révèle […], réponse ren­due pos­sible par cet Homme unique […] en qui tout homme est ren­du capable de répondre à Dieu », de l’autre, le Pape ajoute « [qu’] en cet Homme, la créa­tion entière répond à Dieu. [19] » En effet, « cha­cun a été inclus dans le mys­tère de la Rédemption, et Jésus-​Christ s’est uni à cha­cun, pour tou­jours, à tra­vers ce mys­tère. […] C’est cela, l’homme dans toute la plé­ni­tude du mys­tère dont il est deve­nu par­ti­ci­pant en Jésus-​Christ et dont devient par­ti­ci­pant cha­cun des quatre mil­liards d’hommes vivant sur notre pla­nète, dès l’instant de sa concep­tion. [20] » De la sorte, « dans l’Esprit-Saint, chaque per­sonne et chaque peuple sont deve­nus, par la croix et la résur­rec­tion du Christ, des enfants de Dieu, des par­ti­ci­pants de la nature divine et des héri­tiers de la vie éter­nelle. [21] »

Le congrès d’Assise

5. Cet uni­ver­sa­lisme de la Rédemption trouve son appli­ca­tion immé­diate dans la manière dont Jean-​Paul II pra­tique les rela­tions entre l’Église catho­lique et les autres reli­gions. En effet, si l’ordre de l’unité pré­cé­dem­ment décrit « est celui qui remonte à la créa­tion et à la rédemp­tion et s’il est donc, en ce sens, “divin”, ces dif­fé­rences et ces diver­gences [citées plus haut], même reli­gieuses, remontent plu­tôt à un “fait humain” [22] » et doivent donc « être dépas­sées dans le pro­grès vers la réa­li­sa­tion du gran­diose des­sein d’unité qui pré­side à la créa­tion. [23] » D’où les réunions inter­re­li­gieuses telles que celle d’Assise, le 27 octobre 1986, en laquelle le Pape a vou­lu déce­ler « de manière visible, l’unité cachée mais radi­cale que le Verbe divin […] a éta­blie entre les hommes et les femmes de ce monde. [24] » Par de tels gestes, le Pape entend faire pro­cla­mer à l’Église que « le Christ est la réa­li­sa­tion de l’aspiration de toutes les reli­gions du monde et, par cela même, il en est l’aboutissement unique et défi­ni­tif. [25] »

L’Église du Christ et l’Œcuménisme

L’unique Église du Christ

6. Un double ordre : uni­té divine demeu­rant invio­lée, et divi­sions his­to­riques qui ne relèvent que de l’humain ; telle est encore la grille appli­quée à l’Église, consi­dé­rée comme com­mu­nion. Jean-​Paul II dis­tingue en effet l’Église du Christ, réa­li­té divine, des dif­fé­rentes Églises, fruits des “divi­sions humaines” [26]. L’Église du Christ, aux contours assez mal défi­nis du fait qu’elle déborde des limites visibles de l’Église catho­lique [27], est une réa­li­té inté­rieure [28]. Elle ras­semble pour le moins l’ensemble des chré­tiens [29]), quelle que soit leur appar­te­nance ecclé­siale : tous sont « dis­ciples du Christ [30] », « dans une appar­te­nance com­mune au Christ [31] » ; ils « sont un parce que, dans l’Esprit, ils sont dans la com­mu­nion du Fils et, en lui, dans sa com­mu­nion avec le Père. [32] » L’Église du Christ est donc com­mu­nion des saints, par delà les divi­sions : « L’Église est Communion des saints. [33] » En effet, « la com­mu­nion en laquelle les chré­tiens croient et espèrent est, en sa réa­li­té la plus pro­fonde, leur uni­té avec le Père par le Christ et dans le Saint-​Esprit. Depuis la Pentecôte, elle est don­née et reçue dans l’Église, com­mu­nion des saints. [34] »

Les divisions ecclésiales

7. D’après Jean-​Paul II, les divi­sions ecclé­siales sur­ve­nues au cours de l’histoire n’auraient pas affec­té l’Église du Christ, autre­ment dit auraient lais­sé invio­lée l’unité radi­cale des chré­tiens entre eux : « Par la grâce de Dieu, ce qui appar­tient à la struc­ture de l’Église du Christ n’a pour­tant pas été détruit, ni la com­mu­nion qui demeure avec les autres Églises et Communautés ecclé­siales. [35] » Ces divi­sions sont en effet d’un autre ordre ; elles ne concernent que la mani­fes­ta­tion de la com­mu­nion des saints, ce qui la rend visible : les tra­di­tion­nels liens de la pro­fes­sion de foi, des sacre­ments et de la com­mu­nion hié­rar­chique. En refu­sant l’un ou l’autre de ces liens, les Églises sépa­rées ne portent atteinte qu’à la com­mu­nion visible avec l’Église catho­lique, et encore seule­ment de manière par­tielle : cette der­nière com­mu­nion est capable de plus ou de moins, selon qu’un plus ou moins grand nombre de liens auront été sau­ve­gar­dés. On par­le­ra alors de com­mu­nion impar­faite entre les Églises sépa­rées et l’Église catho­lique, la com­mu­nion de tous dans l’unique Église du Christ demeu­rant sauve [36]. Le terme d’ “Eglises-​sœurs” sera sou­vent uti­li­sé [37].

8. Selon cette concep­tion, ce qui unit entre elles les dif­fé­rentes Églises chré­tiennes est plus grand que ce qui les sépare [38] : « L’espace spi­ri­tuel com­mun l’emporte sur bien des bar­rières confes­sion­nelles qui nous séparent encore les uns des autres. [39] » Cet espace spi­ri­tuel, voi­là l’Église du Christ. Si celle-​ci ne « sub­siste [40] » « en un unique sujet [41] » que dans l’Église catho­lique, elle n’en garde pas moins une « pré­sence active » dans les Communautés sépa­rées en rai­son des « élé­ments de sanc­ti­fi­ca­tion et de véri­té [42] » qui y sont pré­sents. C’est ce pré­ten­du espace spi­ri­tuel com­mun que Jean-​Paul II a vou­lu scel­ler par la publi­ca­tion d’un mar­ty­ro­loge com­mun aux Églises : « L’œcuménisme des saints, des mar­tyrs, est peut-​être celui qui convainc le plus. La voix de la com­mu­nio sanc­to­rum est plus forte que celle des fau­teurs de divi­sion. [43] »

Ni absorption ni fusion, mais don réciproque

9. Dès lors, « le but ultime du mou­ve­ment œcu­mé­nique » n’est que « le réta­blis­se­ment de la pleine uni­té visible de tous les bap­ti­sés. [44] » Une telle uni­té ne se réa­li­se­ra plus par l’“œcuménisme de retour” [45] : « Nous le reje­tons comme méthode de recherche d’unité. […] L’action pas­to­rale de l’Église catho­lique tant latine qu’orientale ne tend plus à faire pas­ser les fidèles d’une Église à l’autre. [46] » Ce serait en effet oublier deux choses : Ces divi­sions, que le concile Vatican II ana­lyse comme des man­que­ments à la cha­ri­té [47], sont impu­tables de part et d’autre : « Evoquant la divi­sion des chré­tiens, le décret sur l’œcuménisme n’ignore pas “la faute des hommes de l’une et l’autre par­tie”, en recon­nais­sant que la res­pon­sa­bi­li­té ne peut être attri­buée uni­que­ment “qu’aux autres (UR, 3).” [48] » L’œcuménisme est aus­si « échange de dons [49] » entre les Églises : « L’échange des dons entre les Églises, dans leur com­plé­men­ta­ri­té rend féconde la com­mu­nion. [50] » C’est pour­quoi l’unité sou­hai­tée par Jean-​Paul II « n’est pas absorp­tion ni même fusion. [51] » Appliquant ce prin­cipe aux rela­tions entre l’Église catho­lique et les ortho­doxes, le Pape déve­loppe : « Les deux Eglises-​sœurs d’Orient et d’Occident com­prennent aujourd’hui que sans une écoute réci­proque des rai­sons pro­fondes qui sous-​tendent en cha­cune d’elles la com­pré­hen­sion de ce qui les carac­té­rise, sans un don réci­proque des tré­sors du génie dont cha­cune est por­teuse, l’Église du Christ ne peut mani­fes­ter la pleine matu­ri­té de cette forme qu’elle a reçue au début, dans le Cénacle. [52] »

La recomposition de l’unité visible

10. « De même que dans la famille les éven­tuelles dis­sen­sions doivent être dépas­sées par la recom­po­si­tion de l’unité, c’est ain­si que l’on doit faire dans la famille plus vaste de la com­mu­nau­té chré­tienne tout entière. [53] » Dépasser les dis­sen­sions humaines par la recom­po­si­tion de l’unité visible, telle est la métho­do­lo­gie du Pape. Il fau­dra l’appliquer dans les trois liens tra­di­tion­nels de la pro­fes­sion de foi, des sacre­ments et de la com­mu­nion hié­rar­chique, du fait que ce sont eux qui consti­tuent la visi­bi­li­té de l’unité.

L’unité de sacrements

11. On sait com­ment Paul VI s’y est employé en matière de sacre­ments : dans les réformes litur­giques suc­ces­sives qui ont appli­qué les décrets conci­liaires, « l’Église a été gui­dée (…) par le désir de tout faire pour faci­li­ter à nos frères sépa­rés le che­min de l’union, en écar­tant toute pierre qui pour­rait consti­tuer ne serait-​ce que l’ombre d’un risque d’achoppement ou de déplai­sir. [54] »

12. L’obstacle d’une litur­gie catho­lique trop expres­sive du dogme ain­si écar­té, il res­tait à dépas­ser la dif­fi­cul­té posée par les litur­gies des com­mu­nau­tés sépa­rées. La réforme fit alors place à la recon­nais­sance : bien qu’elle ne contienne pas les paroles consé­cra­toires, l’anaphore assy­rienne (nes­to­rienne) d’Addaï et Mari fut décré­tée valide en un docu­ment expres­sé­ment approu­vé par Jean-​Paul II [55].

L’unité dans la profession de foi

13. En matière de foi, Jean-​Paul II estime que, bien sou­vent, « les polé­miques et les contro­verses into­lé­rantes ont trans­for­mé en affir­ma­tions incom­pa­tibles ce qui était en fait le résul­tat de deux regards scru­tant la même réa­li­té, mais de deux points de vue dif­fé­rents. Il faut trou­ver aujourd’hui la for­mule qui, sai­sis­sant cette réa­li­té inté­gra­le­ment, per­mette de dépas­ser les lec­tures par­tielles et d’éliminer les inter­pré­ta­tions erro­nées. [56] » Cela réclame une cer­taine lati­tude par rap­port aux for­mules dog­ma­tiques jusque là employées par l’Église. On recour­ra donc au rela­ti­visme his­to­rique, afin de faire dépendre les for­mules dog­ma­tiques de leur époque : « Les véri­tés que l’Église entend réel­le­ment ensei­gner par ses for­mules dog­ma­tiques sont sans doute dis­tinctes des concep­tions chan­geantes propres à une époque déter­mi­née ; mais il n’est pas exclu qu’elles soient éven­tuel­le­ment for­mu­lées, même par le Magistère, en des termes qui portent des traces de telles concep­tions. [57] »

14. Deux appli­ca­tions de ces prin­cipes sont sou­vent citées. Dans le cas de l’hérésie nes­to­rienne, Jean-​Paul II estime que « les divi­sions qui se sont pro­duites étaient dues dans une large mesure à des mal­en­ten­dus. [58] » En effet, si le prin­cipe qui affirme que « en pre­mier lieu, devant des for­mu­la­tions doc­tri­nales qui se séparent des for­mules en usage dans la com­mu­nau­té à laquelle on appar­tient, il convient mani­fes­te­ment de dis­cer­ner si les paroles ne recouvrent pas un conte­nu iden­tique [59] » est clair, l’application qui en est faite est détour­née. C’est ain­si que la recon­nais­sance de foi chris­to­lo­gique de l’Église assy­rienne d’Orient, sans que lui ait été récla­mée l’adhésion à la for­mule d’Ephèse selon laquelle Marie est Mère de Dieu, fait fi des condam­na­tions anté­rieures, sans tenir compte de leur aspect infaillible [60]. Plus carac­té­ris­tique encore est la décla­ra­tion com­mune avec la Fédération luthé­rienne mon­diale. Son sou­ci ne fut pas de dire la foi et d’écarter l’erreur, mais seule­ment de trou­ver une for­mu­la­tion apte à échap­per aux ana­thèmes du concile de Trente : « Cette décla­ra­tion com­mune est por­tée par la convic­tion que le dépas­se­ment des condam­na­tions et des ques­tions jusqu’alors contro­ver­sées ne signi­fie pas que les sépa­ra­tions et les condam­na­tions soient prises à la légère ou que le pas­sé de cha­cune de nos tra­di­tions ecclé­siales soit désa­voué. Elle est cepen­dant por­tée par la convic­tion que de nou­velles appré­cia­tions adviennent dans l’histoire de nos Églises. [61] » D’un mot bien simple, le car­di­nal Kasper com­men­te­ra cette décla­ra­tion : « Là où nous avions vu au pre­mier abord une contra­dic­tion, nous pou­vons voir une posi­tion com­plé­men­taire. [62] »

La communion hiérarchique

15. Quant au minis­tère pétri­nien, les sou­haits pon­ti­fi­caux sont connus : trou­ver, de concert avec les pas­teurs et théo­lo­giens des dif­fé­rentes Églises, « les formes dans les­quelles ce minis­tère pour­ra réa­li­ser un ser­vice d’amour recon­nu par les uns et par les autres. [63] » On intro­dui­ra alors le régu­la­teur de la neces­si­tas Ecclesiæ [64], com­prise aujourd’hui comme réa­li­sa­tion de l’unité des chré­tiens, pour atté­nuer ce qui, dans l’exercice du minis­tère pétri­nien, pour­rait être obs­tacle à l’œcuménisme.

16. Selon le car­di­nal Kasper, cette démarche ne suf­fit pas. Il faut encore dépas­ser les obs­tacles pré­sents dans les com­mu­nau­tés sépa­rées, par exemple l’invalidité décré­tée des ordi­na­tions angli­canes [65]. La piste qu’il pro­pose pour cela est une redé­fi­ni­tion du concept de suc­ces­sion apos­to­lique, non plus « dans le sens d’une chaîne his­to­rique d’imposition des mains remon­tant à tra­vers les siècles à un apôtre – ce serait une vision très méca­nique et indi­vi­dua­liste » mais comme « par­ti­ci­pa­tion col­lé­giale dans un col­lège qui, comme un tout, remonte aux apôtres par le par­tage de la même foi apos­to­lique et par la même mis­sion apos­to­lique. [66]

Chapitre II. Les problèmes doctrinaux posés par l’œcuménisme [67]

17. La pra­tique œcu­mé­nique de ce pon­ti­fi­cat repose tout entière sur la dis­tinc­tion Église du Christ /​Église catho­lique, laquelle per­met d’avancer que, si la com­mu­nion visible a été bles­sée par les divi­sions ecclé­siales, la com­mu­nion des saints, consi­dé­rée comme par­tage des biens spi­ri­tuels dans la com­mune union au Christ, n’a pas été bri­sée. Or, cette affir­ma­tion ne tient pas devant la foi catholique.

L’Église du Christ est l’Église catholique

18. On ne peut dis­tin­guer l’Église du Christ de l’Église catho­lique ain­si que le sup­pose la pra­tique œcu­mé­nique. Par le fait même qu’elle est consi­dé­rée comme réa­li­té inté­rieure, cette “Église Corps du Christ”, dis­tincte réel­le­ment de l’Église catho­lique, rejoint la notion pro­tes­tante d’une « Église invi­sible pour nous, visible aux seuls yeux de Dieu. [68] » Elle est contraire aux ensei­gne­ments constants de l’Église. Léon XIII, par­lant de l’Église, affirme par exemple : « C’est parce que [l’Église] est corps qu’elle est visible à nos regards. [69] » Pie XI ne dit pas autre chose : « Son Église, le Christ Notre Seigneur l’a éta­blie en socié­té par­faite, exté­rieure par nature et per­cep­tible aux sens. [70] » Pie XII conclu­ra donc : « C’est s’éloigner de la véri­té divine que d’imaginer une Église qu’on ne pour­rait ni voir ni tou­cher, qui ne serait que “spi­ri­tuelle” (pneu­ma­ti­cum), dans laquelle les nom­breuses com­mu­nau­tés chré­tiennes, bien que divi­sées entre elles par la foi, seraient pour­tant réunies par un lien invi­sible. [71] »

19. La foi catho­lique oblige donc à affir­mer l’identité de l’Église du Christ et de l’Église catho­lique. C’est ce que fait Pie XII en iden­ti­fiant « le Corps mys­tique de Jésus-​Christ » à « cette véri­table Église de Jésus-​Christ – celle qui est sainte, catho­lique, apos­to­lique, romaine. [72] » Avant lui, le Magistère avait affir­mé qu’ » il n’y pas d’autre Église que celle qui, bâtie sur Pierre seul, en un corps joint et assem­blé [enten­dez “visible”], se dresse dans l’unité de la foi et de la cha­ri­té. [73] » Rappelons enfin l’exclamation de Pie IX : « Il n’y a en effet qu’une seule reli­gion vraie et sainte, fon­dée et ins­ti­tuée par le Christ Notre-​Seigneur. Mère et nour­rice des ver­tus, des­truc­trice des vices, libé­ra­trice des âmes, indi­ca­trice du vrai bon­heur ; elle s’appelle : Catholique, Apostolique et Romaine. [74] » Suite à un magis­tère constant et uni­ver­sel, le 1er sché­ma pré­pa­ra­toire de Vatican I était en droit d’avancer ce canon condam­na­toire : « Si quelqu’un dit que l’Église, à qui ont été faites les pro­messes divines n’ est pas une socié­té (cœtus) externe et visible de fidèles, mais une socié­té spi­ri­tuelle de pré­des­ti­nés ou de justes connus de Dieu seul, qu’il soit ana­thème. [75] »

20. Par voie de consé­quence, la pro­po­si­tion du car­di­nal Kasper selon laquelle : « La véri­table nature de l’Église – l’Église en tant que corps du Christ – est cachée et n’est sai­sis­sable que par la foi [76] » est cer­tai­ne­ment héré­tique. Ajouter que « cette nature sai­sis­sable uni­que­ment par la foi s’actualise sous des formes visibles : dans la Parole pro­cla­mée, l’administration des sacre­ments, les minis­tères et le ser­vice chré­tien [77] » est insuf­fi­sant pour rendre compte de la visi­bi­li­té de l’Église : “se rendre visible” – qui plus est par de simples actes – n’est pas “être visible”.

L’appartenance à l’Église par la triple unité

21. Du fait que l’Église du Christ est l’Église catho­lique, on ne peut affir­mer avec les par­ti­sans de l’œcuménisme que « la triple uni­té de foi, de sacre­ment et de com­mu­nion hié­rar­chique n’est néces­saire qu’à la seule com­mu­nion visible de l’Église », dans ce sens que l’absence d’un de ces liens, si elle mani­feste la rup­ture de la com­mu­nion visible de l’Église, ne signi­fie pas la sépa­ra­tion vitale d’avec l’Église. Il faut au contraire affir­mer que ces trois liens sont consti­tu­tifs de l’unité de l’Église, non en ce sens qu’un seul uni­rait à l’Église, mais du fait que si un seul de ces trois liens n’était pas pos­sé­dé in re vel sal­tem in voto [78], celui à qui il ferait défaut serait sépa­ré de l’Église et ne béné­fi­cie­rait pas de la vie sur­na­tu­relle. C’est ce que la foi catho­lique oblige à croire, ain­si que le montre ce qui suit.

Unité de foi

22. Si la néces­si­té de la foi est admise par tous [79], il faut encore pré­ci­ser la nature de cette foi qui est néces­saire au salut, et donc consti­tu­tive de l’appartenance à l’Église. Elle n’est pas « ce sen­ti­ment intime engen­dré par le besoin divin » dénon­cé par saint Pie X [80], mais bien cette foi décrite par le concile Vatican I : « une ver­tu sur­na­tu­relle par laquelle, sous l’inspiration et avec le secours de la grâce de Dieu, nous croyons que ce qui nous a été révé­lé par lui est véri­table : nous le croyons, non point à cause de la véri­té intrin­sèque des choses vues dans la lumière natu­relle de notre rai­son, mais à cause de l’autorité même de Dieu qui nous révèle ces véri­tés, et qui ne peut ni se trom­per ni nous trom­per. [81] » C’est pour­quoi celui qui refuse ne serait-​ce qu’une véri­té de foi connue comme révé­lée perd tota­le­ment la foi indis­pen­sable au salut : « Celui qui, même sur un seul point, refuse son assen­ti­ment aux véri­tés divi­ne­ment révé­lées très réel­le­ment abdique tout à fait la foi, puisqu’il refuse de se sou­mettre à Dieu en tant qu’il est la sou­ve­raine véri­té et le motif propre de foi. [82] »

Unité de gouvernement

23. « Afin de main­te­nir tou­jours en son Église cette uni­té de foi et de doc­trine, il [le Christ] choi­sit un homme par­mi tous les autres, Pierre… [83] » : c’est ain­si que Pie IX intro­duit la néces­si­té de l’unité à la chaire de Pierre, « dogme de notre divine reli­gion [qui] a tou­jours été prê­ché, défen­du, affir­mé d’un cœur et d’une voix una­nimes par les Pères et les Conciles de tous les temps. » A la suite des Pères, le même Pape déve­loppe : « C’est d’elle [la chaire de Pierre] que découlent sur tous les droits à l’union divine [84] ; […] celui qui la quitte ne peut espé­rer res­ter dans l’Église [85], celui qui mange l’Agneau en dehors d’elle n’a pas de part avec Dieu [86] » D’où la célèbre parole que saint Augustin adresse aux schis­ma­tiques : « Ce qui est vôtre, c’est que vous avez eu l’impiété de vous sépa­rer de nous ; car, si pour tout le reste, vous pen­siez et pos­sé­diez la véri­té, en per­sé­vé­rant néan­moins dans votre sépa­ra­tion […] il ne vous manque que ce qui manque à celui à qui la cha­ri­té fait défaut. [87] »

Unité de sacrements

24. « Celui croi­ra et sera bap­ti­sé sera sau­vé. [88] » A tra­vers cette parole de Notre-​Seigneur, tous recon­naissent la néces­si­té, outre de l’unité de foi et de but, d’une « com­mu­nau­té […] de moyens appro­priés au but [89] » pour consti­tuer l’unité de l’Église : les sacre­ments. Telle est donc « l’Église catho­lique [que le Christ ins­ti­tua], acquise par son sang, comme l’unique demeure du Dieu vivant […] le corps unique ani­mé et vivi­fié par un Esprit unique, main­te­nu dans la cohé­sion et la concorde par l’unité de foi, d’espérance et de cha­ri­té, par les liens des sacre­ments, du culte et de la doc­trine. [90] »

Conclusion

25. La néces­si­té de ce triple lien oblige donc à croire que « celui qui refuse d’écouter l’Église doit être consi­dé­ré, selon l’ordre du Seigneur, “comme un païen et un publi­cain” (Mt 18, 17) et ceux qui sont divi­sés pour des rai­sons de foi ou de gou­ver­ne­ment ne peuvent vivre dans ce même Corps ni par consé­quent de ce même Esprit divin. [91] »

Hors de l’Église, point de salut

Les non-​catholiques sont-​ils membres de l’Église ?

26. En consé­quence de ce qui vient d’être dit, la pro­po­si­tion sui­vante : « Ceux [nés hors de l’Église catho­lique et donc ne pou­vant “être accu­sés de péché de divi­sion”] qui croient au Christ et qui ont reçu vali­de­ment le bap­tême, se trouvent dans une cer­taine com­mu­nion, bien qu’imparfaite, avec l’Église catho­lique » au point que « jus­ti­fiés par la foi reçue au bap­tême, incor­po­rés au Christ, ils portent à juste titre le nom de chré­tiens, et les fils de l’Église catho­lique les recon­naissent à bon droit comme des frères dans le Seigneur » alors que « des diver­gences variées entre eux et l’Église catho­lique sur des ques­tions doc­tri­nales, par­fois dis­ci­pli­naires, ou sur la struc­ture de l’Église, consti­tuent nombre d’obstacles, par­fois fort graves [92] » doit être soi­gneu­se­ment pesée ; si cette pro­po­si­tion entend par­ler de ceux qui demeurent dans ces diver­gences pour­tant connues d’eux-mêmes, elle est contraire à la foi catho­lique. L’incise affir­mant que « ils ne peuvent être accu­sés de péché de divi­sion » est pour le moins témé­raire : res­tant exté­rieu­re­ment dans la dis­si­dence, rien n’indique qu’ils n’adhèrent pas à la divi­sion de leurs pré­dé­ces­seurs, l’apparence por­tant plu­tôt à croire le contraire. Présumer la bonne foi n’est pas ici pos­sible [93], ain­si que le rap­pelle Pie IX : « Il faut admettre de foi que, hors de l’Église apos­to­lique romaine, per­sonne ne peut être sau­vé. […] Cependant, il faut aus­si recon­naître d’autre part, avec cer­ti­tude, que ceux qui sont à l’égard de la vraie reli­gion dans une igno­rance invin­cible n’en portent point la faute devant le Seigneur. Maintenant, à la véri­té, qui ira dans sa pré­somp­tion, jusqu’à mar­quer les fron­tières de cette igno­rance [94] ? »

Y a-​t-​il des éléments de sanctification et de vérité dans les communautés séparées ?

27. L’affirmation selon laquelle « de nom­breux élé­ments de sanc­ti­fi­ca­tion et de véri­té [95] » se trouvent hors de l’Église est équi­voque. Elle sup­pose en effet l’efficacité sanc­ti­fiante des moyens de salut maté­riel­le­ment pré­sents dans les Communautés sépa­rées. Or ce pré­sup­po­sé ne peut être affir­mé sans dis­tinc­tion. Parmi ces élé­ments, ceux qui ne réclament pas de dis­po­si­tion spé­ci­fique de la part du sujet – le bap­tême d’un enfant – sont effec­ti­ve­ment sal­vi­fiques en ce sens qu’ils pro­duisent effi­ca­ce­ment la grâce dans l’âme du bap­ti­sé, qui alors appar­tient à l’Église catho­lique de plein droit tant qu’il n’a pas atteint l’âge des choix per­son­nels [96]. Pour les autres élé­ments, qui réclament des dis­po­si­tions de la part du sujet pour être effi­caces, on doit dire qu’ils sont sal­vi­fiques seule­ment dans la mesure où le sujet est déjà membre de l’Église par son désir impli­cite. C’est ce qu’affirme la doc­trine des conciles : « Elle [l’Église] pro­fesse que l’unité du corps de l’Église a un tel pou­voir que les sacre­ments de l’Église n’ont d’utilité en vue du salut que pour ceux qui demeurent en elle. [97] » Or en tant qu’elles sont sépa­rées, ces com­mu­nau­tés s’opposent à ce désir impli­cite qui seul rend les sacre­ments fruc­tueux. On ne peut donc dire de ces com­mu­nau­tés qu’elles pos­sèdent des élé­ments de sanc­ti­fi­ca­tion et de véri­té, sinon matériellement.

L’Esprit-Saint se sert-​il des communautés séparées comme moyens de salut ? Les “Églises-​sœurs”

28. On ne peut affir­mer que « l’Esprit du Christ ne refuse pas de se ser­vir d’elles [des com­mu­nau­tés sépa­rées] comme de moyens de salut. [98] » Saint Augustin affirme en effet : « Il n’y a qu’une seule véri­table Église, appe­lée Église catho­lique ; autour d’elle cir­culent un cer­tain nombre de sectes sépa­rées de son uni­té ; et s’il arrive que ces sectes engendrent, ce n’est pas elles qui engendrent, c’est l’Église catho­lique qui engendre en elles et par elles. [99] » La seule chose que ces com­mu­nau­tés sépa­rées peuvent réa­li­ser par leur propre ver­tu, c’est la sépa­ra­tion de ces âmes de l’unité ecclé­siale, comme l’indique encore saint Augustin : « Il n’est point vôtre [le bap­tême], ce qui est vôtre c’est que vous avez des sen­ti­ments mau­vais et des pra­tiques sacri­lèges, et que vous avez eu l’impiété de vous sépa­rer de nous. [100] » Dans la mesure où elle remet en cause l’affirmation selon laquelle l’Église catho­lique est l’unique déten­trice des moyens de salut, l’assertion du docu­ment conci­liaire est proche de l’hérésie : si, en leur accor­dant une « signi­fi­ca­tion et une valeur dans le mys­tère du salut [101] », elle recon­naît à ces com­mu­nau­tés sépa­rées une quasi-​légitimité – ain­si que le laisse entendre l’expression “Églises-​sœurs” [102]– elle va dans un sens oppo­sé à la doc­trine catho­lique parce qu’elle nie l’unicité de l’Église catholique.

Ce qui nous unit est-​il plus grand que ce qui nous sépare ?

29. La pro­po­si­tion reste vraie maté­riel­le­ment, en ce sens que tous ces élé­ments sont autant de points pou­vant ser­vir de base à des dis­cus­sions visant à les rame­ner dans l’unique ber­cail. Si les Communautés sépa­rées ne sont pas for­mel­le­ment déten­trices des élé­ments de sanc­ti­fi­ca­tion et de véri­té – ain­si qu’il a été dit plus haut – la pro­po­si­tion selon laquelle « ce qui unit les catho­liques aux dis­si­dents est plus grand que ce qui les sépare » ne peut être vraie for­mel­le­ment, et c’est pour­quoi saint Augustin dit : « En beau­coup de points ils sont avec moi, en quelques-​uns seule­ment ils ne sont pas avec moi ; mais à cause de ces quelques points dans les­quels ils se séparent de moi, il ne leur sert de rien d’être avec moi en tout le reste. [103] »

Conclusion

30. L’œcuménisme ne peut être que rap­pro­ché de la “théo­rie des branches” [104] condam­née par le Magistère : « Son fon­de­ment […] est tel qu’il ren­verse de fond en comble la consti­tu­tion divine de l’Église » et sa prière pour l’unité, selon « une inten­tion pro­fon­dé­ment souillée et infec­tée par l’hérésie, ne peut abso­lu­ment pas être tolé­ré [e]. [105] »

Chapitre III. Les problèmes pastoraux posés par l’œcuménisme

31. Outre le fait qu’il s’appuie sur des thèses hété­ro­doxes, l’œcuménisme est nocif pour les âmes, en ce sens qu’il rela­ti­vise la foi catho­lique pour­tant indis­pen­sable au salut et qu’il détourne de l’Église catho­lique, unique arche de salut. L’Église catho­lique n’agit plus en phare de la véri­té qui illu­mine les cœurs et dis­sipe l’erreur, mais plonge l’humanité dans la brume de l’indifférentisme reli­gieux, et bien­tôt dans les ténèbres de l’« apos­ta­sie silen­cieuse [106] »

L’Œcuménisme engendre le relativisme de la foi

Il relativise les déchirures opérées par les hérétiques

32. Le dia­logue œcu­mé­nique voile le péché contre la foi que com­met l’hérétique – rai­son for­melle de la rup­ture – pour mettre en avant le péché contre la cha­ri­té, impu­té arbi­trai­re­ment tant à l’hérétique qu’au fils de l’Église. Il en arrive fina­le­ment à nier le péché contre la foi que consti­tue l’hérésie. C’est ain­si que Jean-​Paul II, au sujet de l’hérésie mono­phy­site, affirme : « Les divi­sions qui se sont pro­duites étaient dues dans une large mesure à des mal­en­ten­dus [107] », ajou­tant : « Les for­mu­la­tions doc­tri­nales qui se séparent des for­mules en usage […] recouvrent un conte­nu iden­tique. [108] » De telles affir­ma­tions désa­vouent d’autant le Magistère pour­tant infaillible qui condam­na ces hérésies.

Il prétend que la foi de l’Église peut être perfectionnée par les “richesses” de l’autre

33. Même si le concile Vatican II pré­cise, quoiqu’en des termes bien modé­rés, la nature de l’ “enri­chis­se­ment” appor­té par le dia­logue – « une connais­sance plus conforme à la véri­té, en même temps qu’une estime plus juste, de l’enseignement et de la vie de chaque com­mu­nion [109] » – la pra­tique œcu­mé­nique de ce pon­ti­fi­cat déforme cette affir­ma­tion pour en faire un enri­chis­se­ment de la foi. L’Église quitte un regard par­tiel pour sai­sir la réa­li­té inté­gra­le­ment : « Les polé­miques et les contro­verses into­lé­rantes ont trans­for­mé en affir­ma­tions incom­pa­tibles ce qui était en fait le résul­tat de deux regards scru­tant la même réa­li­té, mais de deux points de vue dif­fé­rents. Il faut trou­ver aujourd’hui la for­mule qui, sai­sis­sant cette réa­li­té inté­gra­le­ment, per­mette de dépas­ser des lec­tures par­tielles et d’éliminer des inter­pré­ta­tions erro­nées. [110] » C’est ain­si que « l’échange des dons entre Églises, dans leur com­plé­men­ta­ri­té, rend féconde la com­mu­nion. [111] » De telles affir­ma­tions, si elles pré­sup­posent que l’Église n’est pas défi­ni­ti­ve­ment et inté­gra­le­ment dépo­si­taire du tré­sor de la foi, ne sont pas conformes à la doc­trine tra­di­tion­nelle de l’Église. C’est pour­quoi le Magistère met­tait en garde contre cette fausse valo­ri­sa­tion des sup­po­sées richesses de l’autre : « En reve­nant à l’Église, ils ne per­dront rien du bien qui, par la grâce de Dieu, est réa­li­sé en eux jusqu’à pré­sent, mais par leur retour ce bien sera plu­tôt (potius) com­plé­té et ame­né à la per­fec­tion. On évi­te­ra pour­tant de par­ler sur ce point d’une manière telle que, en reve­nant à l’Église, ils s’imaginent appor­ter à celle-​ci un élé­ment essen­tiel qui lui aurait man­qué jusqu’ici. [112] »

Il relativise l’adhésion à certains donnés de la foi

34. La sup­po­sée « hié­rar­chie des véri­tés de la doc­trine catho­lique [113] » est certes bien resi­tuée théo­lo­gi­que­ment par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi : elle « signi­fie que cer­tains dogmes ont leur rai­son d’être en d’autres qui occupent le pre­mier rang et les éclairent. Mais tous les dogmes puisqu’ils sont révé­lés, doivent éga­le­ment être crus de foi divine. [114] » Cependant, la pra­tique œcu­mé­nique de Jean-​Paul II s’affranchit de cette inter­pré­ta­tion authen­tique. Par exemple dans l’adresse à l’ “Église” évan­gé­lique, il sou­ligne “ce qui importe” : « Vous savez que, pen­dant des dizaines d’années, ma vie a été mar­quée par l’expérience des défis lan­cés au chris­tia­nisme par l’athéisme et l’incroyance. J’ai d’autant plus clai­re­ment devant les yeux ce qui importe : notre com­mune pro­fes­sion de Jésus-​Christ. […] Jésus-​Christ est notre salut à tous. […] Par la force de l’Esprit-Saint, nous deve­nons ses frères, véri­ta­ble­ment et essen­tiel­le­ment des fils de Dieu. […] Grâce à la réflexion sur la Confession d’Augsbourg et à de mul­tiples ren­contres, nous avons pris une nou­velle conscience du fait que nous croyons et pro­fes­sons tout cela ensemble. [115] » Léon XIII condam­nait ce type de pra­tique œcu­mé­nique, qui trouve son apo­gée dans la décla­ra­tion sur la Justification : « Ils sou­tiennent qu’il est oppor­tun, pour gagner les cœurs des éga­rés, de rela­ti­vi­ser cer­tains points de doc­trine comme étant de moindre impor­tance, ou de les atté­nuer au point de ne plus leur lais­ser le sens auquel l’Église s’est tou­jours tenue. Il n’est pas besoin de long dis­cours pour mon­trer com­bien est condam­nable une telle concep­tion. [116] »

Il promeut une “réforme permanente” des formules de foi

35. La lati­tude que la pra­tique œcu­mé­nique s’octroie avec les for­mules dog­ma­tiques a déjà été dite. Reste à mon­trer l’importance de ce pro­cé­dé dans le pro­ces­sus œcu­mé­nique : « L’approfondissement de la com­mu­nion dans une réforme constante, réa­li­sée à la lumière de la Tradition apos­to­lique, est sans doute un des traits dis­tinc­tifs les plus impor­tants de l’œcuménisme. […] Le décret sur l’œcuménisme (UR nº 6) fait figu­rer la manière de for­mu­ler la doc­trine par­mi les élé­ments de réforme per­ma­nente. [117] » Un tel pro­cé­dé a été condam­né par Pie XII : « Certains entendent réduire le plus pos­sible la signi­fi­ca­tion des dogmes et libé­rer le dogme lui-​même de la manière de s’exprimer en usage dans l’Église depuis long­temps et des concepts phi­lo­so­phiques en vigueur chez les doc­teurs catho­liques. […] Il est clair […] que ces ten­ta­tives non seule­ment conduisent à ce qu’ils appellent un “rela­ti­visme” dog­ma­tique, mais qu’elles le contiennent déjà en fait. […] Certes, il n’est per­sonne qui ne voie que les termes pour expri­mer de telles notions, et qui sont uti­li­sés dans les écoles [théo­lo­giques] aus­si bien que par le magis­tère de l’Église lui-​même, peuvent être amé­lio­rés et per­fec­tion­nés. […] Il est clair éga­le­ment que l’Église ne peut pas se lier à n’importe quel sys­tème phi­lo­so­phique, dont le règne ne dure que peu de temps : mais ce qui durant des siècles a été éta­bli du consen­te­ment com­mun des doc­teurs catho­liques pour par­ve­nir à une cer­taine intel­li­gence du dogme, ne repose assu­ré­ment pas sur un fon­de­ment aus­si fra­gile. […] C’est pour­quoi il n’y a pas lieu de s’étonner si cer­taines de ces notions, les conciles œcu­mé­niques ne les ont pas seule­ment employées, mais qu’ils les ont éga­le­ment sanc­tion­nées, en sorte qu’il n’est pas per­mis de s’en éloi­gner. [118] »

Il refuse d’enseigner sans ambiguïté le contenu intégral de la foi catholique

36. Le pos­tu­lat œcu­mé­nique selon lequel « la méthode et la manière d’exprimer la foi catho­lique ne doivent nul­le­ment faire obs­tacle au dia­logue avec les frères [119] » abou­tit à des décla­ra­tions com­munes signées solen­nel­le­ment, mais équi­voques et ambi­va­lentes. Dans la décla­ra­tion com­mune sur la Justification par exemple, jamais n’est ensei­gnée clai­re­ment l’infusion de la grâce sanc­ti­fiante [120] dans l’âme du juste ; la seule phrase y fai­sant allu­sion, des plus mal­adroites, peut même por­ter à croire l’inverse : « La grâce jus­ti­fiante ne devient jamais une pos­ses­sion de la per­sonne dont cette der­nière pour­rait se récla­mer face à Dieu. [121] » De telles pra­tiques ne res­pectent plus le devoir d’exposer inté­gra­le­ment et sans ambi­guï­té la foi catho­lique, comme “devant être crue” : « La doc­trine catho­lique doit être pro­po­sée tota­le­ment et inté­gra­le­ment ; il ne faut point pas­ser sous silence ou voi­ler en des termes ambi­gus ce que la véri­té catho­lique enseigne sur la vraie nature et les étapes de la jus­ti­fi­ca­tion, sur la consti­tu­tion de l’Église, sur la pri­mau­té de juri­dic­tion du Pontife Romain, sur la seule véri­table union par le retour des chré­tiens sépa­rés à l’unique véri­table Église du Christ. [122] »

Il met sur un pied d’égalité les saints authentiques et les “saints” supposés

37. En publiant un mar­ty­ro­loge com­mun aux dif­fé­rentes confes­sions chré­tiennes, Jean-​Paul II met sur un pied d’égalité les saints authen­tiques avec des “saints” sup­po­sés. C’est oublier la phrase de saint Augustin : « Si, res­tant sépa­ré de l’Église, il est per­sé­cu­té par un enne­mi du Christ […] et que cet enne­mi du Christ lui dise à lui, sépa­ré de l’Église du Christ : “Offrez de l’encens aux idoles, ado­rez mes dieux” et le tue parce qu’il ne les adore pas, il pour­ra répandre son sang, mais non rece­voir la cou­ronne. [123] » Si l’Église espère pieu­se­ment que le frère sépa­ré mort pour le Christ a eu la cha­ri­té par­faite, elle ne peut l’affirmer. Dans son droit, elle pré­sume que l’ “obex”, l’obstacle de la sépa­ra­tion visible, fut un obs­tacle à l’acte de cha­ri­té par­faite que consti­tue le mar­tyre. Elle ne peut donc le cano­ni­ser ni l’inscrire au mar­ty­ro­loge [124] .

Il provoque donc la perte de la foi

38. Relativiste, évo­lu­tion­niste et ambi­gu, cet œcu­mé­nisme pro­voque direc­te­ment la perte de la foi. La pre­mière vic­time en est le Président du Conseil pon­ti­fi­cal pour la pro­mo­tion de l’Unité des Chrétiens, le car­di­nal Kasper lui-​même, lorsqu’il affirme par exemple au sujet de la jus­ti­fi­ca­tion que « notre valeur per­son­nelle ne dépend pas de nos œuvres, qu’elles soient bonnes ou mau­vaises. Avant même d’agir, nous sommes accep­tés et nous avons reçu le “oui” de Dieu [125] ; ou encore à pro­pos de la messe et du sacer­doce, que « ce n’est pas le prêtre qui opère la trans­sub­stan­tia­tion : le prêtre prie le Père afin que celle-​ci ait lieu par l’opération du Saint Esprit. […] La néces­si­té du minis­tère ordon­né est un signe qui sug­gère et fait aus­si goû­ter la gra­tui­té du sacre­ment eucha­ris­tique. [126] »

L’Œcuménisme détourne de l’Église

39. Outre qu’il détruit la foi catho­lique, l’œcuménisme détourne encore de l’Église les héré­tiques, les schis­ma­tiques et les infidèles.

Il ne réclame plus la conversion des hérétiques et schismatiques

40. Le mou­ve­ment œcu­mé­nique ne cherche plus leur conver­sion et leur retour à « l’unique ber­cail du Christ, hors duquel se trouve cer­tai­ne­ment qui­conque n’est point uni à ce Saint-​Siège de Pierre. [127] » Cela est clai­re­ment affir­mé : « Nous le reje­tons [l’uniatisme] comme méthode de recherche d’unité. […] L’action pas­to­rale de l’Église catho­lique tant latine qu’orientale ne tend plus à faire pas­ser les fidèles d’une Église à l’autre. [128] » D’où la sup­pres­sion de la céré­mo­nie d’abjuration en cas de retour d’un héré­tique à l’Église catho­lique. Le car­di­nal Kasper va très loin dans ce type d’affirmations : « L’œcuménisme ne se fait pas en renon­çant à notre propre tra­di­tion de foi. Aucune Église ne peut pra­ti­quer ce renon­ce­ment. [129] » Il ajoute encore : « Nous pou­vons décrire l’ “ethos” propre à l’œcuménisme de vie de la façon sui­vante : renon­ce­ment à toute forme de pro­sé­ly­tisme ouvert ou camou­flé. [130] » Tout cela est radi­ca­le­ment oppo­sé à la pra­tique constante des papes à tra­vers les siècles, qui ont tou­jours œuvré au retour des dis­si­dents à l’unique Église [131].

Il engendre un égalitarisme entre les confessions chrétiennes

41. La pra­tique œcu­mé­nique engendre un éga­li­ta­risme entre les catho­liques et autres chré­tiens, lorsque par exemple Jean-​Paul II se réjouit du fait que, « à l’expression frères sépa­rés, l’usage tend à sub­sti­tuer aujourd’hui des termes plus aptes à évo­quer la pro­fon­deur de la com­mu­nion liée au carac­tère bap­tis­mal. […] La conscience de l’appartenance com­mune au Christ s’approfondit. […] La “fra­ter­ni­té uni­ver­selle” des chré­tiens est deve­nue une ferme convic­tion œcu­mé­nique. [132] » Plus encore, c’est l’Église catho­lique elle-​même qui, pra­ti­que­ment, est mise à pied d’égalité avec les Communautés sépa­rées : nous avons déjà men­tion­né l’expression “Églises-​sœurs” ; Jean-​Paul II se réjouit éga­le­ment de ce que « le Directoire pour l’application des prin­cipes et des normes sur l’œcuménisme appelle les Communautés aux­quelles appar­tiennent ces chré­tiens des “Églises et [des] Communautés ecclé­siales qui ne sont pas en pleine com­mu­nion avec l’Église catho­lique”. […] Reléguant dans l’oubli les excom­mu­ni­ca­tions du pas­sé, les Communautés, un temps rivales, s’aident aujourd’hui mutuel­le­ment. [133] » Se réjouir de cela, c’est oublier que « recon­naître la qua­li­té d’Église au schisme de Photius et à l’Anglicanisme […] favo­rise l’indifférentisme reli­gieux […] et arrête la conver­sion des non-​catholiques à la véri­table et unique Église. [134] »

Il humilie l’Église et enorgueillit les dissidents

42. La pra­tique œcu­mé­nique des repen­tances dis­suade les infi­dèles de se tour­ner vers l’Église catho­lique, en rai­son de la fausse image qu’elle y donne d’elle-même. S’il est pos­sible de por­ter devant Dieu la faute de ceux qui nous ont pré­cé­dés [135], en revanche la pra­tique des repen­tances telle que nous la connais­sons laisse croire que c’est l’Église catho­lique en tant que telle qui est péche­resse, puisque c’est elle qui demande par­don. Le pre­mier à le croire est le car­di­nal Kasper : « Il [le concile Vatican II] recon­nut que l’Église catho­lique avait une res­pon­sa­bi­li­té dans la divi­sion des chré­tiens et sou­li­gna que le réta­blis­se­ment de l’unité sup­po­sait une conver­sion des uns et des autres au Seigneur. [136] » Les textes jus­ti­fi­ca­tifs n’y font donc rien : la note ecclé­siale de sain­te­té, si puis­sante pour atti­rer les âmes éga­rées à l’unique ber­cail, a été ter­nie. Ces repen­tances sont donc gra­ve­ment impru­dentes, car elles humi­lient l’Église catho­lique et enor­gueillissent les dis­si­dents. D’où la mise en garde du Saint-​Office : « Ils [les évêques] empê­che­ront soi­gneu­se­ment et avec une réelle insis­tance qu’en expo­sant l’histoire de la Réforme et des Réformateurs, on n’exagère tel­le­ment les défauts des catho­liques et on ne dis­si­mule tel­le­ment les fautes des Réformateurs ou bien qu’on mette tel­le­ment en lumière des élé­ments plu­tôt acci­den­tels que l’on ne voie et ne sente presque plus ce qui est essen­tiel, la défec­tion de la foi catho­lique. [137] »

Conclusion

43. Considéré sous l’angle pas­to­ral, on doit dire de l’œcuménisme de ces der­nières décen­nies qu’il mène les catho­liques à l’« apos­ta­sie silen­cieuse » et qu’il dis­suade les non-​catholiques d’entrer dans l’unique arche de salut. Il faut donc réprou­ver « l’impiété de ceux qui ferment aux hommes l’entrée du Royaume des cieux. [138] » Sous cou­vert de recher­cher l’unité, cet œcu­mé­nisme dis­perse les bre­bis ; il ne porte pas la marque du Christ, mais celle du divi­seur par excel­lence, le diable.

Conclusion générale

44. Si atti­rant qu’il puisse paraître au pre­mier abord, si spec­ta­cu­laires que puissent appa­raître ses céré­mo­nies à la télé­vi­sion, aus­si nom­breuses que puissent être les foules qu’il ras­semble, la réa­li­té demeure : l’œcuménisme a fait de cette cité sainte qu’est l’Église une ville en ruine. Marchant à la suite d’une uto­pie – l’unité du genre humain – le pape n’a pas réa­li­sé com­bien l’œcuménisme qu’il pour­sui­vait était pro­pre­ment et tris­te­ment révo­lu­tion­naire : il ren­verse l’ordre vou­lu par Dieu.

45. Révolutionnaire il l’est, révo­lu­tion­naire il s’affirme. On reste impres­sion­né par la suc­ces­sion des textes le rap­pe­lant : « L’approfondissement de la com­mu­nion dans une réforme constante […] est sans doute un des traits dis­tinc­tifs les plus impor­tants de l’œcuménisme. [139] » « En repre­nant l’idée que le Pape Jean XXIII avait expri­mée à l’ouverture du concile, le Décret sur l’œcuménisme fait figu­rer la manière de refor­mu­ler la doc­trine par­mi les élé­ments de la réforme per­ma­nente[140] » Par moments, cette affir­ma­tion se pare d’onction ecclé­sias­tique pour deve­nir “conver­sion”. En l’occurrence, la dif­fé­rence importe peu. Dans les deux cas, ce qui pré­exis­tait est reje­té : « “Convertissez-​vous”. Il n’est aucun rap­pro­che­ment œcu­mé­nique sans conver­sion et sans renou­vel­le­ment. Non la conver­sion d’une confes­sion à l’autre. […] Tous doivent se conver­tir. Nous ne devons donc pas deman­der d’abord “Qu’est-ce qui ne va pas avec l’autre ?”, mais “Qu’est-ce qui ne va pas chez nous ; par où com­men­cer, chez nous, le ménage ?” [141] » Trait carac­té­ris­tique de son aspect révo­lu­tion­naire, l’appel au peuple que clame cet œcu­mé­nisme : « Dans l’action œcu­mé­nique, les fidèles de l’Église catho­lique […] consi­dé­re­ront sur­tout avec loyau­té et atten­tion tout ce qui, dans la famille catho­lique elle-​même, a besoin d’être réno­vé[142] » Oui, vrai­ment, en cette ivresse d’aggiornamento, la tête a besoin d’être dépas­sée par les membres : « Le mou­ve­ment œcu­mé­nique est un pro­ces­sus quelque peu com­plexe, et ce serait une erreur de s’attendre, du côté catho­lique, à ce que tout soit fait par Rome. […] Les intui­tions, les défis doivent aus­si venir des Églises locales, et beau­coup doit être fait au niveau local avant que l’Église uni­ver­selle le fasse sien. [143] »

46. Comment, en ces tristes cir­cons­tances, ne pas entendre le cri de l’Ange à Fatima : « Pénitence, Pénitence, Pénitence » ? En cette marche uto­pique, le demi-​tour doit être radi­cal. Il est urgent de reve­nir à la sage expé­rience de l’Église, syn­thé­ti­sée ici par le Pape Pie XI : « L’union des chré­tiens ne peut être pro­cu­rée autre­ment qu’en favo­ri­sant le retour des dis­si­dents à la seule véri­table Église du Christ, qu’ils ont eu jadis le mal­heur d’abandonner. [144] » Telle est la véri­table et cha­ri­table pas­to­rale à l’endroit des éga­rés, telle doit être la prière de l’Église : « Nous dési­rons que monte vers Dieu la com­mune sup­pli­ca­tion de tout le Corps mys­tique [c’est-à-dire de toute l’Église catho­lique] afin que toutes les bre­bis errantes rejoignent au plus tôt l’unique ber­cail de Jésus-​Christ. [145] »

47. En atten­dant l’heure heu­reuse de ce retour à la rai­son, nous gar­dons pour notre part le sage avis et la ferme sagesse reçus de notre fon­da­teur : « Nous vou­lons être dans une uni­té par­faite avec le Saint-​Père, mais dans l’unité de la foi catho­lique, parce qu’il n’y a que cette uni­té qui peut nous réunir, et non pas une espèce d’union œcu­mé­nique, une sorte d’œcuménisme libé­ral ; car je crois que ce qui défi­nit le mieux toute la crise de l’Église, c’est vrai­ment cet esprit œcu­mé­nique libé­ral. Je dis œcu­mé­nisme libé­ral, parce qu’il y a un cer­tain œcu­mé­nisme qui, s’il est bien défi­ni, pour­rait être accep­table. Mais l’œcuménisme libé­ral, tel qu’il est pra­ti­qué par l’Église actuelle et sur­tout depuis le concile Vatican II, com­porte néces­sai­re­ment de véri­tables héré­sies [146]. » Faisant de sur­croît mon­ter notre sup­pli­ca­tion vers le Ciel, nous implo­rons le Christ pour son Corps qu’est l’Église catho­lique, en disant : « Salvum me fac, Domine, quo­niam defe­cit sanc­tus, quo­niam dimi­nutæ sunt veri­tates a filiis homi­num. Vana locu­ti sunt unus­quisque ad proxi­mum suum : labia dolo­sa in corde et corde locu­ti sunt. Disperdat Dominus uni­ver­sa labia dolo­sa et lin­guam magni­lo­quam. [147] »

Notes de bas de page
  1. Jean-​Paul II, Ecclesia in Europa, n° 7 et 9, La docu­men­ta­tion catho­lique n° 2296 du 20 juillet 2003, p. 668 ss.[]
  2. W. Kasper, The Tablet, Saturday, 24 May 2003, May They All Be One ? but how ? A Vision of Christian Unity for the Next gene­ra­tion.[]
  3. Pie XI Mortalium ani­mos du 6 jan­vier 1928, AAS 20 (1928), p. 7.[]
  4. Ibid. p. 14.[]
  5. Jean-​Paul II, Allocution au secré­ta­riat pour l’unité des chré­tiens du 18 nov. 1978, La docu­men­ta­tion catho­lique (DC) nº 1753 du 03 déc. 1978 p. 1017.[]
  6. Jean-​Paul II, Angélus du 17 janv. 1982, DC nº 1823 du 7 fév. 1982, p. 144.[]
  7. Jean-​Paul II, 1er mes­sage au monde du 17 oct. 1978, DC nº 1751 du 5 nov. 1978, p. 902-​903.[]
  8. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen Gentium, nº 1.[]
  9. Jean-​Paul II, 1er mes­sage au monde du 17 oct. 1978, DC nº 1751 du 05 nov. 1978, p. 903.[]
  10. Jean-​Paul II, Tertio mil­len­nio adve­niente, nº 24. Cf. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 42 : « Les célé­bra­tions œcu­mé­niques sont par­mi les évé­ne­ments les plus impor­tants de mes voyages apos­to­liques dans les dif­fé­rentes par­ties du monde. »[]
  11. Jean-​Paul II, Homélie à l’ouverture de la Porte Sainte à Saint-​Paul-​hors-​les-​Murs du 18/​01/​2000, DC nº 2219 du 06/​02/​2000, p. 106 : « La Semaine de Prière pour l’unité des chré­tiens com­mence aujourd’hui à Rome avec la célé­bra­tion qui nous voit réunis. J’ai vou­lu qu’elle coïn­cide avec l’ouverture de la Porte Sainte dans cette basi­lique consa­crée à l’Apôtre des nations, pour sou­li­gner la dimen­sion œcu­mé­nique qui doit carac­té­ri­ser l’Année jubi­laire 2000. »[]
  12. Jean-​Paul II, Tertio mil­len­nio adve­niente, nº 34.[]
  13. Jean-​Paul II, Redemptor homi­nis, nº 1.[]
  14. Jean-​Paul II, Homélie pro­non­cée en pré­sence du Patriarche œcu­mé­nique de Constantinople Dimitrios 1er le 29/​11/​1979 à Istanbul, DC nº 1776 du 16/​12/​1979, p. 1056.[]
  15. Jean-​Paul II, Message pour la XVe Rencontre inter­na­tio­nale de prière pour la paix, DC nº 2255 du 07/​10/​2001, p. 818.[]
  16. Jean-​Paul II, Ecclesia in Europa, nº 7, DC nº 2296 du 20/​07/​2003, p. 670-​671.[]
  17. Jean-​Paul II, Ecclesia in Europa, nº 7 & 9, DC nº 2296 du 20/​07/​2003, p. 671672.[]
  18. Jean-​Paul II, La situa­tion du monde et l’esprit d’Assise, Discours aux car­di­naux et à la Curie du 22/​12/​1986, DC nº 1933 du 01/​02/​1987, p. 134.[]
  19. Jean-​Paul II, Tertio mil­len­nio adve­niente, nº 6.[]
  20. Jean-​Paul II, Redemptor homi­nis nº 13.[]
  21. Jean-​Paul II, Message aux peuples d’Asie du 21/​02/​1981, DC nº 1804 du 15/​03/​1981, p. 281.[]
  22. Jean-​Paul II, La situa­tion du monde et l’esprit d’Assise, dis­cours aux car­di­naux et à la Curie du 22/​12/​1986, DC nº 1933 du 01/​02/​1987, p. 134.[]
  23. Jean-​Paul II, ibid.[]
  24. Jean-​Paul II, ibid., p. 133.[]
  25. Jean-​Paul II, Tertio mil­len­nio adve­niente, nº 6.[]
  26. Jean-​Paul II, Ut unum sint nº 42 : « L’usage tend à sub­sti­tuer aujourd’hui des termes plus aptes à expri­mer la pro­fon­deur de la com­mu­nion - liée au carac­tère bap­tis­mal -, que l’Esprit nour­rit mal­gré les rup­tures his­to­riques et cano­niques. »[]
  27. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 3 : « Parmi les élé­ments ou les biens par l’ensemble des­quels l’Église se construit et est vivi­fiée, plu­sieurs et même beau­coup, et de grande valeur, peuvent exis­ter en dehors des limites visibles de l’Église catho­lique. […] Tout cela, qui pro­vient du Christ et conduit à lui, appar­tient de droit à l’unique Église du Christ. » C’est en rai­son de cette affir­ma­tion que LG nº 8 dit de l’Église du Christ qu’elle “sub­siste dans” l’Église catho­lique, et non qu’elle “est” l’Église catho­lique. Cf. com­men­taire du car­di­nal Ratzinger, L’ecclésiologie de la Constitution conci­liaire Lumen Gentium, confé­rence du 27/​02/​2000, DC nº 2223 du 02/​04/​2000, p. 310-​311 : « Par cette expres­sion, le Concile se dif­fé­ren­cie de la for­mule de Pie XII qui avait dit dans son Encyclique Mystici Corporis : l’Église catho­lique “est” (est, en latin) cepen­dant l’unique corps mys­tique du Christ. […] La dif­fé­rence entre “sub­sis­tit” et “est” ren­ferme le drame de la divi­sion ecclé­siale. Bien que l’Église soit seule­ment une et sub­siste en un unique sujet, des réa­li­tés ecclé­siales existent en dehors de ce sujet : de véri­tables Églises locales et diverses Communautés ecclé­siales. »[]
  28. Cette affir­ma­tion découle direc­te­ment de la manière dont Lumen Gentium (nº 7 et 8) pré­sente l’Église. Jusque là, le Magistère la tirait de l’analogie pau­li­nienne selon laquelle l’Église est le corps du Christ ; corps, donc visible : « Parce qu’elle est un corps, l’Église est visible à nos regards. » (Léon XIII, Satis cogni­tum, DzH 3300). Or le concile refuse de faire ce lien : il traite sépa­ré­ment de l’Église corps du Christ (LG, nº 7) et de la visi­bi­li­té de l’Église catho­lique (LG, nº 8). C’est lais­ser entendre que l’Église corps du Christ [l’Église du Christ] n’est pas de soi quelque chose de visible. Certes, LG nº 8 affirme l’union néces­saire de l’Église du Christ et de l’Église orga­nique : « La socié­té douée d’organes hié­rar­chiques [Église catho­lique] et le Corps mys­tique du Christ [Église du Christ], l’assemblée visible [Église catho­lique] et la com­mu­nau­té spi­ri­tuelle [Église du Christ], l’Église de la terre [Église catho­lique] et l’Église si riche en biens célestes [Église du Christ], ne doivent pas être consi­dé­rés comme deux réa­li­tés, mais forment une seule réa­li­té com­plexe. » Mais cette affir­ma­tion n’est pas suf­fi­sante : l’union de deux choses dis­tinctes – l’Église du Christ et l’Église orga­nique – n’est pas l’affirmation de l’unité propre à l’Église. Cette uni­té est au contraire refu­sée, lorsqu’il est dit de l’Église du Christ qu’elle « sub­siste dans l’Église catho­lique » : le rap­port de conte­nant à conte­nu n’est pas celui de l’identité, sur­tout lorsqu’il est affir­mé que l’Église du Christ se rend pré­sente de manière agis­sante ailleurs que dans ce conte­nu par­fait qu’est l’Église catho­lique. En consé­quence de cette affir­ma­tion et dans la suite de LG nº 15, Jean-​Paul II affirme sou­vent que le bap­ti­sé, quelle que soit son appar­te­nance ecclé­siale est et demeure uni au Christ, incor­po­ré à lui. Cette théo­rie affir­mant l’intériorité de l’Église du Christ est tel­le­ment répan­due que des car­di­naux aus­si dif­fé­rents que J. Ratzinger et W. Kasper la rap­pellent comme une évi­dence : « “L’Église se réveille dans les âmes” : Cette phrase de Guardini avait été lon­gue­ment mûrie. En effet, elle mon­tra que l’Église était fina­le­ment recon­nue et vécue comme quelque chose d’intérieur, qui n’existe pas face à nous comme une ins­ti­tu­tion quel­conque mais qui vit en nous-​mêmes. Si, jusqu’alors, l’Église avait été consi­dé­rée tout d’abord comme une struc­ture et une orga­ni­sa­tion, on prit fina­le­ment conscience que nous étions nous-​mêmes l’Église. Elle était beau­coup plus qu’une orga­ni­sa­tion : elle était l’organisme de l’Esprit Saint, quelque chose de vital, qui nous sai­sit tous dans notre inti­mi­té. Cette nou­velle conscience de l’Église trou­va son expres­sion lin­guis­tique dans le concept de “corps mys­tique du Christ” » (J. Ratzinger, L’ecclésiologie de Vatican II, confé­rence don­née le 15/​09/​2001 à l’occasion de l’ouverture du Congrès pas­to­ral du dio­cèse d’Aversa) ; « La véri­table nature de l’Église – l’Église en tant que Corps du Christ – est cachée, et elle n’est sai­sis­sable que par la foi. Mais cette nature sai­sis­sable uni­que­ment par la foi, s’actualise sous des formes visibles. » (W. Kasper, L’engagement œcu­mé­nique de l’Église catho­lique, confé­rence du 23/​03/​2002 à l’assemblée géné­rale de la fédé­ra­tion de France, Œcuménisme infor­ma­tions nº 325 de mai 2002 et 326 de juin 2002.[]
  29. “Pour le moins” : Karol Wojtyla est allé en effet beau­coup plus loin, à l’occasion de la retraite qu’il a prê­chée au Vatican alors qu’il n’était que car­di­nal : « Dieu de Majesté infi­nie ! le trap­piste ou le char­treux confesse ce Dieu par toute une vie de silence. C’est vers lui que se tourne le bédouin péré­gri­nant dans le désert quand vient l’heure de la prière. Et ce moine boud­dhiste se concentre dans sa contem­pla­tion qui puri­fie son esprit en l’orientant vers le Nirvana : mais est-​ce seule­ment du côté du Nirvana ? […] L’Église du Dieu vivant réunit jus­te­ment en elle ces gens qui de quelque manière par­ti­cipent à cette trans­cen­dance à la fois admi­rable et fon­da­men­tale de l’esprit humain. » (Karol Wojtyla, Le signe de contra­dic­tion, Ed. Fayard 1979, p. 31-​32[]
  30. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 42.[]
  31. Jean-​Paul II, ibid.[]
  32. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 9.[]
  33. Congrégation pour la Doctrine de la foi, Lettre sur cer­tains aspects de l’Église com­prise comme Communion, nº 6, DC nº 2055 du 02/​08/​1992, p. 730.[]
  34. Cf. Directoire pour l’application des prin­cipes et des normes sur l’œcuménisme (approu­vé par Jean-​Paul II le 25/​03/​1993), nº 13, DC nº 2075 du 04/​07/​1993, p. 611.[]
  35. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 11.[]
  36. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 3 : « Ceux qui croient au Christ et qui ont reçu vali­de­ment le bap­tême, se trouvent dans une cer­taine com­mu­nion, bien qu’imparfaite, avec l’Église catho­lique. Assurément, des diver­gences variées entre eux et l’Église catho­lique sur des ques­tions doc­tri­nales, par­fois dis­ci­pli­naires, ou sur la struc­ture de l’Église, consti­tuent nombre d’obstacles, par­fois fort graves, à la pleine com­mu­nion ecclé­siale. Le mou­ve­ment œcu­mé­nique tend à les sur­mon­ter. » Voilà pour ce qui concerne la com­mu­nion visible par­tiel­le­ment bri­sée ; mais le décret ajoute aus­si­tôt, afin de mon­trer la per­ma­nence de la com­mu­nion invi­sible : « Néanmoins, jus­ti­fiés par la foi reçue au bap­tême, incor­po­rés au Christ, ils portent à juste titre le nom de chré­tiens, et les fils de l’Église catho­lique les recon­naissent à bon droit comme des frères dans le Seigneur. […] De même, chez nos frères sépa­rés s’accomplissent beau­coup d’actions sacrées de la reli­gion chré­tienne qui, de manières dif­fé­rentes selon la situa­tion diverse de chaque Église ou com­mu­nau­té, peuvent cer­tai­ne­ment pro­duire effec­ti­ve­ment la vie de la grâce, et l’on doit recon­naître qu’elles donnent accès à la com­mu­nion du salut. »[]
  37. Cf. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 56, 57 et 60 ; Allocution dans la basi­lique Saint-​Nicolas de Bari du 26/​02/​1984, DC nº 1872 du 15/​04/​1984, p. 414 ; Déclaration chris­to­lo­gique com­mune entre l’Église catho­lique et l’Église assy­rienne d’Orient, DC nº 2106 du 18/​12/​1994, p. 1070 ; Homélie pro­non­cée en pré­sence du Patriarche œcu­mé­nique de Constantinople Dimitrios 1er le 29/​11/​1979 à Istanbul, DC nº 1776 du 16/​12/​1979, p. 1056 : « Je vous invite à prier avec fer­veur pour la pleine com­mu­nion de nos Églises. […] Suppliez le Seigneur pour que nous-​mêmes, pas­teurs des Eglises-​sœurs, nous soyons les meilleurs ins­tru­ments en cette heure de l’Histoire, pour régir ces Églises, c’est-à-dire pour les ser­vir comme le veut le Seigneur, et ser­vir ain­si l’unique Église qui est son Corps. »[]
  38. Cf. Jean-​Paul II, Tertio mil­len­nio adve­niente, nº 16.[]
  39. Jean-​Paul II, Discours à la délé­ga­tion de la Fédération luthé­rienne mon­diale du 09/​12/​1999, DC nº 2219 du 06/​02/​2000, p. 109.[]
  40. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen Gentium, nº 8 ; Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 4 ; Décl. Dignitatis humanæ, nº 1.[]
  41. Cardinal Ratzinger, L’ecclésiologie de la Constitution conci­liaire Lumen Gentium, confé­rence du 27/​02/​2000, DC nº 2223 du 02/​04/​2000, p. 311.[]
  42. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 3 ; Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 11[]
  43. Jean-​Paul II, Tertio mil­len­nio adve­niente, nº 37.[]
  44. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 77.[]
  45. On entend par “œcu­mé­nisme de retour” celui rap­pe­lé par Pie XI dans l’encycl. Mortalium ani­mos : « Pousser au retour des dis­si­dents à la seule véri­table Église du Christ, puisqu’ils ont eu jadis le mal­heur de s’en sépa­rer. Le retour à l’unique véri­table Église, disons-​Nous, bien visible à tous les regards. »[]
  46. Déclaration de la Commission mixte inter­na­tio­nale pour le dia­logue théo­lo­gique entre l’Église catho­lique et l’Église ortho­doxe du 23/​06/​1993, dite “de Balamand”, nº 2 et 22, DC nº 2077 du 01–15/08/1993, p. 713. Cette cita­tion ne concerne que l’uniatisme, mais le car­di­nal Kasper aura des for­mules sys­té­ma­tiques : « Le vieux concept d’œcuménisme du retour a été rem­pla­cé aujourd’hui par celui d’itinéraire com­mun, qui dirige les chré­tiens vers le but de la com­mu­nion ecclé­siale com­prise comme uni­té dans la diver­si­té récon­ci­liée » (W. Kasper, La Déclaration com­mune sur la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion : un motif d’espérance, DC nº 2220 du 20/​02/​2000, p. 167).[]
  47. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 3 : « Apparurent cer­taines scis­sions, […] naquirent des dis­sen­sions plus graves, […] par­fois par la faute des per­sonnes de l’une ou de l’autre par­tie ». D’où la nature de la conver­sion récla­mée par UR, nº 7 : « Il n’y a pas de véri­table œcu­mé­nisme sans conver­sion inté­rieure. En effet, c’est du renou­veau de l’âme, du renon­ce­ment à soi-​même et d’une libre effu­sion de la cha­ri­té que partent et mûrissent les dési­rs de l’unité. » Cf. Cardinal Kasper, Conférence au Kirchentag œcu­mé­nique de Berlin, DC nº 2298 du 07-​21/​09/​2003 : « “Convertissez-​vous”. Il n’est aucun rap­pro­che­ment œcu­mé­nique sans conver­sion et sans renou­vel­le­ment. Non la conver­sion d’une confes­sion à l’autre. Il peut y en avoir dans des cas par­ti­cu­liers, et si c’est pour des rai­sons de conscience, cela mérite res­pect et consi­dé­ra­tion. Mais il n’y a pas que les autres à devoir se conver­tir, la conver­sion com­mence par soi-​même. Tous doivent se conver­tir. Nous ne devons donc pas deman­der d’abord “Qu’est-ce qui ne va pas avec l’autre ?”, mais “Qu’est-ce qui ne va pas chez nous ; par où com­men­cer, chez nous, le ménage ?” »[]
  48. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 11 ; cf. nº 34.[]
  49. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen Gentium, nº 13 ; cf. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 28.[]
  50. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 57.[]
  51. Jean-​Paul II, Allocution dans la basi­lique Saint-​Nicolas de Bari du 26/​02/​1984, pro­non­cée en pré­sence du métro­po­lite de Myre, Konstantinidis (patriar­cat de Constantinople), DC nº 1872 du 15/​04/​1984, p. 414.[]
  52. Ibid.[]
  53. Jean-​Paul II, Angélus du 17/​01/​1982, DC nº 1823 du 07/​02/​1982, p. 144.[]
  54. A. Bugnini, Modifications aux orai­sons solen­nelles du Vendredi Saint, DC nº 1445 du 04/​03/​1965, col. 603. Cf. G. Celier, La dimen­sion œcu­mé­nique de la réforme litur­gique, Editions Fideliter, 1987, p. 34.[]
  55. Cf. l’ Osservatore Romano ita­lien du 26/​10/​2001. Admission à l’Eucharistie entre l’Église chal­déenne et l’Église assy­rienne d’Orient, Note et orien­ta­tions du Conseil pon­ti­fi­cal pour la pro­mo­tion de l’unité des chré­tiens, DC nº 2265, du 03/​03/​2002, p. 214.[]
  56. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 38.[]
  57. Jean-​Paul II, citant dans Ut unum sint, nº 38 la Déclaration Mysterium Ecclesiæ de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (DC nº 1636 du 15/​07/​1973, p. 267).[]
  58. Déclaration chris­to­lo­gique com­mune entre l’Église catho­lique et l’Église assy­rienne d’Orient, DC nº 2106 du 18/​12/​1994, p. 1069.[]
  59. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 38.[]
  60. DC nº 2106 du 18/​12/​1994, p. 1069. Cf. DzH, nº 251d et 252.[]
  61. Déclaration com­mune de la Fédération luthé­rienne mon­diale et de l’Église catho­lique, nº 7 (cf. nº 5, 13, 40 à 42), DC nº 2168 du 19/​10/​1997, p. 875.[]
  62. W. Kasper, La Déclaration com­mune sur la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion : un motif d’espérance, DC nº 2220 du 20/​02/​2000, p. 172.[]
  63. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 95.[]
  64. La pri­mau­té du suc­ces­seur de Pierre dans le mys­tère de l’Église, réflexions de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, DC nº 2193 du 06/​12/​1998 p. 1018.[]
  65. Léon XIII, Lettre apos­to­lique Apostolicæ curæ du 13/​09/​1896.[]
  66. W. Kasper, May They All Be One ? But how ? A Vision of Christian Unity for the Next Generation, The Tablet du 24/​05/​2003.[]
  67. Nous limi­tant ici à la seule réfu­ta­tion de l’œcuménisme, nous n’étudierons pas l’enseignement de Jean-​Paul II rela­tif à la rédemp­tion accom­plie de fait en chaque per­sonne et en chaque peuple. Nous dirons sim­ple­ment qu’une telle pro­po­si­tion est tota­le­ment étran­gère à la foi catho­lique et la ruine de fond en comble (que devient par exemple la néces­si­té du bap­tême ?).[]
  68. Calvin, Inst., l. 4, c. 4.[]
  69. Léon XIII, ency­cl. Satis cogni­tum, DzH nº 3300 ss.[]
  70. Pie XI, ency­cl. Mortalium ani­mos, AAS 20 (1928), p. 8. Enseignements Pontificaux de Solesmes, L’Église, (EP) vol. 1, nº 861.[]
  71. Pie XII, ency­cl. Mystici Corporis, AAS 35 (1943), p. 199-​200. EP, vol. 2, nº 1015.[]
  72. Pie XII, ency­cl. Mystici Corporis, Ibid., p. 199. EP, vol. 2, nº 1014.[]
  73. Lettre du Saint-​Office aux évêques d’Angleterre du 16/​09/​1864, DzH nº 2888.[]
  74. Pie IX, Allocution au consis­toire du 18/​07/​1861, EP, vol. 1, nº 230.[]
  75. Schéma réfor­mé du concile Vatican I sur l’Église, can. 4, Mansi, 53, 316.[]
  76. W. Kasper, L’engagement œcu­mé­nique de l’Église catho­lique, confé­rence du 23/​03/​2002 à l’assemblée géné­rale de la Fédération pro­tes­tante de France, Œcuménisme infor­ma­tions nº 325 (05/​2002) et 326 (06/​2002).[]
  77. W. Kasper, ibid.[]
  78. Ce triple lien doit, redisons-​le, être pos­sé­dé soit de fait, soit au moins « par un cer­tain désir ou vœu incons­cient » (Cf. Pie XII, Mystici Corporis, AAS 35 (1943), p. 243. DzH 3821). Mais de ce désir, l’Église n’est pas juge. En matière juri­dique – ce qui est le cas ici – l’Église ne peut juger des réa­li­tés inté­rieures à la conscience de cha­cun, mais seule­ment de ce qui appa­raît : « De l’état d’esprit et de l’intention, parce que ce sont choses inté­rieures, l’Église ne juge pas ; mais en tant qu’ils paraissent au dehors, elle doit en juger » (Léon XIII, Lettre apos­to­lique Apostolicæ curæ du 13/​09/​1896 sur la nul­li­té des ordi­na­tions angli­canes, ASS 29 (1896-​1897), p. 201. DzH 3318). Dès lors, même si, dans sa pas­to­rale, comme une bonne mère, elle incline à espé­rer leur appar­te­nance “de désir au moins incons­cient” lorsqu’elle les approche quand ils se trouvent dans le péril de mort (Dom. M. Prümmer, o.p., Manuale theo­lo­giæ mora­lis, T. 1, nº 514, 3), cepen­dant, juri­di­que­ment, l’Église ne le pré­sume pas en temps nor­mal. C’est pour­quoi elle a tou­jours exi­gé, ad cau­te­lam, leur abju­ra­tion du schisme ou de l’hérésie lorsqu’ils reviennent à l’Église catho­lique (Cf. CIC 1917, can. 2314, § 2). A plus forte rai­son ne présume-​t-​elle pas la bonne foi des dis­si­dents consi­dé­rés en corps consti­tué, en com­mu­nau­té visi­ble­ment sépa­rée de l’Église catho­lique, ain­si que l’envisage l’œcuménisme. Ce que nous disons des trois élé­ments néces­saires à l’appartenance à l’Église catho­lique sup­pose la pré­somp­tion sus­dite. Vouloir l’élider serait se mou­voir dans l’incertain et l’irréel.[]
  79. He 11, 6 : « Sans la foi, il est impos­sible de plaire à Dieu. »[]
  80. Saint Pie X, Pascendi domi­ni­ci gre­gis : « La foi, prin­cipe et fon­de­ment de toute reli­gion, réside dans un cer­tain sen­ti­ment intime engen­dré lui-​même par le besoin du divin… Telle est, pour les moder­nistes, la foi, et dans la foi ain­si enten­due, le com­men­ce­ment de toute reli­gion » (Acta S. Pii X 4 (1907), p. 52 ; DzH 3477 ne cite pas inté­gra­le­ment). Cette brève des­crip­tion est à com­pa­rer avec la pen­sée de Karol Wojtyla (Le signe de contra­dic­tion, Ed. Fayard 1979, p. 31-​32) : « Dieu de Majesté infi­nie ! Le trap­piste ou le char­treux confesse ce Dieu par toute une vie de silence. C’est vers lui que se tourne le bédouin péré­gri­nant dans le désert quand vient l’heure de la prière. Et ce moine boud­dhiste se concentre dans sa contem­pla­tion qui puri­fie son esprit en l’orientant vers le Nirvana : mais est-​ce seule­ment du côté du Nirvana ? […] L’Église du Dieu vivant réunit jus­te­ment en elle ces gens qui de quelque manière par­ti­cipent à cette trans­cen­dance à la fois admi­rable et fon­da­men­tale de l’esprit humain, car elle sait que nul ne peut apai­ser les plus pro­fondes aspi­ra­tions de cet esprit si ce n’est lui seul, le Dieu de majes­té infi­nie. »[]
  81. Vatican I, sess. 3, c. 3, DzH nº 3008.[]
  82. Léon XIII, ency­cl. Satis cogni­tum du 29 juin 1896, ASS 28 (1895-​1896), p. 722. EP, vol. 1, nº 573.[]
  83. Pie IX, ency­cl. Amantissimus du 8 avril 1862, EP, vol. 1, nº 234, puis 234 à 237.[]
  84. Cf. saint Ambroise, Epist. 11 ad impe­ra­tores.[]
  85. Cf. saint Cyprien, De Unitate Ecclesiæ.[]
  86. Cf. saint Jérôme, Epist. 51 ad Damasum.[]
  87. Saint Augustin, De bap­tis­mo contra dona­tis­tas, lib. 1, ch. 14, § 22.[]
  88. Mc 16, 16.[]
  89. Léon XIII, ency­cl. Satis cogni­tum, ASS 28 (1895-​1896), p. 724. EP, vol. 1, nº 578.[]
  90. Pie IX, ency­cl. Amantissimus du 8 avril 1862, EP, vol. 1, nº 233.[]
  91. Pie XII, ency­cl. Mystici Corporis du 29 juin 1943, AAS 35 (1943), p. 203. DzH 3802.[]
  92. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 3, dont nous citons ici le pas­sage com­plet : « Ceux qui naissent aujourd’hui dans de telles com­mu­nau­tés, et qui vivent de la foi au Christ, ne peuvent être accu­sés de péché de divi­sion, et l’Église catho­lique les entoure de res­pect fra­ter­nel et de cha­ri­té. En effet, ceux qui croient au Christ et qui ont reçu vali­de­ment le bap­tême, se trouvent dans une cer­taine com­mu­nion, bien qu’imparfaite, avec l’Église catho­lique. Assurément, des diver­gences variées entre eux et l’Église catho­lique sur des ques­tions doc­tri­nales, par­fois dis­ci­pli­naires, ou sur la struc­ture de l’Église, consti­tuent nombre d’obstacles, par­fois fort graves, à la com­mu­nion ecclé­siale. Le mou­ve­ment œcu­mé­nique tend à les sur­mon­ter. Néanmoins, jus­ti­fiés par la foi reçue au bap­tême, incor­po­rés au Christ, ils portent à juste titre le nom de chré­tiens, et les fils de l’Église catho­lique les recon­naissent à bon droit comme des frères dans le Seigneur. »[]
  93. Cf. ci-​dessus, note 74.[]
  94. Pie IX, Allocution Singulari Quadam du 09/​12/​1854, Dz 1647 (ancienne numé­ro­ta­tion ; absent du DzH).[]
  95. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen Gentium, nº 8.[]
  96. Benoît XIV, Bref Singulari nobis du 9 fév. 1749, DzH nº 2566 à 2568.[]
  97. Concile de Florence, bulle Cantate Domino pour les jaco­bites, DzH 1351.[]
  98. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 3.[]
  99. Saint Augustin, De bap­tis­mo contra dona­tis­tas, lib. 1, ch. 10, nº 14.[]
  100. Saint Augustin, De bap­tis­mo contra dona­tis­tas, lib. 1, ch. 14, nº 22.[]
  101. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 3.[]
  102. Cf. J. Ratzinger, L’ecclésiologie de la Constitution conci­liaire Lumen Gentium, DC nº 2223 du 2/​04/​2000, p. 311. « Bien que l’Église soit seule­ment une et sub­siste en un unique sujet, des réa­li­tés ecclé­siales existent en dehors de ce sujet : de véri­tables Églises locales et diverses Communautés ecclé­siales. ». C’est qu’en effet, « on y trouve des élé­ments essen­tiels à l’être-Eglise : l’annonce de la Parole de Dieu et le bap­tême, la pré­sence active du Saint-​Esprit, foi, espé­rance et cha­ri­té, des formes de sain­te­té jusqu’au mar­tyre. On peut par­ler d’une confi­gu­ra­tion dif­fé­rente de ces élé­ments ecclé­siaux consti­tu­tifs, d’Églises d’un autre genre ou d’un autre type. » W. Kasper, L’engagement œcu­mé­nique de l’Église catho­lique, confé­rence du 23 mars 2002 lors de l’assemblée géné­rale de la Fédération pro­tes­tante de France, Œcuménisme infor­ma­tions nº 325 (05/​2002) et 326 (06/​2002).[]
  103. Saint Augustin, In Ps. 54, § 19, cité par Léon XIII (Satis cogni­tum) ASS 28 (1895-​1896), p. 724. EP, vol. 1, nº 578.[]
  104. Lettre du Saint-​Office aux évêques d’Angleterre du 16/​09/​1864. Cette théo­rie « pro­fesse expres­sé­ment que trois com­mu­nau­tés chré­tiennes, la catho­lique romaine, la gréco-​schismatique et l’anglicane, bien que sépa­rées et divi­sées entre elles, reven­diquent avec un même droit pour elles-​mêmes le nom de catho­lique. […] Elle demande à tous ses membres de réci­ter des prières et aux prêtres d’offrir des sacri­fices selon son inten­tion : à savoir pour que les trois com­mu­nions chré­tiennes qui, comme il est sug­gé­ré, consti­tuent toutes ensemble l’Église catho­lique, se réunissent enfin pour for­mer un unique corps. » DzH 2885 & 2886.[]
  105. Ibid., DzH nº 2886 & 2887.[]
  106. Jean-​Paul II, Ecclesia in Europa, nº 9, DC nº 2296 du 20/​07/​2003, p. 668 ss.[]
  107. Déclaration chris­to­lo­gique com­mune entre l’Église catho­lique com­mune et l’Église assy­rienne d’Orient, DC nº 2106 du 18/​12/​1994, p. 1069.[]
  108. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 38.[]
  109. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 4.[]
  110. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 38.[]
  111. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 57. Cf. Cardinal Kasper, La Déclaration com­mune sur la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion : un motif d’espérance, DC nº 2220 du 20/​02/​2000, p. 167 : « Il est appa­ru clai­re­ment que le but du dia­logue ne consiste pas à faire chan­ger le par­te­naire, mais à recon­naître nos propres man­que­ments et à apprendre de l’autre. […] Là où nous avions vu au pre­mier abord une contra­dic­tion, nous pou­vons voir une posi­tion com­plé­men­taire. »[]
  112. Congrégation du Saint-​Office, Instruction De motione œcu­me­ni­ca, du 20/​12/​1949, AAS 42 (1950), p. 144. DC nº 1064 du 12/​03/​1950, col. 332.[]
  113. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 11.[]
  114. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Déclaration Mysterium Ecclesiæ du 24/​06/​1973, DC nº 1636 du 15/​07/​1973, p. 667.[]
  115. Jean-​Paul II, Rencontre avec le conseil de l’Église évan­gé­lique du 17/​11/​1980, DC nº 1798 du 21/​12/​1980, p. 1147.[]
  116. Léon XIII, ency­cl. Testem bene­vo­len­tiæ du 22/​01/​1899, ASS 31 (1898-​1899), p. 471 ; Actes de Léon XIII, La bonne presse, vol. 5, p. 313. Cf. Pie XI, Mortalium ani­mos, AAS 28 (1920), p. 12 ; DzH nº 3683 : « S’agissant des points de foi, il n’est aucu­ne­ment licite de dis­tin­guer d’une quel­conque manière entre les points qui seraient fon­da­men­taux et ceux qui ne le seraient pas, les pre­miers devant être accep­tés de tous, et les autres pou­vant être lais­sés au libre assen­ti­ment des croyants ; la ver­tu sur­na­tu­relle de foi a sa cause for­melle dans l’autorité de Dieu révé­lant, qui ne tolère aucune dis­tinc­tion de ce type. »[]
  117. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 17 et 18.[]
  118. Pie XII, ency­cl. Humani gene­ris du 12/​08/​1950, AAS 42 (1950), p. 566-​567, DzH 3881-​83.[]
  119. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 11 ; Jean-​Paul II, Ut unum sint nº 36.[]
  120. Cf. Concile de Trente, Décret sur la jus­ti­fi­ca­tion, ch. 7, DzH 1528 : « La jus­ti­fi­ca­tion elle-​même [qui] n’est pas seule­ment rémis­sion des péchés, mais à la fois sanc­ti­fi­ca­tion et réno­va­tion de l’homme inté­rieur par la récep­tion volon­taire de la grâce et des dons. »[]
  121. Déclaration com­mune de la Fédération luthé­rienne mon­diale et de l’Église catho­lique, nº 27, DC nº 2168 du 19/​10/​1997, p. 875 ss.[]
  122. Congrégation du Saint-​Office, Décret du 20/​12/​1949, DC nº 1064 du 12/​03/​1950, col. 330 ss.[]
  123. Saint Augustin, Sermon au peuple de Césarée pro­non­cé en pré­sence d’Emérite, évêque dona­tiste, nº 6.[]
  124. Le pape Benoît XIV, dans son admi­rable De ser­vo­rum Dei bea­ti­fi­ca­tione et bea­to­rum cano­ni­za­tione, l’explique ain­si : si un héré­tique éta­bli dans l’ignorance invin­cible de la vraie foi meurt pour un point de doc­trine catho­lique, il ne peut, même dans ce cas, être consi­dé­ré comme mar­tyr. En effet, il sera peut-​être mar­tyr coram Deo, mais pas coram Ecclesia, car l’Église ne juge que de l’extérieur et l’hérésie pro­fes­sée publi­que­ment oblige à conjec­tu­rer l’hérésie interne. (De ser­vo­rum. c. 20) Quant à l’objection de saint Hippolyte, mar­tyr et anti­pape (217-​235), elle n’est pas à pro­pos. Si le mar­ty­ro­loge le men­tionne à la date du 30 octobre, dies nata­lis du pape saint Pontien, c’est parce qu’Hippolyte s’est récon­ci­lié avec Pontien dans les mines de Sardaigne, avant que tous deux ne subissent le mar­tyre en 236.[]
  125. W. Kasper, La Déclaration com­mune sur la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion : un motif d’espérance, DC nº 2220 du 20/​02/​2000, p. 171-​172.[]
  126. W. Kasper, 30 Jours dans l’Église et dans le monde, nº 5/​2003, p. 22.[]
  127. Pie IX, ency­cl. Neminem ves­trum du 2 fev. 1854, EP, vol. 1, nº 219.[]
  128. Déclaration de la Commission mixte pour le dia­logue entre l’Église catho­lique et l’Église ortho­doxe du 23/​06/​1993, dite “de Balamand”, nº 2 et 22, DC nº 2077 du 01/​08/​1993, p. 711.[]
  129. W. Kasper, La Déclaration com­mune sur la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion : un motif d’espérance, DC nº 2220 du 20/​02/​2000, p. 167. Cf. W. Kasper, Conférence au Kirchentag œcu­mé­nique de Berlin, DC nº 2298 du 21/​09/​2003, p. 817 : « Nous ne pou­vons jeter par-​dessus bord ce qui nous a por­tés et tenus jusqu’à pré­sent, ce dont nos devan­ciers ont vécu, en des cir­cons­tances sou­vent dif­fi­ciles, et nous ne devons pas attendre cela de nos frères et de nos sœurs du pro­tes­tan­tisme et de l’orthodoxie. Ni eux ni nous ne pou­vons deve­nir infi­dèles. »[]
  130. W. Kasper, L’engagement œcu­mé­nique de l’Église catho­lique, confé­rence du 23 mars 2002 lors de l’assemblée géné­rale de la Fédération pro­tes­tante de France, Œcuménisme infor­ma­tions nº 325 (05/​2002) et 326 (06/​2002).[]
  131. Cf. par exemple Pie IX, Lettre Jam vos omnes du 13/​09/​1868, ASS 4 (1868), p. 131, DzH 2997 à 2999, invi­tant les pro­tes­tants et autres non-​catholiques à pro­fi­ter de l’occasion du concile Vatican I pour reve­nir à l’Église catho­lique ; Léon XIII fait de même à l’occasion de son jubi­lé épis­co­pal par la Lettre Præclara gra­tu­la­tio­nis du 20/​06/​1894, ASS 26 (1894), p. 705 ss. Le texte le plus connu est évi­dem­ment celui de Pie XI dans l’encycl. Mortalium ani­mos du 06/​01/​1928, AAS 20 (1928), p. 14, EP, vol. 1, nº 872 : « L’union des chré­tiens ne peut être pro­cu­rée autre­ment qu’en favo­ri­sant le retour des dis­si­dents à la seule et véri­table Église du Christ, qu’ils ont jadis eu le mal­heur d’abandonner. » Ce n’est pas cette pra­tique du “retour” qui est propre au XIXe siècle, mais plu­tôt le grand sou­ci des Papes pour cette cause. En effet, cette pra­tique du “retour” est constante dans l’Église. En 1595, Clément VIII disait par exemple des évêques métro­po­li­tains de Kiev (Instruction Magnus Dominus du 23/​12/​1595) : « Grâce à la lumière du Saint-​Esprit qui illu­mi­nait leur cœur, ils ont com­men­cé à consi­dé­rer sérieu­se­ment qu’ils n’étaient plus membres du Corps du Christ qu’est l’Église puisqu’ils n’étaient pas liés avec sa tête visible qu’est le Souverain Pontife de Rome. C’est pour­quoi ils déci­dèrent de ren­trer dans l’Église romaine qui est leur mère et celle de tous les fidèles. »[]
  132. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 42.[]
  133. Jean-​Paul II, ibid.[]
  134. Congrégation du Saint-​Office, Lettre du 16/​09/​1864, ASS 2, 660.[]
  135. Thren. 5, 7 : « Nos pères ont péché : ils ne sont plus ; et nous, nous por­tons leurs fautes. »[]
  136. W. Kasper, La Déclaration com­mune sur la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion : un motif d’espérance, DC nº 2220 du 20/​02/​2000, p. 168.[]
  137. Congrégation du Saint-​Office, Instruction de Motione œcu­me­ni­ca du 20/​12/​1949, AAS 42 (1950), p. 144. DC nº 1064 du 12/​03/​1950, col. 332.[]
  138. 1er sché­ma pré­pa­ra­toire du concile Vatican I sur l’Église, publié dans EP, vol. 2 p. 8* : « Nous réprou­vons l’impiété de ceux qui ferment aux hommes l’entrée du Royaume des cieux, en assu­rant sous de faux pré­textes qu’il est désho­no­rant et nul­le­ment néces­saire au salut d’abandonner la reli­gion – même fausse – dans laquelle on est né, dans laquelle on a été éle­vé et ins­truit ; et qui font grief à l’Église elle-​même de se don­ner comme la seule reli­gion véri­table, de pros­crire et de condam­ner toutes les reli­gions et sectes sépa­rées de sa com­mu­nion, comme s’il pou­vait y avoir pos­si­bi­li­té de par­ti­ci­pa­tion entre la lumière et les ténèbres, d’accommodement entre le Christ et Bélial. »[]
  139. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 17.[]
  140. Jean-​Paul II, Ut unum sint, nº 18.[]
  141. W. Kasper, Conférence au Kirchentag œcu­mé­nique de Berlin, DC nº 2298 du 21/​09/​2003, p. 820.[]
  142. Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redin­te­gra­tio, nº 4 ; cf. tout le nº 6.[]
  143. W. Kasper, La Déclaration com­mune sur la doc­trine de la jus­ti­fi­ca­tion : un motif d’espérance, DC nº 2220 du 20/​02/​2000, p. 167.[]
  144. Pie XI, ency­cl. Mortalium ani­mos du 06/​01/​1928, AAS 20 (1928), p. 14, EP, vol. 1, nº 872.[]
  145. Pie XII, Mystici Corporis, AAS 35 (1943), p. 243, EP, vol. 1, nº 1105.[]
  146. Mgr Lefebvre, Conférence du 14/​04/​1978.[]
  147. Psaume 11, 2 à 4 : « Au secours, Seigneur, car le saint défaille, car les véri­tés sont dimi­nuées par les fils des hommes. Ils se disent des men­songes les uns aux autres, ils parlent avec des lèvres trom­peuses et un cœur double. Que le Seigneur dis­perse toutes les lèvres trom­peuses et la langue de bois. » Relativement au der­nier ver­set que nous citons, on se repor­te­ra uti­le­ment au com­men­taire qu’en fait saint Jean Chrysostome (In Ps. 11, nº 1) : « Ce n’est point contre eux qu’il parle, c’est dans leur inté­rêt ; il ne demande pas à Dieu de les perdre, mais de mettre fin à leurs ini­qui­tés. Il ne dit pas en effet : “Dieu les exter­mi­ne­ra” mais “il détrui­ra toutes ces lèvres trom­peuses”. Donc, encore une fois, ce n’est point leur nature qu’il sou­haite voir anéan­tie, mais leur lan­gage. »[]